MOTIONLESS IN WHITE est un groupe qui s’incruste en permanence subrepticement dans les playlists auto-générées à partir de mes écoutes, sans que je n’aie rien demandé. Il vient instamment flatter le côté obscur de la force avec ses mélodies Pop, jusqu’à ce que je finisse par régulièrement consacrer un peu de temps à écouter un album entier pour, en général, rester sur ma faim. Mais si "Disguise" n’échappe pas totalement à la règle, il n’est toutefois pas dénué d’intérêt, loin de là, et saura séduire un certain auditoire, mais nous y reviendrons.

Formé aux US en Pennsylvanie il y a bientôt vingt ans autour de Chris "Motionless" Cerulli, qui reste le seul membre fondateur à ce jour, le combo de Scranton propose une musique à la croisée du Metalcore et du Neo Metal, avec quelques touches Gothique et Indus subtilement saupoudrées de-ci de-là. Si ces genres ne suscitent que mépris et dégoût chez vous, je vous recommande de passer à une autre chronique séance tenante, car MOTIONLESS IN WHITE évolue de surcroit plutôt en Ligue 1 Uber Eats qu’en Ligue des Champions, force est de le constater LP après LP.

Leur marque de fabrique est globalement d’avoir peu de personnalité. Présenté comme ça, ça ne fait pas rêver, c’est vrai. En revanche, le groupe dispose d’un arsenal tout à fait respectable : un frontman versatile, aussi à l’aise avec le chant clean que les différents vocaux extrêmes (screamés, growls) et qui dégage de plus une véritable présence (même s’il singe un peu le révérend MANSON, avouons-le). La formation sait également écrire des titres percutants, suffisamment variés pour conserver l’attention de l’auditeur sur la durée, avec une science raisonnable du chorus qui fait mouche, à la limite du camembert trop fait mais pas au-delà. Enfin, leurs productions sont absolument irréprochables, puissantes et modernes, et l’utilisation des couches électroniques et synthétiques est pertinente, juste ce qu’il faut, tout au moins sur cet opus.

En revanche ce manque de singularité peut agacer, tant il est difficile de ne pas penser à certaines références sur chaque piste de "Disguise". Tu veux du SHINEDOWN velu ? Va écouter "Legacy". Fan de SLIPKNOT ? Fonce sur "Thoughts & Prayers" et sur "Undead Ahead 2: The Tale Of The Midnight Ride" ! LINKIN PARK ? Jette une oreille à "/c0de" (franchement, celle-là m’a vraiment ramené vingt ans en arrière). Pour ceux qui préfèrent KORN, je ne peux que vous conseille "Headache", etc. etc.
C’est à la fois flagrant et un peu triste, tant on frôle l’odieux plagiat par certains moments.

Maintenant, tous les titres cités plus hauts sont objectivement efficaces, bénéficiant notamment d’une exécution impeccable. La capacité de Chris à occuper des créneaux aussi variés que ceux de Corey Taylor, Chester Bennington ou Jon Davis est assez hallucinante, et le pire est que ça fonctionne réellement, pour peu qu’on se laisse embarquer sans trop réfléchir. D’autant que l’album ne possède que peu de temps faibles si l’on n’est pas trop rétif aux refrains mielleux, malgré un dernier tiers un chouïa moins énergique. Il a surtout tendance à tabasser régulièrement, au-delà de ce à quoi on peut être habitué dans le style, que ce soit instrumentalement ou au niveau du chant.

Question textes, MOTIONLESS IN WHITE ne révolutionne rien non plus. En dehors de quelques charges virulentes contre toute forme de religion (qui font un peu partie du cahier des charges) sur "Toughts & Prayers" : «handcuffed by Sunday fallacy, crucify the saint in your soul. An addict for plaudit you get your crucifix», le reste relève d’un classicisme assez peu enthousiasmant, entre trip auto-destructeur ("Holding On Smoke") et solitude nombriliste prépubère. L’univers visuel de série B horrifique faisant partie de l’identité du groupe sur scène suinte parfois à travers les paroles, mais c’est principalement pour nous ramener peu subtilement à d’autres références, celles de MARILYN MANSON ou de WHITE ZOMBIE ("Broadcasting From Beyond The Grave: Death Inc." ou "Brand New Numb"), soutenu par une instrumentalisation à l’avenant. Bref, les paroles ne sont clairement pas le point fort de ce cinquième LP, tout comme la balade "Another Life", absolument passe-partout.

Au final, quand on liste l’intégralité des défauts relevés par votre humble serviteur dans cette bafouille, il peut paraître étonnant de voir trois petites étoiles coloriées en haut à droite. N’étant plus à une incohérence près, j’avoue en effet passer un bon moment à l’écoute de ces quarante minutes et quelques. MOTIONLESS IN WHITE réunit des univers suffisamment variés mais toujours cohérents, qui me plaisent tous individuellement, et les délivre avec soin. Je ne pousserai pas le bouchon jusqu’à crier au génie bien entendu, mais pour les fans de ces genres, vous passerez sans doute du bon temps à vous coller "Disguise" entre les esgourdes, une bonne IPA à la main. C’est d’ailleurs ce que je vais (re)faire de ce pas.

Note réelle : 2,5/5 très très généreusement arrondi à 3. L’objectivité m’incitait pourtant à 2.