Démembrée suite aux assauts répétés de l'écumante et nacrée monstruosité, nous avions laissé la carcasse du Pequod, sombrante, se perdre dans d'océaniques abymes. La tempête s'est calmée, les vents mugissants se sont tus et les éléments déchainés de "The Call Of The Wretched Sea", charriant et ballotant inlassablement leurs lots de cadavres boursouflés, font dorénavant place à l'immuabilité des immensités maritimes.

Et quelle œuvre plus appropriée que "Le Radeau De La Méduse" (1819), cette célèbre et si funeste vision de Géricault, pour retranscrire aussi parfaitement le sort tragique des naufragés de l'Essex, un autre de ces baleiniers saignés à blanc par une de leurs supposées si pataudes proies ? Un choix en tout cas tout indiqué pour illustrer les atmosphères dispensées par AHAB sur ce nouveau et second pachydermique rejeton. Car sur "The Divinity Of Oceans", tout n'est qu'aqueuses désolations dardées des brulants rayons d'un écrasant astre solaire à son zénith et où seules les complaintes des moribonds, entassés sur ce radeau de fortune, semblent faire écho au faible et immuable clapotis des flots. Ici, rien ne se meut, tout se meurt.

Laissant TYRANNY et ces autres effroyables bestiaux sous-marins à leurs abysses de terreurs, AHAB, en se rapprochant subrepticement de la surface, montre ici des velléités d'émancipation et ne joue déjà plus dans les mêmes zones pélagiques que ses carnassiers rivaux. Une fois de plus, l'espoir n'est que peu permis. Cette écrasante et pesante fatalité propre au Funeral-Doom plane comme il se doit sur l'œuvre du trio allemand, devenu quatuor, mais les riffs se diversifient et alternent dorénavant les écrasantes débauches sonores - aux growls équivoques - auxquelles nous sommes coutumiers ("The Divinity Of Oceans", "O Father Sea") à des passages parfois plus atmosphériques (cette paresseuse intro de "Yet Another Raft Of The Medusa", "The Divinity Of Oceans", "Gnawing Bones"), mais tout aussi impitoyablement mornes et affligeants que ces visions tentaliennes qui s'offrent aux suppliciés comme seuls horizons.

Plus que jamais, tous ces plans sont alternés au sein même des compositions; Davantage que sur l'opus précédent en tout cas où, les titres prenaient telle ou telle teinte. Quelques cassures et riffs plus 'Heavy' ("Redemption Lost", "Nickerson's Theme", "Tombstone Carousal") font également leur apparition enrichissant ainsi la cargaison de l'Essex de nouvelles saveurs. Cependant l'apport le plus important reste tout de même, à mettre au crédit de Daniel Droste lors de ses essais au chant clair, parfois encore perfectible mais authentique, qui donne ainsi une nouvelle dimension tragique à la musique des mariniers teutons.

Au final, le seul réel reproche que je ferais à ce "The Divinity Of Oceans", c'est qu'à trop vouloir jouer la carte de la monotonie océanique AHAB se retrouve justement à souffrir par moment de cette langueur qu'il essaye de nous communiquer et d'où pourra résulter de légères baisses d'attention.

Note réelle 3,5/5