« Witchcult Today », c'est un rêve, un rêve de gosse. Celui de Jus Oborn plus particulièrement: pouvoir, avec du matos vieux de trente ans, réaliser la bande-son de son film d'épouvante idéal. Le groupe remercie d'ailleurs au passage Jean Rollin et Mario Bava, incontournables sources d'inspirations. En fait, tous les thèmes que le cinéma de la fin des années 60 compte de plus horrifiques sont réunis sur cette sixième cérémonie funèbre orchestrée par les grands prêtres du doom larvaire. On pioche donc allègrement dans les coffres poussiéreux de la Hammer ou du côté des maîtres du giallo baroque. En résulte un concept-album des plus étonnants.

On savait le groupe appliqué à ne jamais servir deux fois le même brouet, quitte à risquer la baisse de régime (« We Live »). « Witchcult Today » ne fait pas exception à la règle. Pire, rien de ce que l'on trouvera ici ne viendra nous rappeler les atmosphères putrides de « Dopethrone » ou les coulées magmatiques de « Let Us Prey ». Ou à peine.
Misant presque exclusivement sur les ambiances, le collectif du Dorset donne dans l'incantatoire, le rituel, sans pour autant nous resservir les frasques indigestes de « Eko Eko Azarek ». « Witchcult Today », le morceau-titre, permet d'apprécier tout le côté glauque de l'affaire et le retour des riffs bien sentis, mais mon dieu que tout ça manque de punch ! Si le côté vieillot confère un cachet et un charme certain aux compositions, on versera une larme en pensant au son bien gras et puissant de jadis, de même qu'aux vocaux haineux de Jus Oborn qui se font moins inquiétants et apocalyptiques, même si les thèmes abordés restent globalement les mêmes.

Vouloir recréer à tous prix une atmosphère 60's (voir 70's) a ses avantages et ses inconvénients. Ainsi, « Dunwich » rappellera avec une certaine satisfaction le HAWKWIND de « Time We Left This World Today », signe que le groupe affirme plus que jamais son côté psychédélique, mais fait pâle figure à côté d'exercices de lourdeur plus convaincants comme « Barbarian » ou « Master Of Alchemy ». Un fait à intégrer pour pouvoir apprécier le nouveau visage du groupe: plus question ici de course à « qui sera le plus pachydermique » mais plutôt « comment être dans l'esprit aussi proche que possible du premier BLACK SABBATH ». Les élucubrations d'Ozzy en moins certes. Et Jus n'est pas Tony, mais il faut reconnaître que le groupe s'en sort plutôt bien. Pour preuve, ce « Satanic Rites Of Drugula » plus qu'honorable ou « Saturnine », bel effort de conclusion.
Entre, le niveau varie, allant du sympathique (« The Chosen Few » où Jus lance un inévitable « legalize drugs and murder » et « Torquemada 71 » qu'on aurait aimé moins convenu) à l'anecdotique (« Black Magic Rituals & Perversions » qui à défaut de passionner contribuera à créer une atmosphère macabre à souhait).

Avec le temps, la horde d'amateurs de plans pesants et aussi gracieux qu'un éléphant toxico slidant sur le bord d'une falaise avait fini par apprécier le côté polymorphe de l'entité britannique. Sur « Witchcult Today », le doppelganger frappe à nouveau, mais pas là où on l'attendait.
Et c'est ce qui fait la force d'ELECTRIC WIZARD, cette capacité à étonner, encore et toujours, certes pas forcément en bien, mais le fait est suffisamment rare dans l'univers passablement dogmatique du doom pour être signalé.