Si l’on fait fi de leurs EPs, les Pictaves de KLONE nous gratifient ici de leur cinquième album. Celui-ci succède à "The Dreamer’s Hideaway" qui aura fait moins l’unanimité que son glorieux aîné "Black Days" . La faute sans doute à un manque de direction claire lors de la composition de ce disque. Celui-ci pouvait osciller vers un Metal rappelant les débuts de KLONE, à la fois agressif et sombre, et comportant des passages très déstructurées, puis par la suite, le groupe obliquait vers le Metal Progressif, avec des passages beaucoup plus aériens. Cependant le précédent effort de KLONE n’en restait pas moins d’excellente facture.

La discographie du groupe parle pour lui, KLONE a été en constante évolution. Les débuts du groupe pouvaient faire penser à du MESHUGGAH sous tranquillisant, mais KLONE est une entité en perpétuelle mouvement et celui-ci s’est orienté rapidement vers les différentes franges de la sphère Progressive. La musique de KLONE, avec "Black Days", s’était globalement adoucie par rapport à ses prédécesseurs, mais sans pour autant perdre son ambiance ténébreuse, rappelant TOOL durant sa période "Aenima". Cependant KLONE n’a eu de cesse de progresser en se rapprochant toujours un peu plus d’une identité qui lui est propre.

L’arrivée de "Here Comes The Sun" semble annoncer justement que ce but est atteint. KLONE s’est totalement jeté dans les flots d’une atmosphère éthérée à la manière d’un groupe comme ANATHEMA, et ceci avec un brio tout simplement remarquable.

Le morceau introductif "Immersion" porte délicieusement bien son nom, et l’on se laisse immédiatement glisser dans l’univers de KLONE, duquel émane une grande sérénité. Si le groupe sait se démarquer par ses compositions, il n’en faut pas moins oublier le chant hypnotique de Yann Ligner, qui est un vocaliste de grand talent, et a déjà fait, par le passé, étalage de son vaste répertoire. Celui-ci semble continuer à se bonifier avec le temps, car une grande sensibilité jaillit de chacune de ses paroles tout le long de ce disque.

Le sentiment de quiétude continue de plus belle avec "Fog" et "Gone up in Flames" et nous fait percevoir que la facette ténébreuse de KLONE s’est, semble-t-il, évaporée au profit d’une musique lumineuse au sens littéral du terme. Le chant en est le parfait exemple, même si KLONE n’avait pas pour habitude d’avoir recours à des growls à proprement parler. Yann Ligner nous avait habitué à osciller entre le chant clair et le chant hurlé, et bien ici le chanteur de KLONE s’est totalement affranchi du moindre rugissement. Voilà une évolution que KLONE a décidé d’adopter sur "Here Comes The Sun", et qui n’est pas sans rappeler les suédois d’OPETH.

KLONE n’en reste pas moins KLONE. Une de leur marque de fabrique ayant toujours été les longs interludes musicaux au sein même de leurs morceaux. Il suffit de se pencher sur "Grim Dance" pour s’en convaincre et se laisser emporter par cette guitare empreinte de clarté.

L’ensemble de l’album permet de faire le tour du champ lexical de la lumière, et pourtant, au final, ce disque n’en comporte pas moins une partie plus obscure matérialisée en un seul morceau : "The Last Experience". Cette chanson se forge une identité plus sombre qui pourrait presque paraître lugubre en la comparant à ses acolytes. Pour preuve ce final sibyllin au magnétisme certain, qui semble vouloir nous happer tout en douceur vers les ténèbres.

Ce final déroutant n’en est pas pour autant la conclusion de "Here Comes The Sun". KLONE achève son album avec une reprise du grand classique d’Ella Fitzgerald, "Summertime", qui a été également popularisé par Janis Joplin. Celui-ci, interprété en acoustique, semble être un condensé des sentiments abordés dans cet album. L’interprétation débute avec une grande sensation de quiétude mais glisse irrémédiablement vers un sentiment de mélancolie pour finalement apercevoir au loin une lueur semblant nous guider vers la clarté, enfin peut-être…

Pour résumer KLONE signe tout simplement un sans faute avec "Here Comes The Sun", en nous sortant sans doute son premier album sans temps morts, ni faiblesses. Le groupe semble avoir trouvé un équilibre dans sa musique afin de pouvoir pleinement s’épanouir et cela pour notre plus grand plaisir. Et il n'y a aucune raison pour que ça s'arrête là.

4,5/5.