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METAL PROG  |  STUDIO

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 Pain Of Salvation (274)

PAIN OF SALVATION - Panther (2020)
Par FREDIAN le 14 Février 2023          Consultée 2043 fois

À l'image de son charismatique leader, l'histoire de PAIN OF SALVATION (POS) est tourmentée. Musicalement, trois chapitres majeurs se dessinent. Ils reflètent en quelque sorte les états d'âme et d'esprit de Daniel à travers SON groupe et corroborent les évolutions du line-up. La construction/l'enfance (jusqu'à "Be") où le groupe pose ses repères et fort d'une certaine stabilité grandit jusqu'à s'établir comme la nouvelle pépite du Metal Prog. La rébellion/crise d'adolescence ("Scarsick" et les "Road Salt"), qui verra de multiples changements de personnel (notamment le départ de tous ses acolytes "d'origine"), où Daniel emmène volontairement son groupe vers d'autres horizons pour fuir l'étiquette Metal Prog. L'introspection/la prise de conscience adulte, où le nouvel équilibre du line-up semblait propice à relancer un groupe désormais mature ("Falling Home" et sa revisite de son passé sous un jour nouveau et cette trilogie autobiographique en marche ("to be continued..." dans le livret) qui, tout en se rapprochant de son style d'origine, en synthétise les différentes époques. Las, il faut croire que rien ne sera jamais évident chez POS et le départ fracassant de Ragnar Zolberg juste après la sortie de "In The Passing Light Of Day" ("ITPLOD") jeta le trouble sur son avenir. D'autant que Gustaf Helm dut, à son tour, quitter le groupe pendant les sessions de "Panther" pour soigner son burn out douloureux. Pour couronner le tout, la pandémie de covid-19 vint compliquer l'accouchement de ce dernier opus.

"Panther" sort donc trois ans après "ITPLOD" et en poursuit l'une de ses thématiques. L'album est évidemment conceptuel (au passage notons le retour du chapitrage impair si cher à Daniel, une première depuis "Be") et une nouvelle fois très personnel (Daniel a tout écrit et y joue quasiment tout, seul Léo a véritablement voix au chapitre, voir line-up) puisqu'il y développe le propos entamé sur "Full Throttle Tribe" ("FTT") présent sur "ITPLOD". "Panther" explore à sa manière (métaphore animale) la notion de marginalité au sein de la société (vous en trouverez une analyse détaillée en appendice).

"Panther" s'inscrit aussi dans la continuité graphique de "ITPLOD". On y retrouve le tatouage tribal. Daniel y fait donc le lien avec le thème de la tribu qui lui est cher ("FTT"), le moto de l'album étant le suivant : "This world is broken, we do not offer you a fix, we offer you a tribe". L'artwork d'André Meister, façon BD, sied particulièrement bien au concept. La BD permet de dresser des portraits symboliques et simplifiés du monde et peut exprimer à leurs travers des problématiques réelles complexes. C'est exactement le parti-pris thématique de "Panther".

Musicalement, "Panther" veut surprendre mais une certaine continuité sonore avec "ITPLOD" nous laisse en terrain connu. De plus, nous étions prévenus puisque le choix des singles s'était focalisé sur les titres les plus singuliers de l'album : "Accelerator" et ses influences Electro/Indus, "Restless Boy" et son ambiance Trip Hop et son jeu avec le vocodeur, "Panther" et son chant rappé, son traitement sonore des différentes couches de guitares et ses petites touches Electro. D'autant qu'outrepasser les frontières de genres n'est pas nouveau chez POS. Rappelez-vous les escapades Disco ("Disco Queen") et Pop déjantée ("America") sur "Scarsick", la composante Folk historiquement présente (e.g. "Chain Sling", "Imago"). Quant au phrasé Rap, il est là depuis "Entropia" sous diverses formes (e.g. "Stress", "Used", "Diffidentia", "Scarsick", "Spitfall"). Il y a toujours eu cet élément de Fusion chez le groupe qui ne peut cacher l'influence de FAITH NO MORE (e.g. "Beyond The Pale").

Ici, c'est l'Electro qui est plus mis en avant (pas fondamentalement nouveau non plus, cf. "Welcome To Entropia"). Et si les premières écoutes peuvent déstabiliser, je dois bien reconnaître que le talent de composition de Daniel rend le tout très cohérent. Si "Accelerator" et "Panther" (j'y reviendrai) comportent un effet tubesque (notamment par leurs refrains entêtants), la petite pépite c'est ce "Restless Boy" trippant au final épileptique (petit bémol sur le son de casserole de la caisse claire toutefois).

"Panther" poursuit un retour (depuis "ITPLOD") à des morceaux plus résolument Progressif dans leur structure rappelant ainsi leur premier chapitre d'existence ("Unfuture", "Keen To A Fault", "Species", "Icon") mais faisant, par petites touches, écho au deuxième ("Unfuture" et "Species" n'auraient respectivement pas dépareillé sur "Scarsick" et le diptyque "Road Salt", l'intro subtile au piano de "Icon" m'a rappelé celle de "1979"). Si "Unfuture" et "Species" sont plus conventionnels, "Keen To A Fault" et "Icon" sont de vraies réussites. Le premier par son parfum Prog Rock 70s et sa ligne de synthé évoquant légèrement le "Sirius" du "Eye In The Sky" de The ALAN PARSONS PROJECT (un album dans le Top 5 de Daniel). Le second, "epic" de plus de treize minutes qui clôt l'album, par sa construction intelligente (le refrain qui reprend la fragilité de cette jolie intro au piano), qui se développe sous forme de boucles itératives (clin d’œil électro sur ce morceau plus brut ?), initiées par ce synthé hypnotique et ces grattes bien Heavy, dont l'une fait la part belle à un superbe solo tout en feeling.

Enfin "Panther" est peut-être l'album le plus diversifié de POS. Outre les trois singles qui jouent avec l'électronique et l'alternatif, et les morceaux plus "classiquement" Rock/Metal Prog, il propose deux accalmies originales dont un "Wait" éthéré (ANATHEMA n'est pas loin) qui met le piano et la guitare acoustique en avant et sur lequel Daniel s'amuse avec l'autotune et quelques bruitages qui servent finalement de fil rouge à l'album, et un court instrumental ("Fur") porté par un banjo Folk. Une manière poignante d'introduire l'image de la "carapace" (la fourrure de la panthère) que "Panther" (le morceau) expose crûment. En outre, l'album est particulièrement bien construit, ses trois composantes majeures (électro/alternatif, Metal Prog, acoustique) se retrouvent savamment alternées. Il nous maintient ainsi en haleine et reste très cohérent de par les différents repères qui le jalonnent (la voix de Daniel, ces petites touches electro, cette dualité organique/synthétique (effet miroir au concept, normal/marginal ?)).

Malgré les indéniables qualités de cet album peaufiné dans les moindres détails (l’œuvre conceptuelle dans son ensemble (thématique, graphique, musicale et sonore) est d'une richesse bluffante), il me manque quelque chose. La musique de POS est ici presque trop travaillée, trop pensée, trop écrite (trop personnelle ?). C'est un sentiment paradoxal car c'est précisément ce que j'adore chez ce groupe mais la petite étincelle qui fait dresser les poils (me) fait défaut. Un exemple. "Panther". J'aime beaucoup ce morceau : le phrasé Hip Hop, les petites touches électro, ce refrain entêtant, ce fuzz tellement approprié, ce silence suivi d'un piano apaisant avant la reprise du refrain tout en contrôle là où on s'attendrait à une explosion. Tout ceci est très bien construit. Presque parfait. Presque. Cette explosion manque. Pas sur le final, cette fin contrôlée est très juste. Mais l'explosion aurait pu/dû la précéder. Peut-être même sous une forme de double reprise du thème principal en "salissant" un peu plus à chaque fois les grattes, sur le schéma du monstrueux "Megalomania" de BLACK SABBATH et en laissant le chant se déchaîner sur quelques growls/cris (Daniel l'a déjà fait, e.g. "Mortar Grind"). Ainsi cette fin apaisée et contrôlée aurait pris davantage d'ampleur, par effet de contraste.

"Panther" est un excellent album (le meilleur depuis "Be" ?) auquel il (me) manque juste ce petit grain de magie. Peut-être est-il trop porté par Daniel Gildenlöw, seul compositeur et (quasiment) instrumentiste à bord. S'il est vain de vouloir comparer les époques, je reste nostalgique de la perfection que l'osmose du premier chapitre discographique du groupe avait tutoyée plusieurs fois et souvent sur des titres co-écrits ("People Passing By" et "The Big Machine" avec Daniel Magdic, "The Perfect Element" avec Johan Langell, "Iter Impius" par Fredrik Hermansson). Le virage stylistique volontaire amorcé par Daniel sur "Scarsick" aura été un point de non-retour quant à cet aspect-là (je n'ai jamais vraiment retrouvé cette magie). Un virage salutaire sur un autre aspect, je le reconnais volontiers, puisqu'il a montré un groupe à l'aise dans d'autres registres qui participent aujourd'hui à sa maturité.

L'édition digibook propose un CD bonus avec les démos de "Panther" et "Keen To A Fault" qui n'apportent pas grand chose, le délire électro-organique "Fifi Gruffi" avec une voix de chien trafiquée et un court Bonus Track ("Unforever"), sublime piano-chant qui ressemble plus à une ébauche (de la troisième partie de la trilogie ?) qu'un épilogue. Par contre, le media(comic)book est de toute beauté même si la "front cover" (zoomée) s'y trouve amputée de la tête de "chien" tapie dans l'ombre de l'épaule de la "panthère". Dommage, c'était une symbolique forte qui s'en retrouve donc restreinte ici.

Morceau préféré: "Icon".
Le "Tube": "Panther".
La pépite: "Restless Boy".

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Appendice : détails sur le concept

L'idée de base est un développement du propos de "Full Throttle Tribe" ("FTT") présent sur "ITPLOD", dont les paroles restantes ont d'ailleurs servi à l'origine à enregistrer la version démo de "Restless Boy" (qui restera finalement telle quelle). "FTT" traitait pour la première fois du syndrome de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (ADHD en anglais) dont Daniel a été diagnostiqué adulte. Il y racontait comment il s'était toujours senti en marge de la société en tant qu'enfant et comment il avait réussi à s'y affirmer en créant ses propres tribus compréhensives autour de lui (son groupe, sa famille ?). "Panther" creuse donc la notion de marginalité au sein de la société en reprenant à sa sauce les analogies animales que e.g. PINK FLOYD avait exploitées sur "Animals". Ici il ne s'agit pas de classes socio-économiques mais de normes comportementales liées à des troubles innés. Gens "normaux" vs gens "anormaux"/hors normes (autistes, hyperactifs, etc...). Et par extension rationalistes par méthode vs rationalistes par but (*). Bureaucrates vs artistes. "Chiens" vs "panthères".

Si cette dichotomie peut sembler caricaturale de prime abord, d'autant que le ton est parfois très (trop ?) direct, l'album vise plus à présenter la vision de notre monde à travers les yeux et le ressenti d'une "panthère" selon trois étapes de construction personnelle (1 : la réalisation de sa marginalité induite par la société ; 2 : la présentation de son fonctionnement et de ses failles ; 3 : la relation compliquée aux autres, au monde, à ses proches) plutôt qu'à une opposition binaire stérile "chiens" vs "panthères". C'est le cri d'existence (de différence) d'une "panthère" (le narrateur, Daniel, "Accelerator"), aussi maladroit puisse-t-il parfois être (un certain manichéisme, "Panther"), qui essaie d'expliquer que le modèle de société (rationaliste par méthode) qu'on a construit ne fonctionne pas ("Unfuture" en est une parabole dystopique) et exclut les "panthères" ("Restless Boy") en ne tenant pas assez compte du contexte, personnel ("Icon"), situationnel ("Wait"), sociétal ("Keen To A Fault") et en les réduisant à des "chiens défectueux" ("Accelerator", "Keen To A Fault"). Daniel expose les sentiments ("Wait") et les raisonnements ("Keen To A Fault") d'une "panthère" et tente de leur faire prendre conscience que c'est en outrepassant ces barrières qu'elles pourront, au moins en partie, s'affirmer et s'accomplir ("Accelerator") quitte à se forger une carapace exacerbée ("Panther") et même si pour le narrateur cela a signifié la fuite/l'isolement (au moins temporaire) dans la Nature sauvage ("Species").

Daniel a tellement personnifié cet album (e.g. "Icon" exprime ses doutes/craintes encore présents quant à la conciliation compliquée entre la poursuite de ses rêves et son épanouissement au sein de SON groupe et sa vie de famille) qu'il ne défend que le côté "panthère" du propos. C'est un parti-pris compréhensible et naturel. Mais cela aurait été intéressant d'avoir le point de vue d'un "chien". D'autre part l'opposition "bureaucrate" vs "artiste" est trop réductrice et son extension vers (ou depuis) "gens normaux" vs "autistes, hyperactifs, etc..." est maladroite. D'autant que les problématiques qu'il décrit peuvent aussi s'appliquer à des "chiens". Je comprends bien que ce ne sont là que des exemples servant à illustrer sa diatribe (e.g. "Panther" où il évoque la médication aujourd'hui appliquée (imposée) aux personnes ADHD) mais c'est malencontreux et peut porter à confusion quant à la compréhension de la cause importante qu'il veut ici défendre. Il n'a peut être pas assez exploité et exprimé les contextes plus globaux de cette thématique. Là n'était sans doute pas son but. Néanmoins, voilà encore un concept riche, original et provocant en ce sens qu'il nous questionne autant qu'il nous apporte de réponse.

(*) Comme il l'a expliqué en interview, Daniel oppose les théories sociologiques de rationalisme par méthode (qui consiste à définir la méthode d'abord puis à s'y tenir pour atteindre son objectif, quel qu’il soit ; par exemple l'administration) qui contrôle globalement nos sociétés modernes et en général finit par échouer car c'est un système trop rigide, et de rationalisme par but (qui consiste à définir l'objectif d'abord puis d'y adapter la méthode adéquate pour y parvenir ; par exemple l'art) qui offre un chemin plus libre, plus sinueux, plus chronophage mais dont la récompense est souvent la réalisation de l'objectif.

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- Crédits "Panther"
- Daniel Gildenlöw (chant, guitare électrique, acoustique, basse, piano, clavie)
- Léo Margarit (batterie sur tous les autres sur)
- Johan Hallgren (solo final sur 'icon')
- Crédits Généraux
- Daniel Gildenlöw (chant lead, plein de trucs)
- Johan Hallgren (guitare, chant)
- Léo Margarit (batterie, chant)
- Daniel Karlsson (claviers, guitare, chant)
- Gustav Helm (basse, chant)


- cd 1
- chapter I: A Restless Boy In A World Too Slow
1. Accelerator
2. Unfuture
3. Restless Boy
- chapter Ii: For Me To Become I
4. Wait
5. Keen To A Fault
6. Fur
- chapter Iii: How To Mourn The Living
7. Panther
8. Species
9. Icon

- cd 2 (mediabook édition Limitée)
1. Panther (demo)
2. Keen To A Fault (demo)
3. Fifi Gruffi
4. Unforever



             



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