Une légère rupture s’installe par rapport à ses successeurs. Plus expérimental et sans les autres… Juhani Palomäki étant maître à bord du sublime YEARNING, seul son fidèle et redoutable batteur Tony K. Kristian - qui survivra sur l’album suivant : "Evershade" (2003) sous le pseudonyme Kris Tonic, oyé ! - accompagne le « Tristan inconsolable finlandais».

Bon, changements il y a, effectivement. Plus linéaire (en surface car abominablement hyper technique et ce, tout en finesse et subtilité… pour oreilles attentives !), "Frore Meadow" se veut plus expérimental que ses grand frères en repoussant les limites de l’atmosphérique. Jusqu’où pouvons nous dériver lorsque nous nous laissons aller ? Hé bien, YEARNING va tenter le coup en élargissant ses plages jouées au moyen d’un synthé. Pas de tape-à-l’œil mais plutôt une invitation à l’introspection. Mélancolique et déprimant, les deux compères savent nous prendre par la main et nous faire découvrir que le désespoir peut s’accommoder d’un renouveau, mais il faudra, pour cela, le digérer.

C’est ce que leur musique va vous apporter, si vous voulez bien vous laisser approcher, comme sur "Year Of Pain" totalement défait des autres instruments ; que des claviers. S’ensuit un enchaînement des plus complexes et, je dois dire, bizarre à la première écoute. Bizarre car là où YEARNING voit différents morceaux, j’y vois à vrai dire des breaks, cassures et ponts musicaux alambiqués. Voilà donc la rupture avec les deux premiers albums. Que des longs passages sans texte et pas souvent « easy listening ». Qu’importe, c’est foutrement bien amené. Nous regretterons peut-être cette complexité mais le fait d’en être libéré avec "Elegy Of Blood" valait tout compte fait, la peine d’en passer par là, n’est-ce pas…

De toute façon, les deux derniers morceaux nous font replonger dans le (notre ?) néant solitaire. Qu’y pouvons-nous sinon lutter pour en sortir ? Musicalement, c’est très fort comme sentiment d’appartenance à ce naufrage cérébral... et presque philosophique, si nous y regardions de plus près, m’est avis. L’émerveillement proviendra sans doute du fait que nous savons que la Musique est la plus puissante force volontaire à capter l’essentiel des sentiments humains. YEARNING le sait, le bonifie et nous le rend puissance dix !

La batterie et les arrangements sont foudroyants de bonheur auditif ! Personne ne fait du Doom Metal Atmosphérique de la sorte. YEARNING est inimitable et c’est tant mieux ! Pourquoi ? Parce que les pales copies d’un art magnifié n’ont rien à faire ici.

Triste et apaisant. Lancinant et créatif. Puissant et intimiste. Nous ne retrouverons que très peu de passages avec la voix d’outre-tombe. Juste quand il faut, c’est époustouflant de justesse pour un amateur comme votre serviteur.

Petit bémol, cependant. C’est ce "Disappearance" qui n’est fait que de bruitages sourds et qui dure pratiquement 9 minutes… inutiles.

Restons donc bien sur les ambiances originales et captivantes que ce "Frore Meadow" va vous donner en partage. Et, si vous ne le savez pas encore, sachez que YEARNING a su dépasser son art sur ses successeurs que sont "Evershade" (2003) et "Merging Into Landscapes" (2007) notamment. Incroyable, vous dis-je !