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LIFE OF AGONY - Ugly (1995)
Par T-RAY le 16 Septembre 2018          Consultée 1749 fois

"Ugly" est un O.M.N.I. Un objet musical non identifié. Plus que n’importe quel autre album studio de LIFE OF AGONY. Et ses auteurs-compositeurs – les quatre membres du groupe ont contribué à sa création – sont des extraterrestres. Enfin, peut-être pas tout-à-fait, mais ce qui est plus sûr, c’est qu’ils ne sont pas vraiment faits pour ce monde. Et ce qui est encore plus certain, c’est qu’ils aimeraient être ailleurs. Très loin. Et autrement. Comme cela transpire sur "Ugly" ! Autant les textes de l’album concept qu’est "River Runs Red" traitaient déjà de l’abandon, de l’inadaptation et du suicide, autant la musique qui leur servait d'écrin - pourtant formidable - était encore tellement marquée Hardcore qu’elle ne permettait pas de saisir le désespoir qu'elle cachait sans devoir se mettre les paroles sous les yeux.

C'était l’une des grandes forces du premier opus, cette façon de dire des choses dures et fortes derrière des murs de guitare qui n'en laissaient rien paraître, ou si peu. Mais c’est comme si le quartette était convaincu qu’il s'agissait d’une faiblesse. Aussi, à peine deux ans plus tard, "Ugly" est-il venu offrir à LIFE OF AGONY l’occasion de briser les carcans stylistiques qui retenaient ses élans artistiques. Et humains. Le contenu textuel de l’album affiche toujours la même fragilité, mais cette fragilité n’a désormais plus besoin de se cacher derrière des épaules de bonhomme, avec muscles saillants et tutti quanti. À présent, le combo de Brooklyn emprunte à quasiment tous les genres musicaux ayant influencé ses membres pour la mettre en avant, l’exposer pour mieux l’apaiser.

Bien sûr, on reconnaît le groupe auteur de "River Runs Red" car certains morceaux de "Ugly" reprennent quelques recettes de ce premier album. En particulier "I Regret", sur lequel le riffing coup de poing de Joey Z., bien plus Core que Metal, refait surface par moments, et les vocaux de Keith Caputo, n’auraient pas dépareillé sur "River Runs Red". Où le morceau-titre, "Ugly", l'un des seuls où le chanteur est doublé, sur le refrain, par Alan Robert, non plus en mode gang vocals et poing en l’air comme sur l’opus précédent – trop Hardcore comme type de chœurs – mais sur le même ton, calme et posé. Un "Ugly" et un "I Regret" où l’on retrouve avec joie l'étonnante capacité du groupe à accélérer et ralentir le tempo comme un seul homme, tel un moteur de pick-up qu’on vient de baisser d’une vitesse. Merci, Sal Abruscato, de jouer les métronomes pour tout ce petit monde.

Les styles se confrontent et se multiplient sur "Ugly". LIFE OF AGONY les prend tous à son compte et les fait siens, faisant oublier que tel est tendance et que tel est passé de mode. Encore à la lisière de l'ère Grunge en 1995, le groupe bat les groupes d’alors sur leur propre terrain (sauf peut-être les leaders de la scène, je ne vous fais pas l’offense de les citer) avec un "Other Side Of The River" où l’angoisse existentielle d’Alan Robert transparaît superbement dans la voix quasi croonée de Keith Caputo, sous cette histoire de double-suicide amoureux. Il séduit aussi avec le très Punk Rock "How It Would Be" dont le GREEN DAY des débuts n’aurait pas renié le tempo ni le riff, ses accords n'étant pas si éloignés de ceux de "When I Come Around". Même si la classe vocale de Caputo donne une profondeur supérieure à ce riff, bien au-delà de ce qu’un Billie Joe Armstrong aurait pu exprimer par-dessus.

"Other Side Of The River" nous prouve aussi,sur sa deuxième partie, au cours de laquelle les guitares se musclent, que LIFE OF AGONY est pleinement capable d'embrasser le Heavy Metal à l’Américaine (METALLICA, es-tu là ?). C'est encore vrai sur "Damned If I Do" ! Ou pas à l'Américaine du tout d’ailleurs, quand les grands fondateurs du genre, BLACK SAB’ en tête, font partie des nombreux influenceurs des New-Yorkais. Sur le triste mais néanmoins puissant "Lost At 22", le groupe tire ce qu’il trouve de meilleur des deux rives de l’Atlantique en matière de Heavy : le riff principal du morceau, SABBATHien, et les breaks très Ricains, massifs et rugueux. Mais à partir de l’influence du SAB' se développent les intonations Stoner (voire Sludge) de certains riffs et de certaines rythmiques de guitare, sur "Seasons" en premier lieu, puis à quelques reprises ensuite, pour un résultat tout-à-fait hypnotique.

M’enfin, c’est bien beau de parler musique… Mais LIFE OF AGONY, ce sont aussi des textes pleins de sens et, forcément, du chant pour les performer. Et quelle performance, encore, que celle de Keith Caputo sur ce deuxième album studio ! Qu’il interprète ses propres textes ou ceux d’Alan Robert, son véritable frère d’âme, le garçon fait transpirer l’émotion qui circule par hectolitres dans son cœur. Ce mid-tempo – presque une ballade sur guitares saturées, en fait – qu’est "Let’s Pretend", déchirant appel du vocaliste à sa mère cramée par la drogue, est magnifique de tension et d'amour inexprimé entre elle et lui. "How It Would Be" est le pendant plus enlevé et plus punky de ce morceau, textuellement parlant, et l'émotion en transpire tout autant. S’il a abandonné les descentes un brin forcées vers les graves, façon baryton, qu’il délivrait par le passé, le frontman se révèle efficace en posant sa voix, en parlant parfois plus qu’il ne chante. Surtout, il maîtrise mieux les aigus, ici, qu’auparavant.

Ce serait toutefois mentir que de dire que tout est parfait sur "Ugly". "Drained" – malgré des paroles toujours désespérantes – apparaît plus anecdotique, un peu comme si une telle débauche d'émotions avait drainé le groupe de son inspiration, justement. Et "Unstable" comme "Fears", sans relief particulier sur le plan musical, sont sauvés par de bons refrains et la performance vocale d’un Caputo qui sait définitivement comment accrocher son audience, ou par un Joey Z. dont le talent de soliste n’est pas en reste par rapport à ses capacités de rythmicien. Mais désolé, je ne suis pas de ceux qui trouvent transcendée la version LIFE OF AGONY du "Don’t You (Forget About Me)" de SIMPLE MINDS. Elle tient la route, mais son couplet est volontairement pataud, au regard de l’originale, ce qui ne sied guère à ce tube. Et introduit un trop grand contraste entre le refrain qui retrouve, lui, le tempo standard du morceau. Difficile de voir cette reprise comme autre chose qu'un bonus track... Ce qu'elle n'est pourtant pas !

Ces menus écueils exceptés, "Ugly" fait manifestement preuve d'une maturité extraordinaire, au sens propre, pour un combo qui n'en est qu'à son deuxième album. C'est plus qu'un ressenti : c’est un constat. Le quartette maîtrise toujours l’agression mais encore plus l’apaisement, désormais, et cela fait ressortir dignement les paroles profondes et introspectives de Robert et Caputo. D'ailleurs, au vu, au lu et à l'entendu des thématiques de cet opus, il est légitime de se poser la question : LIFE OF AGONY est-il le plus grand groupe de Metal Gothique à n’avoir jamais joué de Metal Gothique ? Peut-être bien, malgré l’usage récurrent qu’il fait du mode majeur. “Ugly” le suggère avec force. Même s’il n’est pas sans faiblesses. Telle est la nature humaine, et celle de Caputo, Robert, Abruscato et Z. (allez trouver son nom, vous !) les rattache à ce monde. Fatalement et inexorablement. Tant mieux pour quiconque aime leur art : il n’a jamais été aussi écorché qu'en cette année 1995.

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   T-RAY

 
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- Keith Caputo (chant)
- Alan Robert (basse, chœurs)
- Joey Z. (guitare)
- Sal Abruscato (batterie)


1. Seasons
2. I Regret
3. Lost At 22
4. Other Side Of The River
5. Let's Pretend
6. Ugly
7. Drained
8. How It Would Be
9. Unstable
10. Damned If I Do
11. Fears
12. Don't You (forget About Me) (cover De Simple Minds



             



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