Les Polonais d'EXLIBRIS m'ont régalé avec ce "Humagination" dont je ne me lasse pas, et que je classe aisément dans mes révélations de 2013. Souhaitant sans doute surfer sur cette dynamique, nos lascars reprennent rapidement le chemin des studios pour continuer leurs aventures Power Prog raffinées qui auront su convaincre Tom Englund (EVERGREY, décidément partout, d'EPYSODE à ETHERNITY en passant par le projet fou de Magnus Danielson). Le colosse suédois fait une apparition remarquée sur un "Closer" taillé sur mesure, puisqu'assez EVERGREY-ien dans l'esprit.

En outre, une nouvelle fois EXLIBRIS a mis le paquet sur le design : cette peinture abstraite de Michał "Xaay" Loranc est une grande réussite, la profusion des couleurs et le côté explosif qui s'en dégage ainsi que ce côté Pop Art lui donnent un cachet dont peu de disques de Metal récents peuvent s'enorgueillir (à part peut-être The GREAT OLD ONES et son "Tekeli-Li"). De quoi vous décider à acheter "Aftereal" sur la simple appréciation de la pochette.

EXLIBRIS prend la bonne habitude de ne pas nous imposer une déconvenue à chaque nouvelle sortie (il faut dire que le groupe partait de loin avec "Skyward") et reste dans la lignée de "Humagination" même s'il y a un mais. Je dirai, pour schématiser, que EXLIBRIS s'est peut-être un peu précipité pour nous proposer un successeur rapide à l'opus de 2013. Si le talent de la paire Lechmański/Voltan, parachevé par un séduisant Krzysztof Sokolowski toujours au sommet de son art vocal, reste présent, on sent "Aftereal" un peu dilué, et moins concentré que sur "Humagination", qui avait l'atout de proposer sur chaque titre la mélodie mémorable et le riff qui tue. Ici c'est moins le cas. On a de l'excellent ("Omega Point", "The Day Of Burning"), mais aussi du simplement bon.

Du côté des progrès notables, on notera l'organe de M. Sokołowski qui a pris du grain, lorgnant régulièrement du côté d'un Thomas Rettke (HEAVENS GATE) voire parfois d'un Tim Owens, et proposant des interprétations plus musculeuses. En contrepartie, on perd un peu du charme de "Humagination" où il alternait avec plus de nuance et permettait de susciter à chaque envolée puissante l'admiration chez l'auditeur. Il faut dire que du point de vue de la composition, "Aftereal" est aussi plus direct que son prédécesseur, lorgnant parfois sur l'efficacité à la IRON SAVIOR ("Omega Point") avec succès, puisque c'est incontestablement l'un des moments forts de l'opus.

Nul doute que les titres de cet "Aftereal" ne peineront pas à s'insérer dans les setlists live du groupe. En revanche, la finesse dans l'écriture, qui donnait toute sa profondeur à "Humagination" est presque absente et l'opus perd en subtilité et en dimension, à l'exception notable du superbe "Closer" chanté par Tom Englund, pour le coup parfaitement dans le style "Humagination". Autant un groupe comme ORPHANED LAND avait pu partir d'un album très progressif au concept ficelé pour arriver à un opus efficace et dénué d'artifices, autant EXLIBRIS manque sans doute encore de maturité pour réussir une évolution aussi nette.

Certains titres en pâtissent, et particulièrement ceux qui tentent de conserver cette majesté à la VANDEN PLAS/ROYAL HUNT ; je pense à "King Of The Pit" qui après une introduction en dentelle s'arrime à un pattern de batterie massif et un riff d'une simplicité déconcertante pour diriger le titre vers l'immédiateté sans y parvenir totalement. Difficile de savoir si "Aftereal" est un opus de transition, mais soit le groupe devra affiner son sens de la composition pour marier au mieux l'efficacité de ses nouvelles compositions, le sens de l'arrangement et de la nuance de "Humagination", soit il devra opter pour l'une des deux directions, l'une comme l'autre lui allant comme un gant. Je suis embêté par le 3 que je lui donne, car l'album ne présente aucune faute de goût impardonnable, juste quelques maladresses sur des titres qui ne sont jamais mauvais, un peu le cas de figure devant lequel je me suis retrouvé face au "Empire Of The Undead" de GAMMA RAY.

Note réelle : 3,5/5.