Après un "Skeleton Skeletron" un brin décevant, "Judas Christ" ne semble pas beaucoup plus emballant. Le disque est relativement banal aux premières écoutes et banal, c’est un terme que l’on n’aime pas voir associé à TIAMAT, lui qui avançait à pas de géants au début de sa carrière, ayant des années d’avance sur toute la concurrence, avant-gardiste au possible. "Skeleton Skeletron" aura été un coup d’arrêt brutal dans cette marche en avant stylistique qui semblait pourtant sans fin et "Judas Christ" semble, au premier abord, n’être qu’un ersatz, pas beaucoup plus imaginatif que son prédécesseur.

Mais ça, c’est si l’on ne gratte pas un petit peu, que l’on reste cantonné au single "Vote For Love" ou à l’étrange "Angel Holograms" qui donnent l’impression que TIAMAT s’offre au grand public sans plus d’intérêt pour ses fans. Mais cet album n’est pas ce qu’il semble être, il n’est pas qu’une simple succession de morceaux, il est beaucoup plus construit qu’il n’en a l’air.

Johan Edlund a en effet décidé de diviser son disque en quatre parties distinctes, contenant plus ou moins de morceaux. Ainsi se succèdent "Sponae", "Tropic Of Venus", "Tropic Of Capricorn" et "Casadores" (ainsi que deux bonus tracks présentes sur la plupart des éditions, mais on y reviendra plus tard). Toutes ne sont pas égales, ou forcément inspirées, mais TIAMAT va jouer autour des thématiques, des mélodies, passant parfois d’un extrême à l’autre avec plus ou moins de justesse.

"Sponae", par exemple, se voudra assez marquante, ne serait-ce que pour "So Much For Suicide", qui fait froid dans le dos, avec ses gimmicks vocaux qui banalisent l’acte de façon effarante, comme s’il s’agissait d’une comédie musicale, couplé avec un "Vote For Love", le single de l’album, qui pourrait être du HIM dans la forme, avec sa mélodie entêtante et son côté Pop parfaitement assumé. Et si les deux premières parties proposent de belles choses, l’ensemble va commencer à devenir plus morne, plus convenu.

Et c’est là le véritable problème de TIAMAT : celui de ne plus être capable d’être performant sur la durée, comme si l’inspiration s’écoulait alors que Edlund, principal compositeur de la formation, s’adonnait à ses paradis artificiels, pour le meilleur ou pour le pire (voire un entre les deux, mais bon, là, c’est chipoter). Ce qui nous amène aux bonus tracks, deux morceaux qui sont juste WTF comme on dit dans les milieux bourgeois.

"Sixshooter" et "However You Look At It You Loose" sont des morceaux de Trip Hop de bonne facture, qui ont un côté très rustique car enregistrés… Dans la cuisine de Johan Edlund à Hambourg. Voilà voilà. Et ils sont franchement pas mal, si, si. Comme quoi, on n’a pas besoin d’une production de taré pour obtenir quelque chose de bon. D’ailleurs, en parlant de production, Dirk Draeger n’est plus de la partie, c’est Lars Nissen (THERION) qui récupère le bébé, mais contrairement à Waldemar Sorychta ou Draeger, il ne parviendra pas à rendre TIAMAT réellement organique, ce qui est un brin préjudiciable sur cet album.

Alors oui, le 2/5 peut paraître raide, sévère, mais le disque ne tient pas franchement la comparaison avec ses glorieux prédécesseurs (comprenez : de "Clouds" à "A Deeper Kind Of Slumber") et se rapprocherait au final de "Skeleton Skeletron", pour son côté bancal, alternant le bon et l’insignifiant, l’intelligence d’écriture et la banalité la plus affligeante. Ce qui est le drame de TIAMAT, le groupe étant devenu incapable de retrouver sa classe d’antan…