Il est frappant de voir comment tous les groupes de Metal extrême brésiliens des 80's entameront de façon systématique, après un excellent premier album, une dégringolade vers les pires bas-fonds musicaux, avant de s’éteindre pitoyablement. Quand on regarde de plus près, à part MAYHEM, SABBAT (le Jap’) et BATHORY, pratiquement aucun groupe de Black Metal ne survivra à la nouvelle décennie. C’est à chaque fois un supplice de désillusions pour l’amateur de Metal extrême de voir ses nouveaux groupes favoris s’auto-humilier avec des albums figurant parmi les plus mauvais de la décennie. C’est que les mauvais albums des grands groupes paraissent toujours pire que les mauvais albums des mauvais groupes. Quand il y a chute, ça fait toujours plus mal. SARCOFAGO a eu "Rotting", copie fadasse du premier album, VENOM a eu "Possessed", CELTIC FROST: "Cold Lake" et caetera. Le Black de l’époque, sans doute par sa proche parenté avec le Punk, est le genre “No Future” par excellence. VULCANO n’échappe pas à la règle en sortant en 87 cette immonde bouse qu’est "Anthropophagy".

De chute, encore une fois il est question. "Bloody Vengeance" était monumental, rempli d’une énergie atomique, furieuse, blasphématoire et révolutionnaire. On comprend aisément qu’après une telle performance, le groupe se soit retrouvé à bout de souffle. Conscients que tout avait été dit, les deux gratteux se retirent, abandonnant le reste de l’équipe à leur mensonge, persuadé que VULCANO n’a pas dit son dernier mot. Grave erreur ! Le dernier mot du groupe était "Bloody Vengeance", titre éponyme du premier album, résumant et sublimant le style musical de son géniteur. Tout ce qui vint après (3 affreux albums, dont celui-ci est le moins pire !) ne sont que les râles d’agonie d’un groupe qui a plus que fait son temps.

Comme l’ancien bassiste se voit forcé de passer aux guitares, on en engage un nouveau, changeant radicalement le son si particulier du groupe, qui sur "Anthropophagy" fait preuve d’un manque cruel de vitamines. La dynamique de l’album est archi-creuse (où est passée la profondeur volcanique du premier album ?) et les riffs caricaturaux, tentant misérablement d’égaler la force perdue des premiers jours. Démarche qui résume à elle seule tout le programme de l’album : feindre que rien n’a changé, alors que tout est différent. Même Angel, dont le timbre infernal enflammait "Bloody Vengeance", ne semble plus y croire, récitant son texte comme un robot, sans méchanceté aucune. Adieu le Black ! Des titres comme "Fuck The War" (alors que le précédent album en était une déclaration !), "Anyone Can Kill" et "Brainwash" appartiennent au champ lexical du Thrash, du mauvais Thrash plus précisément, genre duquel VULCANO ne se détachera plus jusqu’à sa mort (avant sa ravissante résurrection, mais c’est une autre histoire).

Tout est-il à jeter sur "Anthropophagy" ? Peut-être pas, ceux qui arrivent à passer la production éthiopienne de l’album remarqueront qu’il démarre plutôt bien, le temps de deux titres en tout cas. La rapidité des riffs est bien maîtrisée et met en valeur une musique qui en a encore un petit peu dans le pantalon. Malheureusement la qualité des morceaux s’embourbe dès le troisième morceau et jamais plus l'album ne parviendra à décoller du médiocre. Conscient qu’il n’est plus aussi féroce, le groupe joue plus vite pour combler ses carences en brutalité, bel exemple du credo "toujours plus vite", qui envoie doucement le Thrash de l'époque dans le décor de la nullité. C'est une reprise de leur propre titre "Fallen Angel" (classique du mid-tempo sauce VULCANO figurant sur le live et la démo 84), comble de la nostalgie déplacée, qui finira de nous convaincre de jeter ce disque odieux par la fenêtre (peut-être une des raisons de sa rareté en vinyle aujourd'hui !). Mention spéciale à "(Am I Crazy?)", le titre instrumental le plus inutile de l'histoire de l'inutilité. Trois coups de pédale et deux cymbales d'un batteur bourré ne font PAS un morceau de musique, que cela se sache!

"I Hate" records en rééditant l’album en cd aura la présence d’esprit de le sauver en y ajoutant les titres de la première démo du groupe, ce qui ravira les nostalgiques et les excavateurs de l’ombre. Sinon pour résumer : "Anthropophagy" est un album de Thrash/Death sans finesse comme on en produisait des kilos à l’époque, perdu dans une production maigrichonne. Dispensable et relativement chiant. Rendez-vous en 2004 pour le retour de VULCANO a une esthétique Black Metal, la seule qui lui aille vraiment.