Aujourd'hui, il semble néfaste de vouloir plaire à un maximum de gens. Pourtant, quel est le mal à vouloir toucher un maximum de personnes et à être fédérateur ? En quoi cela est-il préjudiciable si la qualité est au rendez-vous ? Oui d'accord, je l'admets, il faut bien ratisser le terrain pour trouver un artiste capable de concilier gros succès commercial, intégrité et qualité. 30 SECONDS TO MARS aurait pu en faire partie. Mais après un premier album éponyme de qualité au succès plutôt confidentiel, ce traître de "A Beautiful Lie", petit frère adulé par le grand public et renié des fans de la première heure, les a directement placés sur la case « imposteurs ». Faut dire que dans le genre je-baisse-mon-froc, ce disque se posait plutôt bien. "This Is War", troisième production en titre, ne part donc pas sous les meilleurs auspices pour les anti-Leto ou les déçus, comme moi. En revanche, pour les fans actuels, le carton est assuré.

Cependant, avec "This Is War" le groupe assume son statut, et semble le crier sur tous les toits. "A Beautiful Lie" avait aussi déçu car il paraissait dire : "On veut un énorme succès mais on ne l'assume pas". Résultat : un album que l'on peut qualifier de petit. Petits refrains, petits couplets, petits tubes, petits arrangements… "This Is War" tente de balayer tout ça d'un revers de main. Jusqu'à la chanson "This Is War", j'y ai cru. Tout ce qui faisait défaut à "A Beautiful Lie" était gommé : une belle énergie déployée, des refrains plus grands, des arrangements plus grands (voire grandiloquents), une batterie ample. Les premiers titres laissent percevoir un désir insatiable de faire vibrer la jeunesse d'une seule et même voix. Vision rafraîchie d'un U2 Électro en pleine crise d'adolescence, "This Is War" part bien. Les deux tubes "Kings And Queens" et "This Is War" font éclater un beau sens de la mélodie, des refrains qui décollent avec force et vigueur, le tout parachevé par les chœurs de deux mille fans du groupe recrutés pour l'occasion. La touche naïve fonctionne à merveille et donne une véritable plus value à ces deux chansons. Si l'album faisait quatre chansons, c'était un bon disque.

Mais finalement, quel gâchis… "This Is War" enchaîne les bourdes à tel point qu'il retombe, malgré sa volonté de se détacher de son prédécesseur, dans certains travers du frère aîné : moitié de tubes, chant éreintant, enchaînements de fausses bonnes idées. Quand un couplet marche, c'est le refrain qui foire ("Search And Destroy", qui partait pourtant bien), quand c'est le refrain qui fonctionne, c'est les couplets qui patinent ("Closer To The Edge"). Pourtant, on sent que tout pourrait fonctionner, qu'il ne manque pas grand-chose. Mais ce petit quelque chose est le tour de main. L'album ne peut pas faire fi d'un gros manque de jugeote : production centrée autour de la voix de Jared (qui n'arrive décidément pas à l'utiliser à bon escient), sous-mixage de la guitare au profit des claviers et autres arrangements, ayant pour effet de faire perdre une bonne partie de l'énergie, balades inutiles et mièvres... Finalement, on ne gardera que les tubes précités, ainsi que "Night Of The Hunter", mélange Rock/Électro bien dosé, et la très électronique "Stranger In A Strange Land", particulièrement froide et intense.

On aurait voulu aimer "This Is War" tant il est pétri de bonnes intentions et s'engageait sur une bonne voie. Mais le manque évident de rigueur et la succession d'approximations laissent un goût amer dans la bouche. Au-delà de quelques titres sympathiques, de bonnes intentions ne suffisent pas à faire un bon disque. "This Is War" aurait pu devenir du foie gras de D2 tout à fait respectable mais se révèle n'être qu'une mousse de canard de championnat interclubs.