Contextualisons. Nous sommes en 2016. Cela commence à faire belle lurette que CHILDREN OF BODOM n’a rien sorti de bien excitant, ENSIFERUM peine à retrouver son souffle, "Time I" de WINTERSUN a quatre ans dans les guiboles, et NORTHER a splitté. Seul KALMAH reste dans la course avec son "Seventh Swamphony" de 2013, mais cela est tout de même un peu maigre pour la Finlande, terre pourtant fertile d'un Death Mélo aussi fédérateur qu’incontournable. Pourtant, dans l’ombre de ces géants fatigués et depuis une décennie, un autre quartet finlandais tente de se frayer un chemin pour apporter une nouvelle fois sa pierre à l’édifice… Et avec la ferme attention de le faire en grandes pompes !

WHISPERED déboule ainsi avec un troisième LP, après un "Thousand Swords" sans grande prétention qui s’est vu éclipser par un "Shogunate Macabre" bien plus abouti. Et j’invoque immédiatement un disclaimer : si vous aviez déjà marre du Metal à thème, car les pirates, les chevaliers, les dragons, ou les vikings ça vous gonfle… Pas de bol, vous vous apprêtez à parcourir désormais le fabuleux univers samouraï ! Mais attention, je vous parle de Metal d’Asie de l’extrême Est traité par du Finlandais pur jus, attendez-vous donc à ouïr du sample recyclé de "Samurai Assassin" dans tous les sens, à vous prendre des coups de sabre en bambou dans la tronche jusqu’aux limites que les clichés nippons tolèrent ! J’exagère, nous sommes tout de même bien loin d’un sketch insoutenable de Michel Leeb, mais pour la pertinence historique, on repassera.

Du reste, ce "Metsutan" possède la panoplie complète pour assurer une investiture honnête dans cet univers : un katana, un kabuto, un hitatare, un hakama… Oh ça va, si on peut plus rigoler ! Non, nous avons le droit à une première moitié d’album truffée de riffs redoutables, de soli aussi véloces que catchys, et d’une intensité qui ne retombe jamais. Il n’y a aucune retenue jusqu’à "Kensei", où WHISPERED ne se prive pas de faire des appels du pied plus que flagrants au COB des grands jours. Si Laiho avait encore été en mesure de sortir les mêmes pépites qu’en son début de carrière, on aurait frôlé le hors-jeu tant les similitudes de composition et les sonorités sont flagrantes. Flatteur que je suis.

La seconde moitié de l’album est plus nuancée, avec davantage de plan acoustiques et sereins, permettant à une voix-off à la RHAPSODY de poser quelques vers profonds, que je ne me prive pas de vous citer :

"For the fallen and those who keep on returning to battlings
One cup of tea, the deer scarer’s silent note
Harmony within withdraws the restless soul
Riding till the ancestors holler from far beyond" - "Victory Grounds Nothing"

So deep. Evidemment que c’était ironique ! On était à deux doigts d’avoir des haïkus, on a eu chaud.
Quoi qu’il en soit, cette deuxième partie démontre que WHISPERED évolue aussi facilement dans les titres coups de poing que dans des éléments plus longs et élaborés, suivant certes un schéma tout ce qu’il y a de plus classique façon intro/développement/conclusion, mais jouissant d’un capital sympathie inépuisable. L’omniprésence d’instruments traditionnels en fond (shamisen, koto, shakuhachi) est une pirouette habile pour conserver l’aspect japonisant, même lorsque le quartet s’éloigne des sentiers battus du pays au soleil levant pour attaquer des phases de pur Mélodeath à la WINTERSUN sur les très réussis "Tsukiakari" et "Bloodred Shores Of Enoshima", sortes d’intermédiaires entre ce que pouvait proposer l’album éponyme et "Time I" de la bande à Jari.

Il y a donc à boire et à manger dans ces "chansons du vide", qui à force d’écoutes sauront révéler leur potentiel, plus profond que les simples et flagrantes inspirations de surface laissent présager au cours de cette brève heure. Bien que le chant de Valjakka soit aussi invariant qu’une mer calme au regard de leurs anciennes productions, "Metsutan" est indiscutablement l’oeuvre la plus mature et polyvalente que WHISPERED a su proposer jusque-là… Au point que depuis, nous n’avons pas eu le moindre petit single à nous mettre sous la dent. Quelle tristesse, car dans l’ombre des grands noms, WHISPERED mérite qu’on y jette une oreille, indéniablement.

Morceaux préférés : "Strike !", "Tsukiakari", "Kensei".

N.B. : En revanche, en ce qui concerne l’esthétique promotionnelle du groupe, par pitié, on se croirait dans une pub pour le prochain Mortal Kombat… Cliché, quand tu nous tiens !