CYNIC revient ! C'est fait. Enfin c'est presque fait et ça fait quinze ans qu'on attend ça. Histoire d'un retour :

1993, "Focus", disque magique, compromis exceptionnel entre death metal et climat éthéré et jazzifiant, unis l'un et l'autre par la grâce d'une maîtrise technique parfaite. Une tournée et des envies de continuer.
1994, en plein processus créatif en vue de l'édification d'un deuxième album, les musiciens se brouillent et l'aventure prend fin de façon abrupte tandis qu'une excroissance de CYNIC nommée PORTAL vivra quelques mois avant elle aussi de disparaître.
La suite, c'est une dispersion des éléments pendant plus de dix ans avant que la nostalgie des vertes années surgisse et pousse le groupe à monter une courte tournée de reformation. Engouement des fans, enthousiasme sur scène et c'est l'engrenage vertueux, Paul Masvidal et Sean Reinert projettent d'enregistrer ce successeur à "Focus" que les fans espèrent depuis si longtemps.

Evitons de donner trop d'informations concernant le line-up et le producteur de ce futur disque, une communication contradictoire circule sur Internet. Seule certitude, seule concrétisation parfaitement officielle, ce deux titres promo de 7 minutes qui permet de toucher du doigt la nouvelle orientation musicale du gang de Floride. Deux titres, "Integral Birth" et "Adam's Murmur".

"Integral Birth" paraît bien calme dans ses premières secondes. Paul Masvidal laisse tomber ses dernières vocalises death pour chanter de façon claire. Et l'étrange vocoder qui avait tant fait hurler sur "Focus" a mué. Toujours présent mais aux réglages plus naturels. On reconnaît heureusement son timbre de voix, même si une sincère adaptation est nécessaire afin de retrouver le CYNIC qu'on a quitté depuis si longtemps. Ouf, sur le refrain entre en scène Tony Teegarden qui reprend à son compte les grommellements que le frontman semble refuser de répéter. On est rassuré, CYNIC n'a pas définitivement quitté sa cape death metal. Mais il s'en faut de peu. Les riffs thrashisants se veulent aujourd'hui moins appuyés et le hurleur de service voit son organe réellement sous-mixé, parfois absent. Le morceau se veut léger et plane haut malgré cette attache death bien ancrée au plancher des vaches.

Tiens, le vocoder retrouve maintenant ses couleurs robotiques d'antan. Mis à part cela, "Adam's Murmur" arrive comme une confirmation de la perte de poids d'un animal déjà fort leste. Le solo de guitare, bel et bien metallique sur "Integral Birth", se situe là à hauteur de nuages. Une double grosse caisse timide ne rassure pas totalement quant à l'abandon qui pointe le bout de son nez.

L'abandon des anciennes amours, anciennes amours sans lesquelles CYNIC ne serait qu'un très compétent mais assez banal orchestre de jazz autant easy listening que progressif. On a peur, vraiment peur. Et on regrette la timidité d'une basse qui semble avoir été quelque peu oubliée du mix.
On a peur et on cherche des raisons de se rassurer. Alors, on tombe sur un autre morceau, extirpé d'un concert il y a plus d'un an. "Evolutionnary Sleeper", qui ne figure pas sur ce promo, un morceau à la direction plus clairement metal dans son introduction mais qui termine lui aussi dans les airs.

Ne tirons pas de conclusions hâtives, le savant équilibre entre muscle caverneux et intellectualisation vaporeuse reviendra peut-être encore plus pur qu'avant. Et peut-être s'habituera-t-on aussi à cette nouvelle orientation taille fine. Un fragment de réponse le 27 juillet au Nouveau Casino pour une date parisienne de l'artiste.