Totalement absorbé par cet artwork magnifique proposé sur cette pochette du plus bel effet, j’avais une si grande hâte de plonger dans cet album lorsqu’il s'est présenté à moi, de m’en sentir immergé, de me laisser envahir, d’en être noyé jusque dans les poumons et de plonger dans ce lit de cendres où la vie brûle, où la vie meurt, et s’éparpille.

"Let Me Drown With You" (= laisse-moi me noyer avec toi) inaugure une série d’opus consacrée à la crainte de l’effondrement et à la lutte complexe face au désespoir. Autobiographiques, ces cinq albums parus en seulement deux petites années constituent le ressenti chapitré des émotions de son auteur : Sergio González Catalán. Ce dernier tentant de sublimer le deuil et la perte, l’attachement et la nostalgie de son père récemment décédé. L’album est conçu en deux parties, la première court jusqu’à l’instrumentale "Passion" et se nomme ‘Life, Dreams, And Passion’. L’ensemble des titres est marqué par des sentiments tels que la tristesse, la colère et la douleur, tandis que la seconde ‘Death, Grief, And Transformation’ semble dessiner comme une main tendue vers la lumière. Les titres sont davantage porteurs d’émotions changeantes, tour à tour euthymiques et sereines. Le deuil parait muter et se digérer, le déni succède à la colère, la tristesse lui emboîte le pas et paraît s’effacer finalement au profit de la résignation. L’acmé apparaît alors par l’intermédiaire de la postlude "Transformation" qui porte bien son nom. C’est le titre qui sèche les larmes, disperse les brumes et permet d’entrevoir le soleil et la vie qui imperturbablement suivent leur cours.

Écoutons religieusement le sublimissime "Dream The Pain Is Gone", au riffing qui vous attrape le cerveau et vous le retourne, aux incantations de Sergio, à son growl profond, à ces mélodies tenaces qui s’emparent de vous pour vous faire frissonner intimement. RISE TO THE SKY prodigue sur cet un album un Funeral Doom des plus beaux qu’il m’ait été d’entendre. L’apparition d’un violon lancinant sur plusieurs titres entame l’âme, absorbe les derniers restes de lumière encore présents dans l’atmosphère, pince le cœur et potentialise la tristesse et son expression, comme sur le titre sublime qu’est "Liebestod". D’une manière globale, la première partie a ma préférence tant elle recèle une quantité de riffs imparables, majestueux et doux. La seconde est davantage mâtinée d’éléments majeurs lumineux.

Recueil total du retour de l’espoir et de l’enchantement, RISE TO THE SKY se rapproche un peu plus encore sur cet album des travaux de SHAPE OF DESPAIR. On peut percevoir cette densité qui accompagnent les riffs, le travail harmonique fin et précieux auxquels les Finlandais nous ont habitués. La production de "Let Me Drown With You" est somme toute aussi l’un des points forts, à la fois puissante et claire, au rendu très transparent et résolu. Les nuances et les détails apparaissent au grand jour pour le bonheur des écoutes. Sergio, docteur en économie et producteur (il est le propriétaire du label Tragedy Productions) nous offre un opus libératoire et nous fait boire son calice jusqu’à la lie. À la lumière de ses autres projets musicaux forts intéressants, battant davantage le pavé du Black Metal, que sont notamment WINDS OF TRAGEDY et MY DEAREST WOUND, qui ont pris forme et ont donné naissance ces deux dernières années à d'autres albums, Sergio González Catalán nous montre à quel point l’expression même de sa vie se confond à celle de son œuvre, prolifique, majestueuse et déchirée.