Putain, six ans ! Six longues années à espérer que ce satané groupe daigne sortir un estimable successeur à "Providence", qui se classe probablement dans mes 100 albums favoris. Six longues années à attendre la parfaite antithèse à mes préférences métalliques, enfin sur la forme. Car sur le fond, les Finlandais de CALLISTO peignent le genre d'atmosphères dont je me délecte, peu importe le style que je m'envoie, à cheval entre épique et grisaille, entre lyrisme et lamentations.

Six ans à écouter autre chose, large parenthèse, immense détour, pour enfin replonger dans cette mare parfumée, marcher dans cette campagne sombre en écoutant le vent murmurer ces "secrets de jeunesse". Ces souvenirs, CALLISTO nous forçant à prendre un recul sur soi-même et à verser dans une nostalgie précoce tellement on entend le passé dans ces airs consistants et vaporeux à la fois. Que de bonheur donc, si on aime les expériences introspectives…

"Secret Youth" injecte ainsi le même genre de drogue organique et planante que sur "Providence", à la différence qu'il est peut-être un peu plus obscur, un brin plus difficile d'accès. La musique interpelle autant, sinon plus, car les Finlandais s'énervent moins sur ce Post-Hardcore mature et dosé, beau comme un coucher de soleil. Un peu à l'image du nouveau SOLSTAFIR, sauf que CALLISTO passionne toujours !

Le Post-Hardcore de CALLISTO demeure quand même un mystère tellement il évoque de sentiments opposés, de paysages universels, tant il arrive à faire vibrer nos cordes sensibles ou peser sur le bouton colère bien enfoui. Les Finlandais sont comme des marchands de sable ; ils nous font rêver et décoller aux confins de notre esprit avec aisance. Après un ou deux morceaux, la pilule devrait vous avoir assommé et amené ailleurs. Suivez ces riffs mielleux et ces mélodies aériennes, surfez sur le chant clair inimitable et merveilleux de Jani Ala-Hukkala, un de mes chantres préférés.

À propos de cordes vocales, CALLISTO a sensiblement coupé dans le registre Hardcore, qui ne représente que 5% environ des lyrics. Une bonne chose, car trop souvent sur "Providence", les cris brisaient les climats doucereux. Sur "Secret Youth" par contre, les mauvaises surprises sont rares, signe que le groupe a trouvé sa niche. L'album est aussi plus court de 15 minutes, pour le même nombre de plages, alors gros travail de concision à souligner. Pas que "Providence" ait été si long, je l'adore, mais il est vrai que "Secret Youth" ne traîne pas, même si, au risque de me répéter, il peut s'avérer opaque au début. Il dévoile ses qualités une à une au fil de l'eau, décuplant notre admiration.

Une autre réussite pour les Finlandais, qui semblent incapables de nous décevoir. Si j'avais à choisir entre cet opus et "Providence", j'opterais pour ce dernier car il est ponctué de quelques moments marquants de plus, mais n'en tenez pas rigueur, car ce "Secret Youth" est une perle supplémentaire au collier de ce fier sextette scandinave.

Parfois, les distractions provoquent non seulement l'évasion, mais aussi l'exaltation. CALLISTO ne le sait que trop bien.

Podium : (or) "Dam's Lair Road", (argent) "Pale Pretender", (bronze) "Acts" – "Grey Light".