Dire que l'absence prolongée des Allemands de CHÂLICE nous a profondément affectés serait mentir. Pour autant, son retour après 7 ans de silence radio nous fait extrêmement plaisir, car le talent indéniable du groupe, ainsi que sa capacité à habiller son Hard Rock somme toute traditionnel de sonorités plus audacieuses, parfois proches de la musique Prog, ont fait des merveilles sur quelques uns de ses six albums parus entre 1995 et 2007, parmi lesquels l'indispensable "Chameleonation", qui lui a permis d'atteindre une petite reconnaissance internationale. Fort d'un line-up quasiment inchangé par rapport à sa précédente réalisation studio, "Bare", le groupe semble décidé à faire un nouveau tour de manège grâce à un septième album varié et très réussi.

Il y a toujours un peu, c'est une évidence, de ces ambiances à la SCORPIONS ou BONFIRE qui rendaient les précédentes réalisations du groupe si alléchantes aux oreilles des amateurs de Hard Rock teuton. Cette efficacité, ce sens des mélodies qui font mouche, CHÂLICE ne l'a fort heureusement pas perdu. Tous ces attraits, nous les retrouvons savamment disséminés sur l'ensemble de l'opus. Le morceau le plus marquant, "All About Your Love", est un tube en puissance. Si les riffs sont prévisibles, il y a ce petit plus (la voix de Gino Naschke ? La cohésion du groupe ?) qui le rend très savoureux. L'énergie, canalisée sur un refrain immédiat et fédérateur, est sans doute la clé de voûte d'un morceau du même acabit que l'excellent "Hollywood Daze" de l'album précédent. Plusieurs titres évoluent ainsi dans ces eaux Hard Rock "direct" et tirent leur épingle du jeu, à l'image de l'introductif "You Better Get Used To It", direct et sans fioriture, ou "Rock'N'Roll Machine" dont le clavier introductif rappellera aux fils des années 80 un célèbre générique d'une émission de Canal +...

Tout cela est simple et funky, du bon Hard Rock 80s, le genre de musique qui confirme que, si l'âge d'or du style semble définitivement derrière lui, il existe toujours des portes-flambeaux qui ont à cœur de produire une musique artisanale créée avec les tripes. D'autant plus que ce "Overyears Sensation" sent bon les dessous de bras, dans un monde où les productions aseptisées sont légion, cet album sonne de manière organique, n'est pas dénué de petites imperfections qui le rendent d'autant plus attachant et authentique. Et puis, si la musique de CHÂLICE a toujours été basée sur un Hard "traditionnel", elle sait aussi voir plus loin et briser les barrières. Ainsi, à plusieurs reprises, le groupe n'hésite pas à construire des titres alambiqués dont la durée peut dépasser allègrement les six minutes. Non pas que les ambiances ou les arrangements progressifs soient particulièrement marqués, mais il y a sur "Chasing The Wind" ou "Turn Away" une musicalité très riche, de nombreux changements de rythme, qui justifient parfaitement la création de ce Hard Rock "à rallonge" qui ne voit pas pour autant son efficacité amoindrie. Plus mordant et énergique, "Don't Tell Me Lies" sort lui aussi des canons traditionnels du style, et propose un mélange bien senti entre un riff agressif et des lignes inspirées d'un clavier-orgue sautillant.

CHÂLICE passe ainsi en revue l'ensemble de ses domaines de compétences. Il est vrai que la voix de Gino Naschke pourra continuer d'en rebuter certains. À la manière d'un Bernhard Weiss (AXXIS), le chanteur n'est pas un vocaliste exceptionnel, mais fait des merveilles au moment de mettre en valeur des mélodies ou insuffler un surplus d'énergie à l'ensemble. Ainsi, c'est une fin d'album en trombe qui finit de séduire l'auditeur (la doublette "Sign Of The Times" / "Shake The Earth"), avant qu'un court instrumental façon "Always Somewhere" de SCORPIONS ne vienne achever les débats.

Sept ans d'absence n'ont aucunement émoussé le talent et l'inspiration de CHÂLICE, qui livre un album très convaincant, présentant chacune des facettes du groupe et donnant l'impression d'être amené à devenir un album-étalon dans la discographie de plus en plus fournie des Allemands. Un retour tout autant inespéré que prometteur.