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DESCENDENTS - Milo Goes To College (1982)
Par CANARD WC le 7 Juin 2010          Consultée 3660 fois

Le Punk a quelque chose de naturellement sympathique pour le Hardos lambda. Un peu comme ce cousin germain qu’on connaît vaguement mais pour lequel on éprouve une attirance naturelle.

Sauf que ça marche que dans un sens.

Le Punk vous emmerde fondamentalement, amis lecteurs, vous n’êtes qu’une bande d’hippies à cheveux longs qui vous branlottez façon HENDRIX (que c’est énervant ce côté « too much »…). Donc le Punk vous pisse dessus, car sa colère à lui est légitime, elle n’a pas besoin de mise en scène, d’un Eddie Grand-guignolesque, de jeu de lumière, ni de fans qu’on veut faire rêver (et raquer). Le Punk encule tous vos concepts-albums de progueux, vos soli à n’en plus finir et tous vos idéaux de Metal Heroes.

Si musicalement, Punk et Metal semblent souvent proches, « philosophiquement », les deux genres se situent à l’antinomie tant dans la démarche que dans les messages véhiculés. De ce fait, le « succès » du Punk post-77 a quelque chose d’anachronique. Le simple fait qu’il soit devenu une mode à part entière vide d’une partie de son sens la portée du mouvement. Alors que pendant que les RAMONES cherchaient à devenir des Rock Stars, que les CLASH putassaient avec le Ska et que les SEX PISTOLS faisaient vibrer tout Londres ; dans ce sillage à crête dure, une autre version du Punk fermentait. Un sous genre bâtard en passe d’ouvrir le bal à toute une cohorte de groupes à mi chemin entre cette envie légitime de tout péter et celle de séduire votre oreille, entre la dureté inhérente au Punk et ses aspects les plus accrocheurs. C’est de cette « Lucy » du Punk (le carbone 14 indique approximativement 1982) que des groupes comme BAD RELIGION allaient prendre vie, seraient vénérés par NOFX et bien entendu ignorés de la majorité comme il se doit quand on parle de ces bombes à retardement qui ont ouvert la voie à de nouveaux pans musicaux.

1982 donc, un obscure groupe – prophétiquement appelé « DESCENDENTS » - se lance dans un exercice inédit : conjuguer la rugosité du Hardcore avec de la mélodie, voire avec des aspects « Pop ». Gueuler avec entrain, massacrer avec délicatesse, assommer en douceur, plus globalement chercher la lumière à travers un mur du son aussi compact que dissuasif : tel est l’enjeu de cet édifiant "Milo Goes To College" qui constitue à lui seul l’archétype de ce que deviendra quelques années plus tard le « Hardcore mélodique », soit un hymne au compromis au pays du Punk qui gueule.

L’Histoire s’étant montrée assez injuste avec cet album (commercialement parlant), on pourrait tout aussi bien crier au scandale devant une telle mémoire sélective et on pourrait taper du pied de rage mais ça servirait à rien. Sauf si vous avez des fourmis dans les jambes. Car par delà l’aspect « culte » de la chose, l’intérêt de "Milo" se situe ailleurs, plus précisément dans cette alchimie délicate que le groupe a mise en place, arrivant à faire cohabiter de façon cohérente la violence hurlée d’un "Parents" haineux et l’entrain pop irrésistible d’un "Bikeage" impeccable. Tout l’enjeu de la musique de DESCENDENTS pourrait tout aussi bien être résumé dans ce "Suburban Home" incroyable : batterie furieuse, basse sautillante, son épais, lignes de chant colériques qui retombent sur un refrain à hurler sous sa douche le matin. Enchaîné sur "Statue Of Liberty" : mêmes symptômes, même combat. Refrain / structure « pop » qui flirte avec un riff qui joue du coude et un Aukerman (le chanteur) presque nihiliste.

Où sommes-nous ? Qu’est ce qu’on fout ici ? C’est quoi cet album crasseux et jovial à la fois ? Le groupe lui-même ne sait pas. Officiellement, il va au collège ce "Milo", mais de quoi on parle en fait ? Faute de réponse à ces questions, DESCENDENTS balance les allégations toutes faites et les messages tels des mandales distribuées à tour de bras. Contre les parents qui sont des cons ("Parents"), contre les USA ("Statue" / "Hope"), les institutions ("Marriage"). On préférerait être un ours, mais pas un looser, ni un Punk, on ne sait pas, on s’en fout, le titre suivant a déjà commencé. De quoi on parlait ?

De ce désordre intellectuel – presque existentialiste - aucune étiquette ne semble coller ("Suburban Home"), seule surnage comme par miracle cette incroyable envie d’accrocher votre attention à grands coups de riffs minimalistes, de refrains impeccables assaisonnés des délicieux délires de basse de Tony Lombardo. Témoin cet enchaînement inouï : "Marriage" – "Hope" – "Bikeage". Pamphlet anti-mariage coincé entre virulence et drôlerie, du Punk à poil dur qui déboule jouissivement dans un second degré énervé pour mieux aboutir sur ce "Hope" poignant au possible. Aukerman change de registre, passe de l’agressivité au désabusement avec un rien de mélancolie. De cette facette plus fragile, "Bikeage" déboule et vous éblouit : positivisme enivrant, basse chafouine tout en avant et une articulation refrain / lignes de chant juste parfaite. D’ailleurs, ce titre est « parfait » : 2’15 de pur bonheur, d’un entrain jouissif, plongé dans un univers musical où le Punk prend le meilleur de la pop pour vous scotcher les neurones.

En trois petits titres, DESCENDENTS vous a fait passer d’un Punk agressif, à la vindicte larmoyante pour mieux retomber sur une facette accrocheuse comme du velcro.


En 1982, un obscur petit groupe de proto-Punk-dur vient de relever un défi auquel personne ne lui avait demandé de se frotter : celui de conjuguer le Punk avec cette envie de mélodies. Alors que le Hardcore est à peine en train de prendre ses repères, DESCENDENTS en est déjà à l’étape suivante et vient de former le moule musical le plus intéressant qui soit du genre, celui d’un Punk intransigeant qui cherche à séduire.


Note : 4,5/5.


Morceau préféré : "Bikeage"
Morceau le moins préféré : "Jean Is Dead"

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   CANARD WC

 
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- Milo Aukerman (chant)
- Tony Lombardo (basse)
- Frank Navetta (guitare)
- Bill Stevenson (batterie)


1. Myage
2. I Wanna Be A Bear
3. I'm Not A Loser
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5. Tonyage
6. M-16
7. I'm Not A Punk
8. Catalina
9. Suburban Home
10. Statue Of Liberty
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12. Marriage
13. Hope
14. Bikeage
15. Jean Is Dead



             



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