Les Finlandais n'ont pas fait les choses à moitié sur leur premier album : grosse production, enfin pour ce type de musique ça sonne mammouth, près d'une heure de musique relaxante même si le chanteur gueule trop, une pléthore d'invités, du violoncelle aux voix, en passant par la slide et les ambiances « out of this world » mélangeant la mélancolie aux grands espaces. Ces putains d'ambiances où le drame survient à tout moment, marque de commerce de CALLISTO, déjà à cette « époque », avec qu'un E.P et deux démos en banque. Faut le faire.

Je peux pas encore croire qu'ils en soient qu'à leur troisième opus avec cette perle de "Providence", album dont la qualité serait sensée représenter l'effort d'une formation pas mal plus âgée. Mais bon, y'a des « oubliés » de la logique et du « gros bon sens » comme ça dans la vie ; appelez ça des doués, des "sur"doués, des chanceux, dites que leur style (Sludge Atmo/Post-Hardcore selon Metal Archives) était rare en 2004, étalez vos arguments autant que vous le voulez. Reste que CALLISTO est une percée de soleil noir dans ce boueux orifice qu'est le Sludge, ici doublé d'un Post-Hardcore dont la rage n'est pas assez dosée et dont la tragédie n'est pas encore à point. Tout cela s'est précisé dès "Noir", donc pas de bile ; les Finlandais ont le contrôle et maîtrisent leur art de manière précoce comme un Mozart ou un Jordy… heu, mauvais exemple : lui, c'est son père qui le manipulait. Haha !

Non mais écoutez-moi ce disque ! N'écoutez pas d'abord ce chanteur, Marcus Myllykangas, concentrez vos efforts sur la musique en gardant toujours en tête que c'est un premier skeud. Et que le combo est quatuor, pas sextette comme présentement. Que vous soyez amateur du genre ou non, goûtez à cette sauce opaque ("Worlds Collide") nappée sur de plus doux morceaux de viande où la mélodicité des guitares et la beauté (oui !) des atmosphères subliment un art savoureux, celui du Metal lent et introspectif. Ce mix peu hospitalier de Doom/Sludge/Hardcore qui vous pénètre jusque dans l'âme, ce groove qui empeste la rage et la renonciation, ces cris de bête sous couvert feutré des instruments… Faut plonger.

Plonger dans cet étang de terre inondée, brun et sale, où subsiste parfois une fleur résistant à l'envahisseur : cette peine sous-jacente que CALLISTO adore tellement tourner et retourner dans tous les sens. Enfin, je parle de peine, mais ce n'est clairement qu'une piètre perception que ce qu'a voulu réellement exposer les Finlandais. Chaque note semble leur peser, leur coûter cher, leur demander un effort surhumain, mais encore une fois, c'est une perception erronée, car ces jeunots sont, je le rappelle, en contrôle.

Ils sont à l'aise, et merde que ça peut faire chier. L'auditeur transpercé de préjugés envers les nouveaux groupes sera le premier bluffé et ensuite, le chroniqueur, habitué d'écouter des opus de départ et d'être soit déçu, soit condamné à écrire cette damnée phrase : « Ce groupe ne nous a pas montré encore toute l'étendue de son talent… ». Avec CALLISTO, c'est encore une fois un peu vrai, mais moins. Si on compare "True Nature Unfolds" à "Noir" ou "Callisto" (vous constaterez que nous n'avons pas beaucoup de matériel pour les confronter), il est évident qu'il est inférieur. Et bordel, on doit en prendre compte. Pas du peu d'histoire dont pourraient se targuer les sludgeux, mais du fossé – aussi peu profond et large soit-il – entre le cadet et l'aïeul. Ça doit demeurer dans notre esprit lors de l'analyse de cette courte mais puissante carrière qui, je l'espère, durera longtemps.

Au final, qu'ai-je dit, écrit ? Que CALLISTO est né pour propulser le Post-Hardcore à un niveau d'excellence et que ce premier essai dans la cour des grands, « in the show », est concluant. Une bonne alternance de titres couillus avec des plages plus calmes, où les cordes et samples se la coulent douce en regardant le soleil décliner. Où les émotions sont souvent à fleur de peau, imperceptibles, sinon au plus ouvert d'esprit et de cœur.

C'est alors que…

Votre vraie nature se dévoile.