Glenn Evans, batteur enragé des non moins enragés NUCLEAR ASSAULT, décide de s’octroyer une petite pause de son groupe de cœur afin de se consacrer à ce qu’on pourrait appeler un album solo. On savait le facétieux batteur pourvu d’un humour féroce, mais on ignorait qu’il pouvait aussi chanter et jouer de la guitare. C’est chose faîte avec CIA, nom de code "In The Red", complètement Thrash dans l’approche, tant musicalement qu’au niveau des textes, particulièrement véhéments pour l’époque, nous sommes tout de même en 1990 !
Il est vrai que NUCLEAR ASSAULT a toujours eu cette propension à attaquer la politique dans sa globalité, et à dénoncer les injustices de ce monde, mais là il s’agit d’autre chose, Evans est très énervé, et mine de rien, nous nous reconnaissons sans mal dans ses préoccupations et ses colères d’alors… Tout y passe, Sida, corruption, et déjà les guerres qui abreuvent malheureusement l’actualité avec leurs milliers de morts, comme à une pesée journalière de poissons à la criée. Rien n’a bougé d’un pouce en 2016 je vous rassure, enfin non, mais personne ici n’est dupe non ? Alors un visionnaire Glenn ? Non, mais un citoyen éclairé qui se tient au courant de ce qui se passe dans le monde dans lequel il vit, dans lequel nous sommes obligés de vivre…

Etonnamment, la production est excellente, ce qui n’est pas toujours le cas dans le Thrash underground, et ce n’est pas la seule raison de nous réjouir ici. Il suffit d’écouter l’excellent titre "Mind Over Matter" pour s’en rendre compte. Batterie qui claque, guitares propres mais ultra saturées, chant agressif pas piqué des vers et surtout jamais aux fraises. Pas mal pour un batteur ! Cette galette de CIA est pleine de surprises... La petite pleurnicherie "Samantha" s’écoute avec curiosité, et au final un plaisir certain, bien composée, bien interprétée, bien ficelée la demoiselle ! Bon, nous restons dans le domaine du Thrash hein ? Ce n’est pas du WINGER non plus mais elle s’écoute agréablement.

Le batteur a invité ses petits copains afin qu’ils participent eux aussi à cette petite sauterie le temps d’un album, avec notamment Anthony Bramante venant taper des soli sur trois titres furieux, "Buried Alive" en tête. Toutefois les autres membres ne sont pas en reste, Dan Lilker, John Connelly officiant aux backing vocals, lorsqu’ils ne jouent pas quelques notes de ci de là. Ne riez pas, il y a même le "East Haven Choir", un chœur donc qui vient pousser lui aussi la chansonnette. La cohabitation a dû être plutôt épique !!!

Dans l’ensemble, l’album est plutôt bon, puisqu’Evans a eu la bonne idée de composer des titres parsemés de breaks en tous genres pour varier un peu les plaisirs. Le Thrash Metal peut vite devenir ennuyeux s’il est trop linéaire dans son approche. Ici il n’en est rien, si ce n’est le peu de relief que dégage la voix du batteur de formation, qui officie à tous les postes ici.
Il s’en sort cependant avec les honneurs sans démériter, mais ne sera jamais Rob Halford !
On ne le soupçonnait pas d’avoir autant de cordes à son arc d’ailleurs, habitués que nous étions à le voir derrière sa batterie, absorbant une quantité non négligeable de whisky et en détruisant ses fûts au fil d’un concert, comme ce fût le cas pour moi à la loco pour un package exceptionnel rassemblant NUCLEAR, TESTAMENT ainsi que DEATH ANGEL en 2002…

Alors autant se ravir de cette récréation assez sérieuse finalement, dotée il faut le rappeler d’une excellente production pour le budget alloué qu’on imagine assez maigre. Difficile de sortir un titre du lot, l’album s’appréciant dans sa globalité, si ce n’est cette « speederie » qu’est "Extinction", qui envoie tout valdinguer sur son passage, sauvage et sans équivoque.

Un bon album de Thrash à réécouter aujourd’hui avec grand plaisir.