Beaucoup de groupes ressemblent à SLAYER, qu’ils soient un produit de leur époque pour qui SLAYER est un modèle naturel, ou que cette ressemblance soit le fruit d’un effort actif pour reproduire exactement le même son, un peu comme un WARHAMMER traque les instruments et matériels d’époque pour recréer à la nuance près la sonorité d’HELLHAMMER. L’archive Thrash du jour n’est pas un combo d’ados rebelles ayant spontanément accouché de compos dont le caractère slayeresque serait le seul produit d’une grosse explosion d’énergie matérialisée au travers de gros riffs de guitare ; imaginez-vous plutôt un ingénieur/alchimiste/orfèvre bossant très tard à son établi mal éclairé, à disséquer "Show No Mercy" pour le ré-assembler pièce par pièce, en redécouvrir la formule et la faire sienne. D’où le fait que quand on cause d’INSANE, le renvoi à SLAYER n’est pas qu’une influence ténue que le chroniqueur traque pour la caser astucieusement et montrer qu’il est trop fort à faire des chros, c’est une TARTE DANS LA GUEULE !

INSANE n’utilise donc pas son talent pour faire dans l’originalité. Mais ils parviennent à engendrer la copie la plus exacte de "Show No Mercy" qui soit ! Du logo (et la ressemblance était encore plus flagrante lorsqu’ils s’appelaient encore SLAVES) à cette peinture d’un démon dans un style très naïf et à la tracklist qui reprend le même lexique et structure ("Metal Storm/Face the Slayer" vs "Die In Hell/ Metal Torment", "Evil Has No Boundaries" vs "Evil Is At Hand", peu de chansons ne sonnent pas comme un clin d’œil très appuyé), on peut au moins dire qu’ils flashent tous les signaux d’alarme réglementaires et que personne ne risque de chopper "Wait And Pray" en pensant devenir l’heureux acquéreur d’un cd du nouveau side-project de Dj MESHUGGAH.

Donc, après un (très) léger flottement, à juste 15 petites secondes dans "Total Alarm" on est définitivement sûr d’être dans du "Show No Mercy", et plus on s’enfonce dans l’album plus les compos se rapprochent outrageusement de leur modèle : voir "Four Magicians", au tournant de ce refrain on a un peu peur (ou on espère) qu’INSANE oublie carrément qu’il est rital et pas étatzunien et embraye directos sur le refrain de "Black Magic". Effectivement la plupart des chansons donnent l’impression qu’elles risquent de basculer à n’importe quel moment et sans prévenir dans une compo de leur grand frère, avec leurs trois membres qui ont pillé les moindres subtilités du jeu de SLAYER, jusqu’à en reproduire les mêmes tics : même façon de poser la voix, d’asséner des phrases se voulant terribles ("eviiiiiil cannot DIE !!! ") et de balancer des cris perçants, en se faisant passer pour un clone exact la plupart du temps - le chanteur ne décroche qu’un poil lors des envolées hyper aiguës, et juste assez pour qu’on s’énerve que la supercherie, tant qu’à faire, ne soit pas parfaite. Et bien sûr ce qui saute le plus aux oreilles : les riffs tristounets et intenses qui en sont la marque de fabrique, et cette batterie diabolique et précipitée. Après deux chansons on est déjà perdu dans un tourbillon riffique et à ce moment peu importe quel groupe le fait.

Et valeur ajoutée s’il vous plaît : on a quand même jamais l’impression d’écouter poliment des gens qui jouent gentiment à SLAYER et d’attendre qu’ils aient fini leur truc pour s’écouter un p'tit SNM - on en repart avec des riffs et refrains bien dessinés qui convainquent que, même en ayant l’audace de jouer dans la cour d’un monstre sacré, INSANE parvient à voler un peu d’attention et à faire un petit peu de nouveau avec une formule bien ancrée dans le passé.

Un album soit totalement inutile soit exactement ce que vous recherchez, donc compteur à 3/5 (déontologie tout ça), même si pour ma part mon avis est fait, c’est un superbe hold-up sur les plates-bandes de [ce groupe dont j’ai déjà écrit trop de fois le nom pour une seul page Word]. De quoi se faire plaisir pour peu que vous vous enfiliez pas "Show no Mercy" juste à la suite (bonne chance là-dessus).