ASPHYX

Ce beau projet de la fin des eighties, est venu de l'esprit embrumé du couple Bagchus/Brookhuis. Le parallèle avec PESTILENCE n'est d'ailleurs pas anodin. L'asphyxie provient d'un Thrash tout aussi charnu où son frangin Death Metal prend alors le monopole. A la différence que celui-ci est dégraissé de sa moelle mélodieuse au profit de ralentissement charbonneux, quasi Doom. Moins de duels au sommet, plus de sueur sur les muscles. "Crush The Cenopath" (remis au goût du jour, trois ans plus tard) illustre l'un de ses premiers gestes concrets. Mais bien au-delà d'un parcours mouvementé, ASPHYX croisera le chemin de Martin Van Drunen et là, nous assisterons au spectacle d'un croisement génétique unique qui s'opère au tout début des nineties.

Cependant, ASPHYX ne sera pas un concurrent bien gênant. Le Death Metal joué ici est d'origine bâtarde et très orthodoxe par son discours. Il montre à sa manière, une nouvelle voie que personne ne prendra. Dommage. Alors que le monde découvre la nouvelle parure démonstrative de PESTILENCE, ASPHYX, lui, nous offre un pur concentré de Death charbonneux, en sa compagnie.

"The Rack"

C'est le fait d'arme le plus corsé d'ASPHYX et présente aussi les caractéristiques d'un Death Metal qui était pratiqué en masse par les différentes "écoles" du style. Ça sonne vif et ça décuple sans cesse une extrême violence, dont les "Diabolical Existence" et "Wasteland Of Terror" qui nous paralysent sur place. Le ton global est très agressif et s'agrippe à nous. Les quelques caresses mélancoliques éparpillées un peu partout ("Evocation") calme les ardeurs, ces effluves gorgées de Thrash Bouillonnants.

Néanmoins, son grand atout (et pas des moindres) c'est son ambiance. Une atmosphère des plus sinistres qui décolle la peau et la chaire jusqu'à l'os. Comme la corne de brume qui résonne sur "Ode To A Nameless Grave" et ouvre la voie au monolithique "Pages In Blood" nourri d'un magma Doom. De plus, une couleur originale s'en dégage rapidement, car cet objet possède une particularité ; il met en avant toute les lamentations, les cris et les pleurs d'une guitare. Ses accords écrasent notre cerveau comme un étau. Cause de cet effet, le slogan promo, inscrit fièrement en lettre capitale une appellation des plus adéquate: "Skull Fracturing Death Metal".

De toutes ces couches de glaise, jaillie une pierre précieuse. "The Rack", qui nous ouvre en grand, le cœur de bête. Un long périple s'amorce par étirements et pesanteurs, d'une grande beauté macabre. Héritage Doom assumé. Mais, tout va basculer très vite dans un charge distordue et hypnotique. Le spectre sonore se retrouve sous l'emprise du venin des Hollandais. Auquel s'ajoute un souffle spectral qui nous achève en fin de course… Sublime.

Quel plaisir alors retrouver Martin Van Drunen jouer ici de sa gorge. Un timbre si particulier, comme écorché, comme… Asphyxié. Il accumule diverses niveaux de vocalises, pour un rendu absolument terrifiant, qui prend une ampleur démesurée et bien différente à celle de PESTILENCE. Que l'on soit en début ou en fin de piste, de "Vermin" au chapitre final, l'album installe un souffle cradingue qui est parfaitement adapté au registre du seigneur Van Drunen. Celui même qui vient prendre tout naturellement à place dans l'arène et qui, objectivement, boute largement la concurrence. Mais, Dieu que ça hurle, dieu que ça brûle ! Le résultat est absolument enivrant. Ça sent la mort à tous les niveaux.

A mes yeux, "The Rack" est une pure merveille.