L'équivalent des Titans pour les Grecs, les Fomors auraient existé avant la naissance des dieux dans la mythologie celtique. Ils représenteraient les dieux du chaos et de la nature, en opposition aux Tuatha Dé Danann (civilisation). SUIDAKRA raconte leur histoire en ce début de 2011, inspiré par la découverte d'un livre sur le site de la tombe à couloirs Dowth datant du Néolithique, en Irlande. Voilà pour la leçon et le concept. Fameux, non ? Ça donne assez envie… En tout cas, pour un groupe ayant le moindrement de l'imagination, une telle légende peut décupler les sens et les idées.

Je suis heureux que ce soit tombé sur les Allemands, car leur Death/Black/Power Folk se prête à ce genre de projet historique et épique. Et force est de constater que la productive bande à Arkadius n'a pas échoué, car ce "Book Of Dowth" est hyper entraînant et insuffle une contagieuse énergie. Encore plus que sur son dernier effort, "Crogacht".

Parlons d'abord de sa structure, car elle est parfaite. J'aime souligner ce point quand les groupes balancent bien leurs albums, car il est essentiel d'avoir une tracklist en montagnes russes pour s'assurer que l'attention de l'auditeur ne flanche pas. "Book Of Dowth" débute et se termine par une instrumentale et contient deux plages plus acoustiques consécutives en son sein, "Biróg's Oath" (plaisante pièce chantée par une nymphe Fomor…) et "Mag Mell", qui pourra rappeler BLIND GUARDIAN. Avec un total de dix pistes, cela veut dire qu'il ne reste que six brulots à se mettre sous la dent, de quoi nous forcer à en profiter au maximum ! J'approuve cette façon de consteller, de foutre des néons autour des morceaux plus hard, car ça les met sur un piédestal qu'ils méritent de toute manière.

"Dowth 2059" donne le ton après une intro folk – cornemuse à l'appui – projetant d'emblée dans cet univers lointain et épique. Un départ canon au riff meurtrier et à la puissance communicative. Dur de résister, je vous avertis ! Cette guitare parle, mes aïeux ! Et elle parle fort, grave, accompagnée d'une basse monstrueuse qui rebondit sur des soli accrochant instantanément un sourire au visage. Remarquez, SUIDAKRA en général donne le goût de festoyer, ses racines folk sont pleinement assumées et transpirent dans ces élans grandiloquents de la tête à la queue de l'album. La mélodie de "Battle-Cairns" (gros accent Power Metal ici, comme sur l'avant-dernière musclée "Fury Fomoraigh") vous semblera peut-être familière car fédératrice au maximum. Wouah, ça déménage !

Au sortir du duo d'« interludes », on respire à nouveau le grand air des batailles et on jase de l'Enfer avec les quatre dernières bombes de l'album. La recette est la même qu'en début de parcours : bon mix de tranches acoustiques/celtiques et de cavalcades mortelles pelletant tout sur son passage, comme une tornade impossible à freiner. On remarquera aussi davantage l'efficacité des parties chantées en chœur par Arkadius et le marteleur en chef, Lars Wehner. Le trio ne perd pas son temps et profite de tous les atouts dont il dispose. Certains quatuors ou quintettes ne peuvent se targuer de développer autant de cheveux vapeur ! Et c'est là tout le charme des Allemands : faire plus avec moins. Faire chauffer les oreilles sans orchestre de malade.

"Book Of Dowth" contient tous les ingrédients pour attirer les gros auditoires. Espérons que ce 10ème album (!) permettra aux Allemands de se faire reconnaître enfin ! Avec une telle pochette, ils ont mis toutes les chances de leur côté ! Plusieurs trouveront la formation un peu limite, « easy listening » et simpliste à côté des superstars du genre, mais SUIDAKRA possède un petit je-ne-sais-quoi qui le différencie. Est-ce l'expérience qui fait ça ? Peu importe, il livre la marchandise avec ce skeud un peu court, mais méga énergique.

Allez donc déterrer ce livre à votre tour, vous en apprécierez la lecture et les images qu'il contient.