Sorti en mai 2020, "Premonitions" du combo international SOJOURNER est assurément un dommage collatéral de la pandémie SRAS-Cov 2 : j'ai totalement raté l'album. Je tombe un an plus tard jour pour jour (une publication sur les réseaux sociaux fêtant l'anniversaire !) et me précipite donc pour combler ce manque dans une discographie aussi intéressante qu'attachante.

En effet, vous le savez si vous suivez leurs aventures, nos membres du groupe sont disséminés sur toute la planète et sont d'origines variées : univers Doom underground pour certains, Black pour d'autres, Mélo Atmosphérique également. Depuis leur dernier effort, le groupe a été signé par Napalm Records, quittant le label underground Avantgarde Music. Plus qu'un détail car les moyens dont désormais différents et il est ainsi possible de savourer le tout premier clip du groupe ! (*)
SOJOURNER allait-il pour autant vendre son âme au diable en répondant au chant des sirènes ?

Il est possible de savourer de prime abord le maintien du line-up avec en outre depuis 2019 l'arrivée d'un bassiste live (Scotty Lodge), ainsi que le maintien de Sebastian Luca pour le traditionnel artwork. Toutefois moins marquant (et terriblement moins Heroic Fantasy), son travail n'en demeure pas moins parfaitement adapté au contenu de l’œuvre : une forêt, la nuit, des constellations, un couple face à une apparition (?)… Onirisme à l'horizon...

"Premonitions" transpire, que dis-je, dégouline littéralement de mélancolie et d'obscurité tout en conservant la douceur qui fait la beauté de ce groupe. Fortement influencé par SUMMONING dans la conception de ses ambiances et de ses compositions, SOJOURNER s'attache à véritablement construire son identité musicale. En effet, fort d'une réalisation soignée et chaleureuse, cet album offre un contraste peu commun : son chant Black porté par un Emilio en pleine forme et terriblement habité cohabite toujours à merveille avec la douceur de la voix de Chloé comme de son tin whistle ("Atonement") mais également des nappes de claviers (dès l'ouverture de l'album avec "The Monolith"). "Eulogy For The Lost" est une combinaison de tout cela et propose par exemple presque huit minutes d'un voyage presque féerique (flûte) et tempétueux (riff et chant Black) porté par un très long passage presque instrumental en boucle...

La jeune femme délivre d'ailleurs une très belle participation, non sans rappeler ses collègues de NIGHTWISH (Tarja en tête) par exemple croisant parfois Amy Lee de EVANESCENCE. Chloé est beaucoup plus présente désormais et se marie parfaitement lors de ses "interventions" avec les ambiances distillées par son collègue ! Elle s'illustre notamment sur "Talas", le titre qui m'a le moins plu sur cet album : une ballade au clavier, ennuyeuse jusqu'à son final qui évidemment voit revenir l'Extrême (mais trop tard !).
Emilio, de son côté donc, conserve et renforce son formidable chant tantôt growlé, tantôt hurlé, proposant ainsi des variations entre Death ("The Event Horizon" notamment) et Black Metal du plus bel effet ("The Apocalyptic Theater", "Fatal Frame"). J'ai l'impression d'entendre même un Abbath (tiré de son "I") sur "The Monolith".

Les thèmes abordés s'orientent vers la désolation, la dépression...
"I claw my way through the pits of desolation
Only to fail
I fall
I crawl
I sob
I break" ("The Event Horizon")

Emilio en profite pour nous offrir un hommage à un jeu vidéo qui le passionne ! En effet, "Fatal Frame", titre en hommage à "Fatal Frame 2: Crimson Butterfly" plus connu dans nos contrés sous le titre "Project Zero 2: Crimson Butterfly" (sorti sur PS2, Xbox et Wii à l'époque), possède quelques lignes de claviers qui rappellent le thème de Resident Evil dans les safe rooms ! L'un des titres les plus sombres et féroces de leur discographie jusqu'à maintenant. Épique, malgré la présence de cet entêtant tin whistle !

En mélangeant savamment Folk, Black Atmosphérique et émotions, SOJOURNER offre à ses auditeurs un voyage captivant tout au long de ses huit titres d'une durée moyenne approchant les sept minutes.
Planante, habitée et donc épique comme aime à la définir les membres du groupe, la musique de SOJOURNER délivre puissance musicale et mélancolie. La richesse de son univers est une nouvelle fois reconnue : sans renouveler le genre ou proposer une originalité folle, son troisième LP est une très belle réussite qui n'appelle qu'une seule chose : la volonté de les voir sur scène pour mesurer tout l'impact de ces morceaux.

Note réelle : 3,5/5.

Top : "Eulogy For The Lost", "The Deluge".

(*) "The Deluge", puisqu'il s'agit de l'élu, est totalement dans l'esprit du groupe. Ce clip est doté de superbes images présentant les membres de SOJOURNER dans des paysages grandioses et immenses. Un très beau travail qu'il faut saluer.