Steve Dawson et Graham Oliver sont deux des plus voraces charognards que le heavy metal ait enfanté. Derrière ces noms se cachent, ce n'est un secret pour personne, deux des membres fondateurs de SAXON, légende du heavy metal britannique qui, si elle doit beaucoup à l'investissement initial des deux musiciens, s'est par ailleurs très facilement remise de leur départ : Tandis que Dawson, après 10 années passées au côté de Biff Byford et ses acolytes, se fait virer pour incompatibilité d'humeur avec le manager du groupe, Oliver va attendre 1996 pour se faire licencier comme un malpropre après que les autres SAXON eurent découvert que le guitariste vendait sous le manteau des bootlegs du groupe pour arrondir ses fins de mois. Loin d'être démotivés, les deux parias décident de combiner leur talent en 1994, et accouchent sous le patronyme SON OF A BITCH (le premier nom de SAXON) de l'album "Victim You" en 1996, agréable surprise heavy metal "old school", comprenant notamment cet irrésistible brûlot qu'est "Past The Point".

Désireux, malgré tout, de cachetonner autant que possible sur leur glorieux passé, les deux comparses décident, au début des années 2000, de se réapproprier le nom SAXON. Non pas de former un groupe-tribute à la gloire britannique, comme certains l'ont fait (pensons par exemple à X-UFO, composé des anciens membres de UFO Danny Peyronel et Laurence Archer), mais bien de récupérer les droits sur le nom du groupe, et ainsi bénéficier de son usage exclusif. Après moult passages devant les tribunaux, Oliver et Dawson se voient refuser la propriété du nom et, bien qu'ayant le droit de l'utiliser, se voient contraints d'y apposer obligatoirement la mention "Oliver / Dawson". Le OLIVER / DAWSON SAXON (que nous abrégerons ODS) prend donc son envol en 2000, parcourant les routes et reprenant à l'envi des titres de ces albums mythiques que sont "Wheels Of Steel", "Strong Arm Of The Law", "Denim And Leather" ou "Crusader". ODS, sur lequel viennent se greffer le chanteur John Ward (MADAM X, SHY), le guitariste Haydn Conway (SARACEN), et depuis 2010 le batteur Paul Oliver, fils de son père. Une carrière basée intégralement sur le passée, parsemée de live et de DVD qui, tant au niveau des titres que des visuels, renvoient ostensiblement à SAXON.

Et puis, comme touché par la grâce, le groupe décide enfin de proposer du matériel neuf. Pour s'en rendre compte, il faut passer outre l'odieuse pochette de ce "Motorbiker", qui mêle avec un mauvais goût certain le visuel de "Wheels of Steel" (SAXON) et le logo de MOTÖRHEAD, dont ont se demande ce qu'il vient faire là. Les bases de ce nouvel album d'ODS reposent sur un heavy metal 80's, marqué par la prédominance des riffs plombés gonflés de testostérone. Oliver et Dawson prennent néanmoins le parti de redynamiser leur musique en tentant de la moderniser et pousser l'agressivité à son maximum. Du talent des deux artistes, pourtant auteurs d'une bonne partie des classiques de SAXON, il ne semble malheureusement pas rester grand chose. Car "Motorbiker" est poussif au possible, et souffre d'un manque cruel d'inventivité et de créativité qui donne l'impression d'entendre une succession de riffs similaires du début à la fin de l'album.

Le groupe ne pêche pas dans l'exécution des morceaux, quoi que la voix parfois hésitante et forcée de John Ward ne rende pas service à l'album, mais plutôt dans la composition. Car si "Motorbiker", le titre, constitue un brûlot sympatoche, "Whippin' boy", cliché au possible, "No Way Out" et ses ambiances à mi-chemin entre heavy metal et indus', ou le lourdaud "World's Gone Crazy" tirent vers le bas un album qui ne surnage que grâce à quelques titres réussis, à l'image de la power-ballade "Just Another Suicide" et le rageur "Hell In Helsinki".

En cessant de regarder constamment dans le rétroviseur, ODS tente de se construire une carrière digne de ce nom, et l'effort se doit d'être salué. Reste maintenant à retrouver la magie créatrice qui animait les deux artistes sur les albums de SAXON ou sur le SON OF A BITCH, histoire d'apporter un peu de substance à un heavy metal qui, tel que présenté sur "Motorbiker", ne présente aucun intérêt.