Vous avez tellement raison les KICKBACK. L’espèce humaine ravale tellement la merde qu’elle se dégueule chaque jour. Son haleine est d’une telle nature gazée qu’elle embaume les cieux d’une odeur de viscères infectes et impossible à contrôler. En réécoutant cet ultime album au nom si évocateur, je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec le concert de Stephen Pessac au Concrete Jungle Fest en Thaïlande l’été dernier où il brandit à plusieurs reprises une écharpe floquée du mot HELL. Putain la merde cette France, il est bien temps que vous reveniez foutre une dernière cartouche dans la tempe de cette société et que vous refassiez vivre l’Enfer.

On vit trop comme des moutons et on se fait baiser par les bergers vous savez bien ! La France n’est plus qu’une vaste blague, vous l’aviez dit. Bref ! Si je parle de vous mes enfoirés, c’est que le "Et Le Diable Rit Avec Nous" fait tant de bien à la haine, fait tant de mal à la vie, qu’on devrait se le mettre dans le cul chaque matin sous forme de suppositoire. On arrêterait alors de se faire piétiner, de tergiverser. On ne se laisserait jamais plus faire, on ne serait plus cette putain de merde d’eau tiède et de paillasson. On aurait la loi à nos pieds, on serait seigneur chacun dans notre coin de notre propre seigneurie, et on niquerait tout le reste. L’histoire du grand soir ? Qu’ils aillent se faire foutre, moi je rêve plutôt de la grande Nuit et de la propagation des ténèbres, comme vous hein ?

On dit de Rimbaud qu’il parlera à la jeunesse éternelle tant son aura et sa liberté libre habiteront toujours et encore tous les adolescents du nouveau Monde, moi je dis que KICKBACK plaira à tous les kids éternels qui ont soif d’un exutoire extrême pour peut-être ne plus trembler, mais aussi pour ne pas basculer. Tant qu’il y aura KICKBACK et que KICKBACK vivra dans les cœurs, la Mort rôdera sans faire de victimes. Car KICKBACK c’est avant tout l’expression authentique et suprêmement franche des torsions internes, et le groupe s’est toujours construit sur ce postulat. Stephen Bessac (ndlr : fondateur du groupe rappelons-le) s’est nourri très tôt des interdits et a développé une curiosité prononcée pour l’expression extrême sous toutes ses formes (il raconte que très jeune il s’était confectionné une fausse carte de cinéma pour aller voir les films interdits – notamment d’horreur - au moins de seize ans). Pas étonnant alors que Sade, Pasolini, Gaspard Noé (un clip devait se faire d’ailleurs jusqu’à ce que le réalisateur soit pris par son projet "Irréversible"), Nietzsche, William Blake aient influencé et infusé au sein des compositions de KICKBACK.

Et l’on doit à KICKBACK la pâte base même de toute la scène Hardcore française qui suivra. Nourri par le NY-Hardcore (INTEGRITY en tête, mais aussi AGNOSTIC FRONT, MADBALL, SICK IT ALL, CRO-MAGS avec lesquels, je parle pour une bonne partie de ces groupes, KICKBACK fera des tournées ou tout simplement aura des liens privilégiés), le Straight-Edge (MINOR THREAT, YOUTH OF TODAY, et le Death Metal (MORBID ANGEL, CARCASS, NAPALM DEATH), KICKBACK confectionnera une discographie archi-violente et toujours mue par l’extériorisation massive de toutes les émotions enragées et contenues ; pourvu qu’il y ait la rage. "Et Le Diable Rit Avec Nous" est le dernier brûlot du groupe, le plus complexe aussi. Plus Metal que les précédents, il condense tout le sel pourtant du Hardcore qui a fait sa légende (vocaux déchaînés, riffs tueurs, martèlements chaotiques). Torturées au possible, les vingt-cinq petites minutes de l’album si l’on exclue les deux reprises sont aussi les plus exploratoires de KICKBACK.

Avec un petit détour mélodique au sein de "Triumph And Degust", mais aussi à l’intérieur du titre phare de cet album "Le Chant Du Diable" (c’te claque putain !), KICKBACK investit et explore d’autres pistes (le très habité titre instrumental "Weltanschauung" et son mid-tempo fiévreux rempli jusqu’à la lie d’une ambiance mélancolique et tourmentée), tout en nous distillant des titres dont il a le secret (je pense aux deux très réussis "Stained I" et "Stained II"). Les deux reprises m’ont un peu laissé sur ma faim mais nous livre d’autres influences du groupe qui on le sait ont un spectre large (ici la Noise Rock de BRAINBOMBS, ou le Rap des GETO BOYS, mais nous pourrions aussi parler de la Power Electronics, du Death Indus, du Dark Ambient…). Au final "Et Le Diable Rit Avec Nous" est un excellent album, bien trop court certes mais aussi sacrément travaillé et avec une production propre, de quoi nous foutre la frousse une dernière fois.