La Tchécoslovaquie, dont je ne retiens aujourd’hui que la partie occidentale, connaît plus que son lot de figures célèbres. Le couple infernal Jan Masaryk-Eduard Benes, artisans de l’implosion de l’empire Austro-Hongrois et parents de la démocratie, la blonde Nikki Sun, l’éternel candidat au Prix Nobel Milan Kundera, la brune Laura Lion, le prince de l’animation Jan Svankmajer, la blonde et anale Anastacia Christ, le plus modéré que communiste Alexandre Dubcek, la blonde, anale et siliconée Stacy Silver, le littéraire, révolutionnaire et président Vaclav Havel, la brune et sculpturale Angel Dark, Jan Sverak et son terriblement mimi et oscarisé Kolya, la doyenne Laura Angel et ses sourcils exagérément épilés, la féministe et avant-gardiste Vera Chytilova, la toujours brune Simone Peach, l’Hercule de la nouvelle vague du cinéma Praguois, l’hollywoodien et plus connu de la liste (malgré la popularité grandissante et justifiée d’Angel Dark et grâce à l’oubli indéfendable du germanophone Franz Kafka), Milos Forman.

Au rayon musique classique, un colosse domine les débats, Anton Dvorak dont quelques extraits de la Symphonie Du Nouveau Monde ont pénétré les oreilles de tous.

Et en metal, il y a ROOT, qui commence à peine à percer dans le milieu bien que ses premiers ébats gravés sur disque datent de plus de quinze ans.

La première lecture de The Book se révèle ardue, le vocabulaire empruntant à des poésies diverses, parfois antinomiques et tous ceux qui espéraient ouvrir les pages de la nouvelle sensation black en sont pour leurs 15 euros.

The Book n’est pas du black? Du protoblack alors. Ce mélange de punk, de thrash, de death et de CELTIC FROSTismes patiné à la sciure de cadavres. Toujours pas.

Peut-être simplement du death, alors? Ben voyons!

Du thrash? Non, pas un riff.

Trêve d’énigmes, le volumineux ouvrage se veut superficiellement heavy metal, plonge plus profondément dans une ambiance de rock sombre aux guitares très saturées, creuse le terreau dark wave mais baigne avant tout dans un jus mystique incroyablement savoureux. L’hybride pourrait être laid, sa mélodicité touche au contraire au sublime, le violoncelle et l’ocarina ne faisant qu’ajouter quelques touches ravissantes, nullement encombrantes à une œuvre d’une séduction déjà remarquable. Et si chaque plage transpire d’émotions propres, de l’immédiatement addictif et riffeux premier titre à Darkoutro…toccata – prestissimo dont l’appellation étrange coïncide avec un délire expérimental que ne renierait pas un Stockhausen, écoutez le dyptique Corabeu, maître morceau inoubliable, pour ressentir instantanément vos premiers émois érotiques.

Erotiques car The Book vous entraîne dans un bal galant aux contours dangereux. Les partenaires de quadrille y sont sensuelles et perverses, le regard est attiré de toute part par des lèvres à la pulpe humide, le galbe parfait de postérieurs troublants, des jambes infinies, des poitrines aux proportions idéales... La volupté indécente de la salle frise l’obscène. Le climat devient charnel, l’atmosphère licencieuse, le charme du lieu mue en une excitante perfidie. Et derrière ce décor trompeur dans lequel les plus beaux corps s’entrelacent, parfois dans des combinaisons contre-nature, interdites et électrisantes, le maître du jeu veille. Big Boss, grand prêtre luciférien, veille sur le bon déroulement de la cérémonie de son omnipotente voix de stentor. Son discours sentencieux commande vos moindres faits et gestes. Il vient de vous mater par le sexe. Votre être est désormais condamné à la luxure éternelle au son de cette messe pornographique à l’intensité démoniaque.