NARGAROTH, groupe culte qui n'a jamais su vivre à hauteur de son statut. Un statut né autour d'un premier album souvent surestimé bien que pétri de qualités. Une ambition toute teutonne, une mégalomanie teintée de nihilisme, coït des contraires. "Herbstleyd" était un bel album de black metal, de ceux qui peuvent plaire. Plaire aux méchants aimant le romantisme douloureux, plaire aux gentils qui voient dans la haine et le désespoir des sentiments beaux.
Mais depuis, NARGAROTH a failli. "Black Metal Ist Krieg", ouvrage incompris, rempli d'un deuxième degré qui passe mal dans le milieu noir, étrange album de reprises, gros doigt tourné vers les true true de mes deux. Les true true de mes deux que NARGAROTH s'est ensuite mis à draguer de la plus vilaine façon sur un "Prosatanica Shooting Angels" qui n'a convaincu personne. Un "Prosatanica Shooting Angels" qui vient après du sous-XASTHUR, du misérabiliste plein écran. 16/9ème. Bref, on est paumé, Kanwulf nous gonfle et fait de plus en plus de la merde.

Enfin, on est quand même là, devant un 5ème album qui ne nous dit rien. NARGAROTH est devenu mauvais, inutile, il ne bande plus. Alors, "Semper Fidelis" galette inféconde ?

Non, ce nouveau longue durée d'un des leaders du black allemand n'est pas un chef-d'œuvre. Oui, comme son prédécesseur, ce nouveau longue durée s'adresse aux true. Pourtant, ce nouveau longue durée tombe plutôt bien. Car le black a de plus en plus souvent besoin de se régénérer pour éviter de sombrer. Et après le dépressif, après le naturaliste revient l'ultra-violent. Un ultra-violent qui zieute allègrement du côté des pires suppôts du Diable nés en orient. Ce son de guitare, ce linéaire odieux, cette voix saturée à l'extrême, c'est СЫНЫ СЕВЕРА (autrement connu sous sa traduction SONS OF NORTH), le plus immonde des représentants du black russe, le plus haineux, le plus sale, le plus détestable. Une esthétique de la haine totalement délaissée par les meilleurs élèves de ces dernières années. NARGAROTH vise le pire, les crachats de sang, les molestations en lieu public, les coups de rangers dans la gueule. NARGAROTH atteint le pire et c'est un bon point.

Mais en jouant la carte du dégueulasse et du malfaisant, ce cher Kanwulf sait qu'il a déjà perdu la partie. Sans même parler de ce СЫНЫ СЕВЕРА qui peine à gagner un auditoire intéressé par autre choses que des idées politiques de gamin frustré, tout l'argumentaire développé ici a déjà été pensé chez DARKTHRONE en 1994. Un petit plus sonore, de l'hyper abrasif mais on en reste là. Il y a pourtant de l'idée, Kanwulf a décidé de nous refaire le coup des bandes originales de films glauques, des chants grégoriens venus de loin (ces petits plus qui nous faisaient croire au génie de "Herbstleyd"), tout ça éparpillé un peu partout afin de couper une impression générale très horizontale. Autrement dit, tous les titres black sont pareils, l'égalisation tire vers la saturation permanente de toutes les fréquences.

"Prosatanica Shooting Angels" représentait tout ce qu'on n'aime pas dans le raw black, "Semper Fidelis" se situe un peu au-dessus. Plus extrême encore, plus linéaire encore, donc meilleur. Le jusqu'auboutisme est un plus, il vaut ici une étoile. Un plus un égal deux.