À l’heure où l’Europe entière a les yeux rivés sur la Finlande et sa poule aux œufs d’or NIGHTWISH, le Speed Mélodique de Laponie prend son essor : les DREAMTALE, SONATA ARCTICA, THUNDERSTONE et autres TWILIGHTNING pullulent. Pourtant sur les rives du golfe de Botnie, à Kokkola, c’est une formation progressive qui voit le jour en 1995, sous l’impulsion des frères Kauppinen et du claviériste/chanteur Henrik Klingenberg.

Après un EP qui ne satisfera pas les membres du projet, SILENT VOICES, ce sera son nom, va trouver chaussure à son pied avec Michael Henneken, qui va donner l’impulsion nécessaire pour enfin sortir d’un anonymat de sept années, débouchant sur un premier opus, "Chapters Of Tragedy", enfin disponible le 29 novembre 2002.

On sent l’engouement de la scène Metal finlandaise pour le Speed Mélodique, car le Metal Progressif de SILENT VOICES se voit régulièrement ornementé d’atours Power, avec une richesse d’arrangements quasi-symphonique par moments ("HumanCradleGrave"), ce qui contribue également à lui apporter un peu d’efficacité dans un style - le Prog – où la concision n’est souvent pas assez de mise.

Il faut dire qu’avec Michael Henneken, les Finlandais ont dégoté le vocaliste qu’ils recherchaient, dont le timbre charmeur fait merveille dans le registre haut medium et aigu, et parfaitement indiqué pour le Heavy Speed. Il donne à "Chapters Of Tragedy" une apparente simplicité ainsi qu’un confort d’écoute non-négligeable... Quand il s'en donne la peine (j'y reviendrai). Le songwriting étant déjà assez fluide (mention spéciale au bassiste Pasi Kauppinen débordant de virtuosité – "Tragedy"), "Chapters Of Tragedy" passe tout seul, ce qui n’est pas forcément gagné pour un album Prog, et c’est là l’une de ses principales qualités.

Quid des morceaux en eux-mêmes ? Les sept titres de ce premier opus sont assez inégaux au final après fouille de l’album. SILENT VOICES s’en sort déjà pour le mieux sur les morceaux plus alambiqués comme "Tragedy" où les ambiances ont le temps de s’installer. Ainsi, ce triptyque et "The Last Sunset" s’imposent vite comme les pierres d’achoppement de l’opus. Sont intercalés avec plus ou moins de bonheur des titres plus concis, où le défaut récurrent de SILENT VOICES va apparaître ; une certaine linéarité, due en partie au chant qui semble un peu détaché. C’est particulièrement vrai sur le premier titre "Beyond Shadows" dont le côté Power Metal exacerbé est un peu freiné dans son élan par un chanteur caressant mais manquant d'un peu de hargne. On retrouve le même problème sur "Cross Faith" et la transparente "Falling From Grace". Ce premier opus s’essaie au format court avec un objectif atteint à 50%. Souvent, on assiste à des répétitions de passages que l’on n’observe pas dans les morceaux plus progressifs, un peu comme si au moment de l’écriture le groupe s’était restreint en nombre d’idées pour réussir à conserver un format simple. Dans le format court, c’est limite sur le cover de Roy ORBISON "You Got It" que l’on se dit que ces jeunes Finlandais gèrent leur partie, en particulier Michael Henneken qui redevient délicieux, ce qui démontre davantage une petite carence du songwriting plutôt que d’un manque de compétence.

On n’a pas beaucoup parlé de ce premier opus de SILENT VOICES à l’époque, car s’il n’a pas tout à fait la carrure d’un taulier (encore aujourd'hui, les Finlandais errent en deuxième division), SILENT VOICES est une formation solide qui a des arguments à faire valoir et un florilège de sept titres qui, à défaut de faire mouche à chaque tentative, étale d’encourageantes compétences, comme ses ambiances à base d’orgue Hammond que Henrik Klingenberg rapatriera chez SONATA ARCTICA deux ans plus tard ou encore ses alternances de mélodies de basse et d’harmoniques de Pasi Kauppinen qui créent des atmosphères bien particulières.