Prédire la suite de "Folkesange" était chose délicate. D'un côté, Amalie Bruun a aujourd'hui trouvé une place de choix dans la scène, headliner entre deux brutalités Black Metal, soit pour délivrer son Post Metal folkisant, soit pour donner de la voix sur ses sets acoustiques. Sa partie la plus "saturée" n'ayant jamais réellement tenu ses promesses, il n'en aurait pas fallu beaucoup pour que MYRKUR devienne un projet à la ULVER, profitant autant de la beauté que de la versatilité du chant d'Amalie pour savoir se parer d'habits de saisons différents à chaque opus, l'ancrage au sein de la communauté Metal aurait alors surtout servi comme un pied d'appui pour trouver des oreilles attentives et curieuses.

Il n'en est pas grand chose. "Spine" voudrait d'un côté se baser sur les acquis de "Folkesange", mais également revenir à une formule initiale qui, malgré de vraies fulgurances, gardait la peau sur les os. Black Metal dilué en 9CH, entre surcouches atmosphériques et atténuation volontaire d'une "violence" qui semble pourtant avoir été réintégrée de force. Exemple : le single "Like Humans", qui est le pendant actuel du "Ulvinde" de "Mareridt", le Danois en moins, la touche pop nettement plus assumée, qui finira sur un blast beat bref et désarticulé qui voudrait intensifier le dernier refrain mais le rend juste plus brouillon. Un gimmick d'autant plus visible qu'il sera systématiquement mal exécuté.

La production n'aide pas, comme si MYRKUR n'arrivait pas à assumer la nature contradictoire de sa musique, et avait choisi de minimiser autant que possible l'impact des guitares et de la batterie (la grosse caisse et la basse sont un bourdonnement lointain, ce n'est pas déconnant de n'en parler que dans une parenthèse, certes désormais un peu longue. D'ailleurs ça va vous sinon ?). Le motto : donner une signature extrême et parallèlement, ne pas trop fâcher le voisin du dessus.

Ainsi on ne comprend pas pourquoi ce "Mothlike" tenant davantage de la Synth Pop part dans une direction Metal là aussi à demi assumée alors qu'il se tenait parfaitement sans cet apport. Tout comme "Devil In The Detail", qui cligne de l'œil du côté d'ENYA, et ce vernis Dream Pop nettement plus marqué que sur les habituelles pièces acoustiques de MYRKUR. On dit jamais totalement non à ce genre d'exercices, parce que la voix d'Amalie Bruun tout ça tout ça… Toujours est-il, quand je parlais de faire un album dans une direction nouvelle, celle-ci serait le meilleur pari. Mais encore une fois, blast beat incongru et cradingue qui voudrait "recentrer" sur le sujet mais se retrouve à côté de la plaque.

Quelque part, sur les transitions plus délicatement amenées (on pense au très beau "Spine") ou sur les morceaux s'appuyant plus directement sur une structure metal (les choeurs entraînés par le Folk Metal d'un "Valkyriernes Sang", qui frisent la redite, ou encore "Blazing Sky"), le résultat est moins dérangeant, mais ni vraiment nouveau, ni aussi impactant que chez les voisines : VOUNA, SYLVAINE ou VERMILIA… les exemples commencent à être nombreux.

Il me reste à mentionner les titres qui sonnent comme des face B de "Folkesange", à savoir l'intro "Bålfærd" et l'outro "Menneskebarn", et de n'en dire pas plus.

"Spine", confus ? Convenu ? Ce sont des mots forts, disons plutôt "désorienté". A l'inverse de son titre, il lui manque cette colonne vertébrale forte. Sans doute sous couvert d'expérimentations, MYRKUR patauge très visiblement, quitte à nous servir une collection plus ou moins heureuse de ses fonds de tiroirs. Trente courtes minutes d'un tour de pâté de maison du répertoire d'Amalie Bruun qui ne s'engage dans aucune vraie direction, avec un champ des possibles qui s'ouvre du côté d'un Folk Pop éthéré qui apporterait plus que l'approche très traditionnelle de "Folkesange" (les titres "Mothlike" et "Devil In The Detail").

Reste toujours, j'insiste, cette voix merveilleuse, qui ne me fera pas hésiter deux minutes à aller revoir la Danoise sur scène, et quelques très belles mélodies.

Donc oui, ça s'écoute.