Le voilà, enfin, la bombe de bestialité que le Brésil depuis des années se retenait de larguer, la réponse fiévreuse qu’une jeunesse écrasée brûlait de scander contre son pays miséreux, contre son système politique et religieux corrompus et contre des conditions de vie pour le moins intolérables. "Bloody Vengeance", promesse révolutionnaire et premier album studio de VULCANO, porte dans ses 30 minutes de Black/Death monstrueux toute la rage de sa génération et constitue à lui seul le fier étendard de la scène extrême brésilienne, sa genèse et son modèle, en plus d’être une des démonstrations musicales les plus féroces à voire le jour dans les années 80.
Sur les flyers promotionnels de l’album distribués début 86, on pouvait d'ailleurs lire ceci :

« La cover de "Bloody Vengeance" montre l’intérieur d’une église catholique, symbole d’un autoritarisme moyenâgeux, en plein incendie et dont le prêtre a été mis à mort. Montrant aujourd’hui que la peur du dogme religieux est brisée. Il n’y a aujourd’hui plus de peur de la Lumière ni de peur des Ténèbres. Aujourd’hui il reste seulement la peur atomique. La peur de savoir qu’aujourd’hui une poignée de puissants tient notre destin entre leurs mains. »

La rage au cœur et la tête pleine d’idées, VULCANO entre en studio fin 85 pour enregistrer ce qui s’impose depuis 25 ans comme une des références ultimes en terme Black/Death Metal. Figurant parmi les plus anciens piliers du Metal extrême, "Bloody Vengeance" éclate à la face de l’auditeur en premier par sa fraîcheur et son originalité : des quelques influences de VULCANO (on suppose VENOM et MOTÖRHEAD, mais à vrai dire on en sait trop rien), rien ne transparaît, et le Black/Death proposé par le groupe puise ses ressources dans une violence nouvelle et unique pour l’époque (peut-être entre-aperçu sous forme embryonnaire chez SEPULTURA ou ARMEGEDOM). Le génie des compositions, ensuite, qui s’impose par lui-même au travers de titres aussi efficaces qu’intenses. Toujours fondé sur une recette maléfique d’alternance entre des titres fulgurants et maîtrisés (rarement vitesse et technique n’auront été poussées simultanément aussi haut) avec des titres mid-tempo étouffants et jouissifs. La hache et le scalpel enfin réconciliés sur des pistes comme "Spirits Of Evil" ou "Death Metal" (à l’intro subliminale et infernale, culte) ; la bombe atomique et le satanisme s’épousent dans les claques monumentales que sont "Holocaust" et "Bloody Vengeance"(le titre Black/Death parfait, on en reparlera).

En renfort de cette science de la barbarie, deux atouts immenses viennent combler l’idéal de perfection sanguinaire que VULCANO recherche (et dépasse). D’abord une production infernale dont les arcanes restent à redécouvrir : enfin un groupe qui porte bien son nom ! Car "Bloody Vengeance" possède un son si brûlant qu’on ne peut l’imaginer enregistré ailleurs qu’au fond d’un volcan. Ce sont de véritables éruptions de riffs auxquels nous sommes confrontés tout au long de l’album (la reprise du break de "Death Metal" mettra du son sur ses mots), et on peut flairer le souffre et la lave bouillonnante à chaque froissement de basse (comme sur le Live précédent, les lignes de basse de ce disque sont particulièrement remarquables). On sera enfin forcé de tirer notre révérence à Angel, sempiternel chanteur du groupe, dont les vocalises orageuses finissent d’installer VULCANO au sommet du Metal extrême de son époque. Chaque mot, chaque phrase, une fois trempé dans son timbre démoniaque, prennent une intensité hors du commun et un caractère envoûteur : les légendaires "your Blooood, your flaming blooooood" du titre éponyme me transcendent à chaque fois.

Petit paragraphe, comme promis, dédié au morceau-titre et à son intro maléfique. D’une lourdeur et d’une noirceur sans égale, que l’on cherche du coté du Black ou du Death de l’époque, "Bloody Vengeance" est, avec "Holocaust" le sommet de l’album et peut-être même de toute la scène extrême de Belo Horizonte. Figurez-vous MORBID ANGEL jouant "Born For Burning" de BATHORY et vous aurez un léger avant-goût des vertus metalliques que porte cet hymne extrême et blasphématoire (oui je suis un fan et j’en fais des tonnes…).

Avec sa pochette sacrilège et prémonitoire (soit le premier album de Black Metal à présenter une église en feu), avec ses 5 musiciens, la bouche pleine de sang, habillé de cuirs, de piques et d’os, en parfaite adéquation et donnant le meilleur d’eux-mêmes au service d’une guerre auditive qu’il déclare à leur pays, avec ses 30 petites minutes pour une densité musicale que beaucoup d’albums de 1 heure pourraient lui envier, avec sa base de fans toujours grandissante, "Bloody Vengeance" parlera à tous les amateurs de Death et de Black qui n’ont pas peur d’être secoués. Un album que les années n’ont pas amoché d’un poil et qui s’impose toujours comme une brillante démonstration de Metal Extrême dans sa forme la plus contestataire et féroce. Oui je suis un fan boy et j’en fais des tonnes, je n’en suis pas moins fier de porter "Bloody Vengeance" dans ma liste des plus forts albums des années 80.