-[...]On écoute tout de suite l'album sorti en 2003 chez RIVERSIDE...
- Je précise, avec Krzysztof Melnicki au trombone sur la neuvième piste !
- On écoute... On en parle après...
- On en parle après mais jamais musique aussi sensible influencée par PINK FLOYD n'a été aussi aboutie depuis le PORCUPINE TREE (PT) atmosphérique des 90s !
- On en parle après, on...
- C'est vrai mais le chant à la fois sensuel et écorché de Mariusz Duda confère une ambiance à la fois planante et puissante dont les thématiques évoquent PAIN OF SALVATION (POS).
- Oui on en...
- On peut aussi dresser un parallèle avec le chant à fleur de peau de Daniel Gildenlöw et...
- Oui on...
- Et pour revenir sur ce côté sombre qui se dégage de la musique, notez qu'il est très bien imagé par la pochette signée Travis Smith qui joue habilement avec les notions de réflexion et d'obscurité...
- Une véritable pointure d'ailleurs dans l'univers élargi du Prog' puisqu'il a notamment travaillé pour OPETH, Devin TOWNSEND, DEADSOUL TRIBE, NEVERMORE, KATATONIA, ANATHEMA...
- ANATHEMA dont on retrouve un peu le côté atmosphérique...
- Oui c'est vrai, allez on écou...
- Non mais juste pour dire pour les lecteurs qui nous écoutent que le Prog' ce n'est pas réservé à une élite ! Le Prog' c'est aussi une musique populaire, c'est pour tout le monde quoi !
- Alors on écoute !!!

Et puisque le disque vient de se terminer, laissez-moi vous présenter RIVERSIDE. C'est un groupe polonais qui joue un Rock/Metal Prog Alternatif (dans la veine de POS et PT) infusé au Grunge (un poil) et surtout au Rock Psyché et Atmosphérique. Formé en 2001 par des musiciens chevronnés (1), RIVERSIDE avança vite. Quelques concerts avec leurs propres compos en 2002 puis une démo en mars 2003 dont les retours positifs permettront d'enregistrer ce premier opus qui sortira chez Mystic Production en décembre. Le succès dépassa les attentes et en septembre 2004, le label américain The Laser's Edge promouvra l'album à l'international avec une nouvelle pochette (présentée ici).

"Out Of Myself" est un concept album sombre et introspectif qui entame le cycle "Reality Dream" que constitueront les trois premiers LPs du groupe, auxquels s'adjoindront quelques EPs/singles et un Live. Il est l’œuvre de Mariusz Duda et explore les combats internes d'un protagoniste, "he", incapable de s'épanouir dans son couple, malgré l'amour dévoué que lui porte "she", car soumis à ses propres tourments/démons qui le déconnectent de la réalité (d'où "Reality Dream") et dont il ne parviendra à s'affranchir (au moins partiellement) qu'à travers sa décision de la quitter et qu'importe s'il faudra accepter noirceur et tristesse pour cela. Une manière détournée d'évoquer la dépression par un exemple "banal" de la vie de tous les jours.

La musique est à l'avenant et propose des atmosphères mélancoliques, planantes, parfois portées par des claviers psyché (e.g. "The Same River", "The Curtain Falls"), qui enveloppent la guitare acoustique (e.g. "I Believe", "In Two Minds") ou se construisent autour de patterns rythmiques (notamment les lignes de basse) rappelant par exemple le PINK FLOYD de "The Wall" ("The Curtain Falls") ou le PORCUPINE TREE de "The Sky Moves Sideways" ("The Same River"). La guitare électrique accompagne ces ambiances de thèmes et soli d'inspiration Gilmour-ienne (e.g. l'intro de "The Same River", "Loose Heart", "Reality Dream II"), toute en délicatesse. La voix posée de Mariusz s'y accorde avec discrétion et retenue dans un registre entre Chris Cornell (chant clair) et Steven Wilson et/ou Vincent Cavanagh mais sait nous saisir par des lignes de chant captivantes (e.g. "I know... I can... Wanna stay..." sur "The Same River") voire hypnotiques (e.g. "Raise me up, Don't let me faaall" sur "Loose Heart").

Le concept est très cohérent mais ne phagocyte pas la musique. Il se dégage une juste alchimie entre les deux qui fait montre d'une certaine maturité (l'expérience des musiciens n'y est sans doute pas étrangère). Des thèmes sont exploités sous diverses formes. "I Believe" décline un air de "The Same River". Les deux parties de "Reality Dream", qui jouent avec la notion de déconnexion par l'inclusion de bruitages d'horloge et de téléphone, se complètent. "Loose Heart" renvoie, par sa construction, à l'éponyme et, par un riff saccadé, aux instrus qui l'entourent. La guitare acoustique sert de fil rouge à l'ensemble. L'album offre ainsi une expérience immersive, presque envoûtante, pour peu qu'on y adhère.

Mais RIVERSIDE sait jouer avec les contrastes pour ne pas nous noyer dans une overdose de mélancolie. Ainsi l'éponyme colore ses riffs d'un son Alternatif lorgnant vers le Grunge et Mariusz écorche son chant jusqu'à la limite du growl sur son final venimeux (itou "Loose Heart"). Les deux pièces instrumentales, dans leur composition plus Metal Prog traditionnel, apportent de la dynamique et viennent, presque ironiquement au vu du concept, booster le disque. L'album est bien construit, alternant l'Atmo et/ou les ballades avec les morceaux plus pêchus et si la fin (les trois derniers titres) très soft pourra décontenancer, je trouve le très éthéré "OK" et son trombone crépusculaire façon club de Jazz embrumé parfaitement à sa place.

Malgré des influences évidentes, RIVERSIDE parvient à tisser son propre soundscape qu'il personnifiera davantage à l'avenir et propose un premier album cohérent et mature qui s'affranchit des codes de la scène Metal Prog' à laquelle ils s'apprêtent à être rattachés. Plus Rock que Metal, plus Atmo/Psyché que fondamentalement Prog, plus relecture que novateur, "Out Of Myself", à l'instar de POS, se veut vecteur d'émotions que le chant de Mariusz porte avec beaucoup de classe et de retenue.

- Allez, on écoute !

Note réelle : 3,5/5 monté à 4 pour la maturité de ce premier opus

Meilleur titre Rock Atmo : "The Same River".
Meilleur titre Metal Prog : "Out Of Myself".
Meilleure combinaison des deux : "Loose Heart".

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(1) Piotr Kozieradzki : batteur des groupes de Death HATE et DOMAIN ;
Piotr Grudziński : guitariste du groupe de Heavy UNNAMED ;
Jacek Melnicki : possède son propre studio d'enregistrement  (2) ;
Mariusz Duda : bassiste-chanteur qui jouait du clavier pour le groupe de Heavy Prog XANADU.

(2) S'il participera à l'enregistrement, il quittera le groupe avant même la sortie de l'album, finalement enregistré dans un autre studio et mixé par Magda et Robert Srzednicki, réalisant qu'il ne pouvait mener de front ses deux activités.