Un de mes coups de cœur en Black ces dernières années est sans contredit INFESTUS, one-man band allemand exploitant le mal de vivre avec mélodicité comme peu de formations ont réussi à le faire dans mes oreilles. Je pense bien sûr à SHINING ou LIFELOVER qui officient dans cette catégorie de Black dépressif, mais INFESTUS (sur "Ex|Ist"), s'en éloignait un peu pour se rapprocher d'un Black Mélo fortement ambiancé à la WITTR, le côté forestier en moins. Cet album beau à pleurer a bien évidemment attisé ma curiosité pour découvrir les deux premiers méfaits d'Andras. Voici le second, "Chroniken Des Ablebens".

Premier constat : "Ex|Ist"a marqué un grand saut pour l'Allemand, qui, trois ans plus tôt, nous offrait une galette plus conventionnelle dans le genre. Sous-entendez par là un travail tout aussi fouillé sur les atmosphères et noires mélodies, mais dans un enrobage moins soigné. Ce n'est pas tant négatif, que plus... ordinaire. Exemple : l'écho dans les riffs et les samples qui ne sont pas toujours très subtils...

"Chroniken Des Ablebens" compte également sept morceaux, dont une intro et une outro, ce qui nous laisse cinq grosses claques à se prendre dans la gueule pour quarante minutes d'un Black vitaminé. À la fin, vous aurez eu suffisamment à manger, croyez-moi, car INFESTUS est davantage offensif sur ce disque, tel un 1349 en grande forme, ce qui laisse peu de place pour les pauses ou aérations comme sur "Ex|Ist". L'album s'écoute ainsi très facilement, si on est fan... Pour plusieurs, qui ne cherchent que leur dose quotidienne ou hebdo de « Black impur à émotions », ce sera parfait.

Sur le fond, Andras nous balance une musique pas trop prise de tête, assez compacte pour un tel Black, mais pas trop impersonnelle. Certes, on a déjà entendu ce type d'albums des dizaines de fois, le son typiquement allemand ressort par toutes les interstices de cette geôle humide, LUNAR AURORA est parfois là à bonne distance et on frissonne de bonheur sous les assauts de la guitare du talentueux loup solitaire. Car oui, "Chroniken Des Ablebens" vaut le détour malgré les petites réticences énoncées. Aussi oublie-t-on rapidement l'écrin dans lequel il repose.

Ce qu'on retiendra avant toute chose est qu'INFESTUS sait traduire sa thématique avec brio. En Black dépressif, c'est souvent du pareil au même ; noirceur, Diable, tristesse, déchéance... Mais ici, à part quelques riffs banals, Andras arrive à nous faire croire qu'il a trouvé une formule dépourvue de clichés pour illustrer cette « abysse spirituelle » collée à sa musique. Tout est basé sur les complaintes de ses cordes sensibles trempées dans le béton, qui sont au centre de cette descente aux Enfers. On ne se souviendra que de ça et c'est déjà très bon pour un deuxième album, auquel on pouvait aisément, en 2008, imaginez un successeur digne de la qualité d'un "Ex|Ist".

Et on se dit qu'un jour, INFESTUS touchera les étoiles. Mais pour ça, il faut être devin... Ou partisan fini de ce Black couillu et tendre à la fois. Une bien jolie fusion qui opère la même magie chaque fois qu'elle s'invite dans vos journées maussades et vos passages à vide. À écouter dans ces occasions de préférence ou dans toute pénombre salvatrice, question de goûter pleinement les fruits pourris qu'Andras sait bien cueillir et mettre en compote.

Pas de morceau préféré, ils se valent tous car taillés dans la même roche métamorphique !

Note : 3,5/5.