En écoutant "Lend Me The Eyes Of The Millenia", titre d’ouverture qui tabasse avec majesté, entre sonorités Electro acides et blast-beat mitraillette, on se dit que les tournées anniversaire à jouer les meilleurs albums d’EMPEROR lui ont peut-être redonné le goût de l’extrême, celui qui surprend et passionne.
On n’est pas farouche, on aime les évolutions, et un virage Indus dur serait accueilli mieux que l’Aquarius par l’Espagne.
Le début costaud de "Arcana Imperii" nous y ferait presque croire mais voici qu’arrivent le refrain soft Pop et son chant clair d’ascenseur.
C’est la débandade.

Depuis trop longtemps Ihsahn confond chant clair et sucrerie de midinette. Une tendance affreuse dont on peut ressentir les prémices sur la fin d’EMPEROR et le début (somme toute assez solide) de sa carrière solo. Depuis qu’il a arrêté de tenter de chanter comme un viking ou un baryon pour "bien" chanter comme un "vrai", prêt pour the Voice, ses compositions s’en ressentent et puent les ballades guimauves même pas accrocheuses.
A-t-on besoin de citer des exemples de chanteur "clair" intéressants et sombre? Bowie, Waits, Curtis, Cave, Rigg et j’en passe.
Il n’y a pas de mal en soi à être Pop mais il faut être sacrément fortiche pour en faire de la bonne. Tout le monde n’a pas la capacité de faire de l’excellente Pop ironique comme GHOST. Sinon vous êtes bon pour concurrencer Christophe Mae et passer aux Enfoirés.

Donc, bon, Bref.. Résumé.
"ÀMR" c’est d’abord et avant tout ce "Lend Me The Eyes Of The Millenia" à écouter en boucle -je suis totalement de l’avis d’Erwin- prouvant qu’Ihsahn est encore capable du meilleur.
Mais "ÀMR" c’est aussi les plus gros cacas jamais démoulés par l’artiste, le genre qu’on ne tolérerait même pas sur Ouï FM, telle la ballade "Sámr" idéale pour un Glee Club aseptisé, ou l’indigent "Twin Black Angel" qui ne dénoterait pas sur une OST de "Twilight" nappée de sucre glace.

Entre les deux il y a du vraiment bon (le désarticulé "One Less Enemy"), du pas si mal (le calme et avant-gardiste "Where You Are Lost I Belong") et une ribambelle de titres qui auraient pu déchirer si la manie du refrain ou passage mièvre et sirupeux ne venait pas tout gâcher, un mélange des genres qui pique les oreilles, comme si "Mon Petit Poney" s’invitait au milieu d’un film d’horreur (en particulier "Wake" dont la badasserie jouissive est douchée par la soupe aux fraises Tagada.)

Ihsahn mérite désormais des tomates pourries dans sa tronche pour ces passages cheese cake aux macarons, autant pour eux-mêmes, intrinsèquement à vomir du glucose parfumé à la rose, que pour leur effet dévastateur sur le reste du Metal encore tout à fait extrême proposé par notre bobo virtuose.
Je m’étonne qu’il ne se rende pas compte de l’incompatibilité radicale entre ces deux faces. Ou alors il aime ça et là ça devient grave.