Le revival Death Scandinave, matérialisé par des grands anciens remontant les pédales HM-2 depuis leur cave glaciale, m’a donné envie de dépoussiérer la discographie de l’une de leurs majeures influences, les pionniers d’ENTOMBED, souvent cités comme LA référence. Alors que GRAND CADAVER (monté autour de membres de KATATONIA, IN MOURNING et DARK TRANQUILLITY) et ASINHELL (MORGOTH, VOLBEAT) nous ont pondu des albums de très bonne qualité au cours de l’été 2023, renouant avec les bases de ce son si particulier, comment ne pas évoquer le père fondateur, d’autant plus après le triste décès de son emblématique frontman, L-G Petrov, terrassé par un sale crabe en 2021. Véritable figure emblématique du mouvement, joyeux luron devant l’éternel, L-G est parti avec ses excès, sa bonhommie, et son aura au sein de la scène Death.

Il faut dire que pour son premier cri, ENTOMBED avait fait fort avec "Left Hand Path". Disque légendaire pour ceux qui ont vécu son éclosion à l’aube des années 90, il n’en reste pas moins une pierre angulaire pour les autres, marquant la traversée de l’Atlantique par le courant Death né aux Etats-Unis peu auparavant. Moins virtuose, plus pesant dans ses ambiances, le rendu mettait à l’honneur des mediums ignorés par les MORBID ANGEL et autres DEATH. L’œuvre est râpeuse, âpre, prolétaire et dure au mal, mais comporte également une mélodicité moins tape à l’œil que chez les Ricains, mais au moins toute aussi juste.

On a souvent qualifié de Death n’ Roll la recette proposée (inventée ?) pour L-G et sa bande de vikings levés du mauvais pied, à juste titre. Si ce n’est pas encore le cas sur cet essai séminal, quelques indices y sont néanmoins disséminés. L’éponyme opener est à ce titre une merveille, réunissant sur plus de six minutes (une durée assez inhabituelle pour le groupe) tout le savoir-faire des Suédois, alternant les rythmes, se voulant tour à tour pesant ou rapide, violent ou mélodique, pour créer une identité sur laquelle les blasts et la rage de ses membres peuvent se déchainer sans retenue. C’est cette richesse qui fait tout le charme de cette première version d’ENTOMBED.

Soyons clairs, j’adore "Left Hand Path". C’est sans doute le premier LP de Death que je me suis bouffé en long, en large, et en travers. A aucun moment répétitif, d’une justesse et intégrité au-delà de tout soupçon, il a pavé la voie à tant d’autres, proposant de surcroit une base à partir de laquelle la formation saura itérer et proposer des évolutions année après année, pour le meilleur et pour le pire. Au moins ne pourra-t-on pas la critiquer d’avoir capitalisé de manière indécente sur cette réussite initiale. Mais ce n’est pas tant cet aspect mythique qui vaut à la galette ses cinq pentacles péniblement coloriés en jaune ci-dessus que le fait qu’il s’agisse tout simplement de l’un des meilleurs albums du genre.

Ce son semblable à un nid de frelons génétiquement modifiés et armés de tronçonneuses n’a que peu d’équivalents, se montrant d’une singularité folle pour l’époque. Combiné au timbre et au style du défunt frontman, la formule empruntait autant au Death qu’à l’énergie du Hardcore. RIP L-G, j’ai encore le souvenir de t’avoir vu avec ENTOMBED A.D. au Hellfest 2016, reprendre un "Revel In Flesh" incisif qui avait ravagé l’Altar. Tu n’étais plus aussi vaillant bien sûr, et ta voix avait perdu de son mordant, mais ton plaisir d’être là une fois encore parmi les tiens, communiant avec ton public, valait mille mots.