Avec leur tout premier album intitulé "Point No.1", CHEVELLE avait reçu un peu d’exposition médiatique. Ayant signé avec la maison de disque Squint, les frères Loeffler ont rapidement compris l’impact de signer sur un label plus ou moins fiable et des conséquences qui vont avec.

En effet, Squint avait deux particularités majeures. La première était que cette maison de disque avait la réputation de signer des groupes du genre CCM (Contemporary Christian Music). Si au premier abord cette mentalité n’apporte pas d’enjeu majeur, cette façon de faire a amené CHEVELLE à s’aliéner de nombreux amateurs de Metal. Encore aujourd’hui, plusieurs auditeurs pensent que les frères sont, non seulement croyants, mais également très pieux.

Malgré tout, ce ne fut pas un truc qui les empêcha de participer à des festivals comme celui de Wacken ou la Ozzfest. Seulement voilà : certains mouvements religieux ont rapidement critiqué les deux frères. Ce qui est particulièrement ironique lorsqu’on sait à quel point Ozzy aime terminer ses spectacles à grands coups de "God Bless You All".

L’autre problème majeur, et non des moindres, c’est que Squint était proche de la faillite, en plus d’être empourpré dans des batailles juridiques sans fin. L’inquiétude gagna rapidement les gars, qui se demandaient même si le groupe allait survivre à tout ça. La tournée promotionnelle était parsemée d’embûches et non des moindres.

Et c’est là qu’Epic Records entre en jeu. Ayant flairé la bonne affaire, ils signent CHEVELLE dans leur écurie. Un geste qui aidera grandement le groupe à se propulser vers d’autres cieux. Pour plusieurs, "Wonder What’s Next" est vu comme le tout premier album de CHEVELLE. Le nom de la galette est d’ailleurs directement lié à cette période trouble où l’incertitude était totale et l’anxiété omniprésente. En plus d’ajouter à l’instabilité, c’est à Vancouver (au Canada) que débute l’enregistrement du second essai… en septembre 2001. Vous me voyez venir n’est-ce pas ? Quelques jours plus tard, l’attaque du 11 septembre ébranlera à peu près tout le monde. Malgré tout, les frères enregistrent l’album en tout confort en prenant le temps de produire des chansons qui représentent plus leur vision.

"Wonder What’s Next" se veut donc complètement différent de son prédécesseur, autant sur le plan de la production que de la composition. Premièrement, le son est typé moins "garage", moins "sous-produit". Deuxièmement, la production est volontairement plus Heavy, plus lourde que "Point No. 1". Les moments d’égarements sont donc réduits au minimum et on est moins dans l’expérimentation. Étant un trio, la basse se veut omniprésente et beaucoup plus audible que sur la plupart des albums.

La voix de Pete fait des merveilles, passant du chant aérien vers des cris plus gutturaux de bonne facture avec une facilité assez déroutante. Malheureusement, et c’est là que le bât blesse, la structure des morceaux est souvent la même : cri et chant pendant les couplets, accompagnés de chant émotionnel pendant les refrains. La redondance est donc de mise, ce qui est dommage, car on sent que les gars tiennent quelque chose. Seuls les deux derniers titres sortent du moule. "An Evening With El Diablo" possède une structure plus progressive et amène une fin uniquement instrumentale. Un (presque) six minutes de musique endiablée (ha ha trop bon mon jeu de mots). On termine le tout avec "One Lonely Visitor" qui est un morceau seulement acoustique. Au départ, le titre que l’on retrouve sur l’album n’était que la démo et devait être retravaillée et réenregistrée, mais les gars ont tellement aimé l’aspect "épuré" qu’ils ont décidé qu’au final, ils gardaient le morceau tel quel. Un bon choix d’après moi, car ça casse totalement avec les structures et les sonorités précédentes.

Il ne reste maintenant qu’à parler de "The Red", le premier gros hit du groupe, qui roule toujours sur certaines radios de nos jours. Il représente tout ce que CHEVELLE est : tantôt rentre-dedans, tantôt aérien, mais toujours en émotion. S’il ne devait rester qu’un morceau des frères Loeffler, ce serait celui-là.

"Wonder What’s Next" est donc la première galette où les Américains prennent leurs aises et semblent savoir où ils vont avec leur musique. Maintenant libéré de Squint, CHEVELLE ne peut que monter vers d’autres cieux et jouer en première partie de groupes déjà bien établis. Le meilleur est à venir.

Morceau préféré : "The Red".

Titre émotif : "One Lonely Visitor".