ENDSTILLE n'a pas de fan club, il a son Reich. Le quatrième pourrait-on dire, à écouter son Black belliqueux un brin mélodique, sa musique infernale à une seule et même vitesse : la puissance 10. Un Reich qui aime bien se rappeler le passé d'une nation déchirée par des tortionnaires, des chefs d'état et des commandants d'armée avides de pouvoir. Un Reich qui condamne ces activités meurtrières et mégalomanes et qui crucifie ses revendicateurs.

Et non, le fürher de "Verführer" n'est pas Adolf, mais bien Guillaume II, dernier empereur allemand et dernier roi de Prusse, de 1888 à 1918. Et le groupe ne se gêne pas pour l'arroser sauvagement sur sa pochette barbare… Ouf, et en plus de mouiller son cadavre de son propre sang sur l'album, ils dessèchent son cadavre avec des vents impétueux, larguant ses os aux quatre coins de l'Histoire pour qu'ils se désintègrent dans un je-m'en-foutisme aussi profond que les oubliettes dans lesquelles Guillaume enfermait ses victimes.

Les Allemands ne sont pas des débutants et ça s'entend ; "Verführer" est leur sixième album depuis 2000 et offre une violente et impure leçon de Black. Parmi les groupes auxquels on l'apparente, impossible de ne pas mentionner MARDUK pour son climat dérangeant, corrosif et guerroyeur. Sauf que le chanteur ne joue pas les tarés… il se contente de beugler comme une bête par-dessus les rythmes effrénés de Mayhemic Destructor et les cordes chauffantes de Cruor et L.Wachtfels, trio de la mort qui aligne ses ennemis contre un mur et les fusille sans remords. ENDSTILLE, c'est un tank, pas de la bouillie pour les chats. Le Reich détonne, ses leaders ne sont pas de bonne humeur. Tellement, qu'ils nous foutent une plage merdique avec un groove de débile en troisième position…

Or, la qualité de cette tyrannie sonore est indiscutable : les instruments sont tous égaux, même si la batterie ressort évidemment plus. Les guitares forment quant à elles un mur impénétrable qui emprisonne l'auditeur dans un bunker perdu dans un no-man's land. Vous vous sentirez loin de votre mère, vous feelerez nostalgique et triste, apeuré, comme si vous écoutiez du Black Dépressif, mais additionné d'une mitraillette aux munitions infinies. Les morceaux "Hate Me…God?" et "Suffer In Silence" seront d'ailleurs vos fidèles alliés en attendant que le boucher arrive pour vous dépecer et que vous criiez votre panique au ciel.

Rien de bien subtil dans ce calvaire pour les tympans… Surtout si vous êtes du genre à vous régaler au casque comme moi. Bordel que ça saoule. Trop même parfois, de sorte que si ENDSTILLE ne possédait pas le talent de brocher des mélodies dans ses attaques répétitives, on s'ennuierait ferme. Oui, les quelques accords se détachant du lot, un si petit détail, sauvent les Allemands de la pendaison. Et ils sont si épisodiquement cachés que je vous conseille d'être attentif, quitte à mettre le casque de côté et écouter à l'ambiant. Plus facile alors de saisir ces pointes acidulées de poignard officiel du Reich ENDSTILLE. Une organisation solide sur ses pattes qui aime bien s'exiler dans les confins de la terreur musicale, quitte à oublier la définition de la redondance…

Guillaume II a dû être un sacré personnage pour qu'ENDSTILLE lui lègue cette pépite ointe de haine. Pour qu'il remette le couvert aussi durement que sur "Navigator" et "Endstilles Reich". En tout cas, s'il ne réinvente pas le genre du Black de dingue se promenant avec son arsenal à la ceinture, il imprègne "Verführer" d'une telle ambiance morbide qu'on ose même pas imaginer ce que ça doit être de se retrouver dans les serres d'un tel vautour gouvernemental, royal.

Étouffant, décapant, sombrissime, tranchant, ce "Verführer" vaut son pesant d'or. De l'or noir. Sans personnalité. Ouch.