Avec le début des années 2000, SKINLESS monte en puissance. Si le groupe s'est toujours donné à fond, voilà qu'enfin la reconnaissance commence à arriver, que Relapse Records les récupère et que ça se met à tourner avec carrément PANTERA ou SLAYER. Bref, nos grosses brutes deviennent des rockstars. Et donc c'est avec confiance que nos gaillards sont de retour en studio pour cet album cuvée 2003, avec cependant un batteur manquant à l'appel mais remplacé par rien de moins que le tueur John Longstreth de ORIGIN.
Bref, tout sur le papier pour nous servir un bon gros blockbuster qui chie des bulles, et là on a pas erreur sur la marchandise. Cependant il convient de nuancer un peu, autant que l'album : "From Sacrifice To Survival" est le skeud le plus éloigné du style de SKINLESS à ce jour. Oh non, pas de trahison à signaler, juste une ligne directrice un peu différente.

On était habitué à une musique ultra primaire, brute et dominatrice, eh bien désormais on verse dans quelque chose de considérablement plus fouillé, technique, complexe, tout ça. SKINLESS verse désormais dans le Metal Progressif à chant clair, et ce n'est pas du tout pour me déplaire !
Non c'est pas vrai. Enfin, si, chant clair il y a, sur deux morceaux et placé en retrait totalement à l'arrache en mode hanté et plaintif comme si un connard tentait quand même de hurler juste sous la torture, et c'est tout, rien de bien commercial donc.
Mais sinon on se mange toujours notre raclée, ça blaste et ça tcharcle, c'est gore (malgré ce que la pochette splendide voudrait nous faire penser) et ça y va du riff qui dévisse la nuque. Mais pas que.
Tout est tout de même beaucoup plus pensé, plus abouti. Dites vous que "A False Sense Of Security" est carrément un interlude ultra mélodique, truc totalement impensable auparavant. Mais elle ne sert qu'à introduire le morceau ultime de l'opus, le ravageur éponyme qui détruirait l'intégralité du squelette, de quiconque est un tant soit peu réceptif aux attaques physiques sonores.

Et du coup on prend toujours pour notre grade, de manière bestiale, mais presque plus fine. Le gras recule un peu par rapport au Triple Saindoux "Foreshadowing Our Demise" et l'accent encore un peu mis sur le côté Hardcore et les énormes moshparts dans la tronche (vas-y bouffe-toi "Battle Perpetual Will"), comme si le tout avait été hybridé avec un MISERY INDEX ou un DYING FETUS plus proche que jamais. Parce que la production est bien plus claire, précise, nette, tout en gardant ce sentiment de surpuissance qui te toise. Et vas-y que ça te sert quand même quelques crochets du droit avec quelques morceaux incroyablement brutaux comme "Miscreant" et son intro supersonique qui nous rappelle d'où vient J. Longstreth, ou la mortelle "Deathwork". Le tout avec le plus grand sérieux du monde (plus aucun sample nulle part) et une sacrée envie de partir à la conquête du globe. Et ma foi je dis oui.

Parce que si SKINLESS a voulu ici conserver l'essence même de sa musique, à savoir une brutalité headbangante ultra baraquée, dominante, il a voulu voir les choses en grand et en faire quelque chose de plus complet, plus abordable, sans oublier de quand même défourailler à toute berzingue et de détruire le pit. Les constructions, le son plus professionnel, le nombre de riffs accru, les parties de batterie ultra fouillées, les quelques leads mélodiques qui relancent la machine, la performance de Sherwood au micro qui part dans tous les sens et convainc tout le monde ; bref tout respire un professionnalisme carré que n'avaient pas les deux albums précédents. Même si on termine le tout sur un bordel complet avec "Don't Risk Infection" totalement allumée et dépourvue de logique sur tous les plans. Bref, c'est juste un SKINLESS 2.0 qui a voulu se mettre à jour et montrer que les patrons c'est bien eux. Et c'est réussi.

Avec "From Sacrifice to Survival", SKINLESS a donc tenté de franchir un cap. De bosser encore plus, assumer la filiation avec la scène Deathcore (le vrai, façon NYDM, attention) histoire de servir à la louche du riff vénère (bordel mais ce titre éponyme quoi) tout en arrachant la tête autant que possible. Fini le Brutal Death bas du front, saignant et un peu crétin malgré son efficacité à toute épreuve, désormais on joue dans la cour des grands et on canalise sa bestialité pour l'utiliser à bon escient.
"From Sacrifice To Survival" est donc objectivement le meilleur album de SKINLESS. Parce que c'est celui qui contient les meilleurs morceaux et est le mieux géré d'un bout à l'autre. Ce n'est pas mon préféré pour autant, ayant un faible pour les deux qui l'encadrent, mais ce n'est qu'une question de goûts et de recherche musicale. Alors foncez, vous risquez pas de le regretter, si vous êtes un habitué de DYING FETUS à la recherche de sensations encore plus hardcore, vous le regretterez pour rien au monde.

Pas de peau : On évolue vers une musique plus mature et recherchée mais pas moins brutale et écrasante. Gros +1.