"Focus".

Il est facile de se laisser aveugler par son statut de référence et de pionnier dans les sous-genres du Death Metal que l'on nomme Technique, Progressive voire Jazz – aucun commentaire ne sera fait sur ces appellations. Il est facile de se laisser aveugler non pas sur la valeur (très élevée si vous voulez mon avis) du disque mais sur sa réception. CYNIC accouche en 1993 d'une œuvre complexe, difficile à assimiler, clivante de part son vocoder et ses éléments Jazz Fusion. Si tourner avec CANNIBAL "répéter 16 fois une mesure" CORPSE n'était pas la meilleure des idées pour promouvoir le disque à la pochette jaune, il y a d'authentiques fans de Death Technique ou de genres associés chez qui cet album ne provoque qu'incompréhension, ennui, si ce n'est pas dégoût et maux de têtes.

C'est en priorité à eux que je m'adresse. Mes amis malgré nos différends je reviens vers vous pour vous apporter la bonne parole. Si par un hasard curieux vous ne connaîtriez pas l'objet présentement chroniqué, foncez-dessus les potos, c'est d'la bonne.

Démo réalisée pour les faquins de Roadrunner Records en 1991, cet enregistrement présente un CYNIC au style déjà affirmé, se séparant d'un OSDM classique pour insuffler à sa musique des éléments qui seront plus tard dénommés "techniques" ou "progressifs". La musique reste cependant moins "alien" que sur "Focus" : à mi-chemin entre ATHEIST (on me signale la présence d'un certain Tony Choy.... Vous savez : "Testimony Of The Ancients", "Unquestionable Presence"...) et le CYNIC que le grand public découvrira en 1993. Un chouïa plus Death Technique que Death Prog' quoi. Deux des trois pistes présentes sur ce disque sont d'ailleurs des versions démo de ce qui apparaîtra après importantes modifications sur "Focus", des sections de la troisième y apparaissant aussi.

Si le mot démo déclenche en vous des épisodes post-traumatiques après soumission au Black Metal le plus raw, ressaisissez-vous. Le son pourtant typé garage vieille école reste supportable et assez étonnement clair et déchiffrable, surtout pour une démo (!) de Death Metal (!!) de 1991 (!!!).
Il n'entrave que très peu les compositions et la maîtrise instrumentale d'un CYNIC déjà époustouflants. Évidemment, si je m'emmerde à parler d'une démo d'un groupe ayant pondu un album référence juste après, c'est que ça tue. Ben tiens.

CYNIC est sur cette démo plus agressif, plus sauvage, plus sombre, et dépourvu de cette aura mystique que l'on peut retrouver sur "Focus". Ce n'est pas vraiment une qualité, ni vraiment un défaut : simplement une façon différente d'envisager leur musique. Allergiques au vocoder, fans hardcore de Tony Choy ou de CYNIC, cette démo est l'occasion de découvrir un groupe important pour ne pas dire fondamental du Death Metal dans sa facette, justement, la plus Death Metal.

Elle vous est par conséquent vivement recommandée, et même qu'il paraît qu'un coffret regroupant les démos du groupe vient de sortir. On n'arrête pas le progrès.