Et ben revoilà donc les SKUNK ANANSIE sur NIME !

Aussi, te vois-je lever un sourcil circonspect, ô cher lecteur fidèle mais néanmoins légitimiste : C’est pas du gros Metal des familles qui tâche ce truc ! Trôner à proximité d’un IRON MAIDEN, du PRIEST ou encore d’un SCORPIONS voir d’un METALLICA… C’est du grand n’importe quoi et franchement, tout fout le camp sur ce site !

Quand bien même n’aurais-je pas saisi l’opportunité de m’attaquer à la discographie de ces Anglais sauvagement barrés en profitant lâchement d’une toute première kro signée par l’honorable Zionleemasterseb en 2010, je t’inviterai à aller profiter des SKUNK en concert (ou à défaut, d’aller te faire gifler pour pas cher devant leur concert donné en 2019 au Pol'and'Rock Festival et légalement visible sur TonTube préféré !) pour relever le volume impressionnant de pâté envoyé en frontal par Miss Skin et ses compères sur une scène xxl et devant un tapis vivant de public ! Fort de ce riche assortiment de charcuterie ornant ta coiffure, tu pourrais ainsi aller coller tes oreilles encore sanguinolentes sur la discographie primo-abrasive de ce combo d’écorchés que personne n’avait vu venir et de leurs succès planétaires ayant fait trembler la sphère du Pop Rock Metal alternatif ("Paranoid & Sunburnt" en 1995, "Stoosh" en 1996 puis "Post Orgasmic Chill" en 1999) jusqu’à leur disparition de l’espace connu en 2001.

Mais rassure-toi cher amateur inquiet ! Car après une absence des écran de contrôle de près de dix ans, le quartet remet (enfin !) les couverts avec une compil diablement revigorante "Smashes And Trashes" (2009) incluant des titres inédits sur lesquels l’organe vocal extraordinaire de Skin s’avère être toujours sans aucune limite visible, la guitare d’Ace toujours aussi sacrément acérée, la basse de Cass toujours aussi ronde et groovy à ravir sans parler du marteau-pilon Mark derrière ses fûts ! Les SKUNK, ce n’est pas de la Pop, ce n’est pas vraiment du Metal non plus, ni du Grunge, sans parler de Rock proprement dit, ni même de la Funk… Les SKUNK sont les SKUNK qui labourent allègrement leur musique et déchirent sur scène : et ils sont sur NIME. Un point c’est tout !

Tu m’objecteras alors avec une certaine justesse, que la première vraie galette sacrant ce comeback ("Wonderlustre" – 2010) s’est avérée carrément molle du genou, voire flirtant dangereusement avec de la Pop moyenne gamme, qui, même survitaminée par le talent du combo, ne valait pas tripette et qu’à ce prix-là, ce n’était vraiment pas la peine de faire un tel tapage pour proposer une musique amputée de sa partie la plus crunchy : nos énergumènes assagis auraient ainsi pu rester à pioncer tranquillement dans leurs tubes cryogéniques, que ça n’aurait manqué à personne… et tu n’aurais pas foncièrement tort. Conscients de ces remontées de bois vert émises par des fans plus volontaires pour porter Skin dans la fosse du live en hurlant les paroles qu’à tortiller leur popotin dans leur salon un soft drink à la main, les Britanniques vont-ils se retrousser les manches pour retourner au charbon ou décider d’ouvrir une boutique de fringues hype au cœur de Piccadilly ?

Paru en septembre 2012, ce cinquième opus studio titré "Black Traffic" semble répondre très clairement à ces interrogations : ce n’est pas demain que j’irai me faire faire des piercings pubiens à Piccadilly !
Porté par une (jolie) pochette illustrant les musiciens juchés ou escaladant une énorme tête squelettique de bouc (du moins un truc s’en rapprochant !) ou les tons sombres dominent, SKUNK ANANSIE donne ici d’entrée de jeu le sentiment d’avoir tourné la page d’un "Wonderlustre" arc-en-cielisant dont les jolis tissus étaient emportés par le vent ! Côté musique, ce retour à un art plus brut, plus percutant et plus électrique est concrétisé par un format ramassé mais volontairement généreux (onze titres qui raffalent sur 38 min !) par lequel les SKUNK hurlent à la planète entière :

1. Qu’ils ont bien entendu les appréhensions des fans,
2. Qu’ils sont encore foutrement vivants,
3. Qu’ils en ont encore sous la pédale !

Sans tomber dans le Power Metal boosté à la double grosse caisse, Skin et ses complices durcissent quand même un chouïa le ton pour répondre aux inquiétudes de ceux qui les voyaient déjà disputer les charts à des combos de Pop rose bonbon. À l’image d’un "I Will Break You" bien rentre-dedans qui ouvre très honorablement le bal de ce "Black Traffic", les Anglais n’hésitent pas à monter dans les tours pour indiquer qu’ils n’ont rien perdu de leur hargne primordiale : qu’il s’agisse du défoulant "Satisfied ?" mené tambour battant (et où l’ami Ace case même un embryon de solo !) ou du court mais barré "Sticky Fingers In Your Honey" au rythme bien soutenu enjolivé par des chœurs jouissivement psychoïdes, SKUNK ANANSIE tabasse avec allégresse et se prépare de belles séquences live qui raviront ses fans ainsi que les ahuris qui ne les connaissent pas sous cet angle !

Plus que vivants, les SKUNK vont jusqu’à retrouver sur certains titres une science de l’arrangement ainsi qu’une grâce de la mélodie qui n’est pas sans évoquer les hits de la grande époque : c’est l’effet ressenti avec le très aiguisé "I Believed In You" dont la linéarité ne gâche en rien la redoutable efficacité ou du plus nuancé "Our Summer Kills The Sun" (qui n’est pas sans me rappeler au niveau de sa ritournelle un certain "Summer Son" de TEXAS) et à sa jolie montée en puissance sur laquelle les musiciens s’amusent avec classe.

Les SKUNK sont-ils de facto condamnés à vivre une lente agonie dans l’ombre de leur (glorieux) passé ou ont-ils encore du jus pour nous faire vibrer, voire nous surprendre ? Ben un peu les deux mon Général… Agréable, l’écoute de "Black Traffic" ne provoque cependant pas un choc frontal par lequel on pouvait espérer retrouver le combo d’allumés qui a pondu un "Brazen" ou un "Tracy’s Flaw" ! L’énergie et des compos plus brutes sont bien à l’ordre du jour mais les Anglais sont plutôt dans une phase de stabilisation que de conquête hurlante. Personnellement, je reste persuadé qu’ils en gardent sous la pédale… Mais souhaitent-ils encore le donner ? Vaste sujet…

En outre, "Black Traffic" contient également des composantes à l’appréciation variable mais qui me posent (quelques) questions : qu’il s’agisse des effets boîte à rythme ou du refrain particulièrement insipide de "Downing", du couplet minimaliste de "This Is Not A Game" ou même d’un "Spit You Out" où les SHAKA PONK en mode invités restent désespérément sages… Le gang de Miss Skin propose indiscutablement ici des compos qui se laissent écouter mais qui restent somme toute assez classiques avec un aspect lissé qui pourrait en décourager quelques uns parmi les plus fervents du style et de la folie que les SKUNK ont si bien su y attacher par le passé. Néanmoins, si l’objectif premier des Anglais était de faire oublier un "Wonderlustre" jugé trop guimauvesque, alors le contrat est rempli : SKUNK ANANSIE est bien revenu de son exil ce coup-ci !

Engoncé dans mon plus chouette t-shirt 3D col rond vert clair avec mon jean collant violet qui me serre les chevilles, je m’appuie négligemment sur le comptoir de mon magasin Hype & Street Wear venant d’ouvrir sur Coventry Street, je me demande bien ce qui m’a pris d’afficher en vitrine une gigantesque image de la couverture de "Black Traffic" que j’ai barbouillé d’un 3/5 hiéroglyphique… ça va sûrement attirer le chaland ! Et je pourrais toujours dire que s’il n’avait tenu qu’à moi, le "Wonderlustre" aurait écopé d’une note un cran en-dessous. Mais bon, il fallait bien l’ouvrir ce magasin et l’ancien proprio a depuis tiré sa révérence.

- pour retrouver de bonnes sensations : "I Believed In You",
- pour l’intro rentre-dedans : "I Will Break You",
- pour l’art de la nuance : "Our Summer Kills The Sun".