EINHERJER, un des oubliés du premier âge Viking, sort du Valhalla et retourne sur Midgard te péter la gueule, juste pour de rire !
C’est dire, le trio norvégien revient de loin. Neuf ans se sont écoulés après un "Blot" devenu culte, et un split malheureux qui n’aura par ailleurs pas donné grandes opportunités aux membres de se parfaire dans un autre domaine (le seul et unique album thrashouillet de BATTERED sorti en 2006 sera passé complètement inaperçu). Mais les chevaliers d’Odin auront survécu à leur Ragnarok intime, et ils reprennent du service comme à leur premier jour : orageux, colériques, avec ces riffs charnus, ce refus de la facilité bien cadencée de la plupart des groupes actuels, sa rythmique de tambours de guerre, et toujours cette ambiance voyageuse, cette magie nordique.

Le titre "Varden Brenne", qui avait été lâché aux lions un mois avant la sortie de l’album, nous donnait déjà une bonne piste : "Norrøn" serait la suite directe de "Blot", sans les claviers (ou tout comme), et avec un grain agressif rappelant un "Dragons Of The North", avec seulement des chœurs parsemés, ces riffs acérés reconnaissables parmi mille autres, et quelques embardées acoustiques bien placées.

L’album sort et si on regrette déjà qu’il y ait si peu de pistes, on ne peut que sentir ce torrent de nostalgie alors qu’EINHERJER a toujours ce charisme fou, cette capacité à composer des tueries épiques de haute volée. Le groupe se lance donc dans les compositions longues, avec un "Norrøn Kraft" qui rappellerait quelque peu un "Dead Knight’s Rite" dans ses premiers élans, mais qui après un long passage atmosphérique plutôt réussi, n’arrivera pas à joindre les deux bouts de son morceau. En contrepartie, le boom boom quasi-tribal de "Alu Alu Laukar" paraît trop court. Autres forces contraires, "Naglfar" paraîtra quelque peu balisé, alors que "Atter På Malmtings Blodige Voll", après un départ laborieux et un peu longuet, se transformera en une longue épopée de riffs, de mélodie et d’ambiance convoquant à lui tout seul la fin sublime de "Norwegian Native Art", ou des titres comme "Ingen Grid" dans "Blot". Un déchaînement instrumental, puis un démêlement acoustique comme on en trouve si rarement.

"Norrøn" est comme ce bon vieux grain de pellicule argentique, il a ce goût de l’authentique, cette qualité artisanale couplé avec un savoir-faire qui n’est plus à démontrer. Lorsque le groupe nous quitte dans la mélancolie écorchée de "Balladen Om Bifrost", on sent que le groupe s’est remis en route pour aller plus loin, tout en gardant en tête le riche héritage des années 90. Un titre marquant, concourant pour le prix de la Nostalgie 2011, avec ce ton BATHORY-ien touchant au sublime.

Autant le dire, les 8 dernières minutes de l’album pourraient à elles seules justifier l’achat de la galette.
EINHERJER aura toujours été conduit (presque forcé !) à ne jamais se fixer de limites tout en composant des riffs reconnaissables entre mille (et vraiment, il n’y a pas d’alter-ego d’EINHERJER de la même manière qu’il y a des alter-ego d’ENSIFERUM). Et si "Norrøn" se démarque de "Blot", certes, c'est de manière moins radicale que "Norwegian Native Art" ne se démarquait de "Odin Owns Ye All", ou que "Blot" ne se démarquait de "Norwegian Native Art". Mais "Norrøn" trouve clairement sa place logique (peut-être un chouya trop logique) dans la discographie d’EINHERJER , il convoque le passé du groupe tout en se tournant vers le futur, qui, on en est sûr, sera florissant.