Il y a des trucs que je croyais ne jamais pouvoir écrire. Du genre « Voilà, je me passe le nouveau KORPIKLAANI quotidiennement depuis une semaine, franchement ça me botte », ou « KORPIKLAANI ravive la flamme d’un Folk Metal qui a été peu convaincant en l'année de grâce 2010… »
Et bizarrement, c'était la seule année depuis six ans où le groupe n’avait PAS décidé de nous abreuver de sa musique de pochtrons. Une coïncidence assez amusante, car si KORPIKLAANI n’avait pas pris son année sabbatique à composer intelligemment des morceaux intelligents, je pense que je me serais encore retrouvé à chialer sur la tombe du folklore métallique et aurait simplement passé le flambeau de "qui défoncera une porte ouverte" à un autre de mes collègues.

Les poilus Finlandais, dans un élan de lucidité remarquable, comme s’éveillant après une longue gueule de bois, nous pondent enfin un album à la hauteur de leur talent. Les succès du groupe jusque là se comptaient plus sur les mains des bras que sur les doigts de la main, autant dire que ceux qui avaient qualifié "Tervaskanto" et "Karkelo" de chefs d’œuvre doivent être morts d’extase à l’écoute de "Ukon Wacka", si bien qu’il ne restera plus que les détracteurs du groupe pour défendre ce nouvel opus !

Alors allons-y, car si le taux d’alcoolémie frise toujours le délit, on a enfin le droit à ce que le groupe nous avait privé depuis "Voice Of Wilderness" : une vraie ambiance à la fois bon enfant et forestière qui rappellerait autant un "Voice Of Wilderness" que le "Jaktens Tid" de FINNTROLL (dans ses mélodies), des rythmes variés et qui ont enfin arrêté de se réduire à un poumtchak speedo-dégueu à s’en dessécher le cerveau, puis des mélodies catchy et souvent utilisées à bon escient, une VRAIE maîtrise instrumentale avec des instrumentistes qui n’ont plus la flemme de s’enflammer dans des soli tapageurs… Et ENFIN, ENFIN des riffs de guitare, des vrais ! KORPIKLAANI est redevenu Rock’N’Roll, et comme pour convaincre les derniers poivrots du fond qui auraient mal compris, il se permet même de reprendre du MOTÖRHEAD, plus pour le fond que pour la forme.

D’ailleurs, dès l’écoute des premiers titres, c’est l’éclate : "Louhen Yhdeksas Poika" pète la baraque avec son côté "olé-olé-olé", son accordéon fédérateur et son refrain qui entre dans la tête. "Paat Pois Tai Hirteen" roule des mécaniques guitare en avant. C’est simple et ça mange pas de pain jusqu’à ce que Hittavainen s’accorde une petite branlette au violon qu’on aura un certain plaisir à zyeuter. On crie pas encore au miracle, jusqu’au supra-accrocheur "Tuoppi Oltta" qui ne souffre que d’un Jonne Järvelä toujours assez peu inventif dans ses lignes de chant. "Lonkkaluut" fait un gros clin d’œil à "Voice Of Wilderness" (encore !), avec un refrain prenant de plus. Cette bonne vieille "Tequila" aura droit à un hommage largement plus pertinent que cette pauvre Vodka, maltraitée sauvagement sur "Karkelo". Percu démente, morceau court et direct, harmonie mélodique parfaite entre guitare et accordéon… Ce que KORPIKLAANI aurait dû faire tout le temps !

Passé ce cap là, la qualité diminue un peu, mais on suivra pour une fois le groupe jusqu’au bout dans son délire, avec un titre éponyme shamanique, un "Korvesta Liha", qui une fois n’est pas coutume, revient sur le fameux rythme poumtchak qui a clairement fait son temps. Mais même un titre comme ça, avec son p’tit côté "country de saloon" a plus de gueule que n’importe quelle trufferie de "Karkelo". On en dira de même plus tard pour un "Surma" à la structure tout de même bien pensée.
Le mid-tempo "Koivu Ja Tahti" est tout aussi sympathique mais traîne un peu en longueur. Pareil pour "Variinpolkka", instrumental qu’on a l’impression d’avoir entendu plein de fois chez le groupe, mais avec cette fois-ci des instruments folk qui se font la fête et se répondent. Rien à voir avec d’autres instrumentaux gnangnan comme le "Running With Wolves" de "Tervaskanto".
Quant à la reprise d’"Iron Fist", elle est à prendre au troisième degré dans le sang, juste amusante mais parmi les titres les plus faibles de l’album.

"Ukon Wacka" ravive mon intérêt pour un groupe dont je n’attendais plus rien. C’est déjà, et c'est SURTOUT là son intérêt. L’ombre des albums précédents pèse malheureusement sur KORPIKLAANI comme les couilles de Sanchez sur votre crâne quand vous vous réveillez un dimanche matin de cuite, ça reste le grand problème de cet album, avec en tête un chanteur qui n’a pas recouvré son charisme et qui continue à être assez prévisible à chaque fois qu’il ouvre la bouche. De quoi virer vers le 3/5.

Mais quand même : nos poilus du bois des Quatres Saouls font enfin leur retour, et ça, ça mérite un grand hourra !