Propulsé nouvelle coqueluche de la scène française, POGO CAR CRASH CONTROL n’a pas usurpé ce titre honorifique, tant son dernier opus "Fréquence Violence", allié à des prestations scéniques enflammées aux quatre coins de l’hexagone méritent un respect certain. Et comme il est gravé dans les tables de la loi NIMEsques, conservées précieusement dans la bibliothèque secrète du Grand Maître du Metal juste à côté du Nécronomicon pour les nuls, il m’appartient à présent de revenir sur la discographie du combo francilien, ayant eu le privilège d’ouvrir leur page sur le site. Alors, que vaut donc "Tête Blême", deuxième LP de Lola et sa bande ?

L’album est un condensé de fraîcheur, de spontanéité, voire même de naïveté. Leur style est inclassable car totalement instinctif, non réfléchi, pour le meilleur comme pour le pire. Quand ça tombe dans le mille, c’est absolument parfait. Mais certains titres semblent en revanche par contraste maladroits, voire limites feignants notamment dans la recherche mélodique, même s’il commence à se dégager une certaine science du refrain qui fait mouche. La galette constitue le parfait lien entre les origines Punk Rock, assez proches du Hardcore, de leur essai séminal ("Déprime Hostile") et la tangente Metal prise plus récemment et qui les a amenés à gaver la scène de la Warzone lors du Hellfest 2022.

Les hostilités sont lancées avec "L’Odeur De La Mort", qui ouvre le bal sur un registre assez représentatif de ce que vous pourrez trouver sur ce disque. Les influences Punk se traduisent notamment à travers l’aspect très direct des compositions, mais surtout aussi les voix d’Olivier Pernot, qui pourront en rebuter certains aux premiers abords, avec un côté qui évoquera tantôt les CLASH dans les graves, ou du plus typiquement Hardcore dans les aigus. Mais quand celui-ci vient se poser sur des riffs typiquement Metal comme sur "Le Ciel Est Couvert" ou "L’Histoire Se Répète", ça fait bingo dans ma tête, sans pouvoir rationaliser clairement l’effet avec des mots. Mais soyons clairs, à AUCUN moment la formation ne propose du Metalcore, ce qui est du reste assez paradoxal au regard du mélange des genres ici proposé.

Cette noirceur nouvelle et ce durcissement du son au regard de "Déprime Hostile", justifie à mon sens pleinement la flatteuse réputation de P3C (c’est leur petit nom). On retrouve également ces éléments dans les textes, bien plus cyniques et torturés que par le passé. Le tube de l’album "Qu’est Ce Qui Ne Va Pas ?" en est une brillante illustration, tant au niveau des paroles introspectives jetées en mode schizophrénique par le chanteur, que du rythme balancé par les frangins Péchinot (Louis derrière les fûts et Simon à la gratte) et Lola Frichet, figure montante de la scène Metal avec son association « More Women On Stage » prônant une présence plus féminine parmi la communauté Rock, que ce soit devant ou derrière les consoles. Au-delà de cet élément plus revendicatif que musical, il faut aussi avouer que c’est une putain de bassiste et qu’il est difficile de résister à la formule, même avec toute la mauvaise foi du monde.

Production et tracklist sont superbement équilibrées et parfaitement réfléchies, au contraire de la musique de P3C qui elle vient des tripes. Ainsi, le title-track, terriblement addictif, et "L’Intérieur De Ton Corps" offrent-ils un écrin parfaitement adapté aux lignes de basse lancinantes et une pause bienvenue niveau bpm, globalement plus contenus que ce à quoi nous étions habitués. Au vu du résultat, notamment lorsqu’il embrasse la voie des gros riffs qui tâchent, on reste tout de même un peu frustrés une fois la fin de "Tête Blême" arrivée, même si celle-ci se fait sur un "Trop Défoncé" bien jouissif avec son final Punk visant bien la jugulaire. On a parfois le sentiment d’écouter du SUM 41 sur sa période plus Metal, en moins abouti et surtout avec un côté franchouillard qui pourra en agacer plus d’un(e). Le revers de la médaille sans doute, pour oser s’exprimer dans notre langue, chose assez rare de nos jours.

La formule n’est donc pas encore tout à fait au point mais confirme le potentiel entrevu sur "Déprime Hostile". Douze pistes pour 34 minutes, en tout cas P3C ne lambine pas en route et n’y va pas par quatre chemins, ce qui est tout à son honneur. Il faudra donc attendre la fameuse troisième offrande pour pleinement valider le talent de POGO CAR CRASH CONTROL. Là où tant se sont plantés sur cet exercice ô combien délicat, le groupe trouvera sa personnalité et le juste équilibre entre toutes ses influences, pour probablement s’installer durablement comme une valeur sure de la scène Metal/Hardcore française.