ALCEST fait partie de ces rencontres improbables, qui auraient pu se dérouler maintes fois par le passé, mais sans jamais se concrétiser pleinement. Intrigué par l’avatar du sieur Positron sans arriver à mettre la main sur l’œuvre d’origine, j’ai également longtemps été induit en erreur par la provenance française du groupe, que j’assimilais à tort à CELESTE, alors que les musiques n’ont absolument rien à voir, à part de vagues racines Black, desquelles les deux formations se sont plus ou moins éloignées avec le temps. Le seul point commun entre les deux : une forte identité, marquée par une classe folle.

Il m’aura fallu m’habituer à ce ténébreux héritage pour commencer, avant de creuser en parallèle l’univers Shoegaze, fait de guitares baveuses et de chant boosté à la réverb, à l’opposé de la netteté des riffs et des effusions que j’affectionne habituellement. Si "Écailles De Lune" est souvent à juste titre considéré comme leur pièce-maîtresse, j’avoue éprouver une tendresse particulière pour ce "Spiritual Instinct", ode au voyage et à l’introspection, renforcée par ces déferlantes sonores qui vont et qui viennent emporter par moment, délaisser à l’occasion, ne laissant que quelques notes pour seul compagnon d’armes. Loin d’une linéarité toute binaire, ALCEST sait secouer et remuer, mais tout se déroule à l’intérieur.

D’une folle mélancolie, la formation tire la quintessence de ces sentiments contraires, tour à tour réconfortants ou plombants, narrant des pérégrinations qui ne seront pas de tout repos pour l’auditeur. Les blasts assaillent, le chant se fait éthéré, les eaux se calment pour mieux se déchaîner au rythme mené d’une main de maître par Winterhalter, dans un équilibre qui frise la perfection, porté par des chœurs et une production d’apparence organique mais tellement à propos. L’écriture, ciselée à la perfection, rend hommage à l’intelligence de ses géniteurs et se dévoilera au fur et à mesure des écoutes à qui voudra bien s’en donner la peine.

Il était temps qu’ALCEST et moi nous rencontrions. Nous n’étions sans doute pas prêts auparavant. Il ne me reste plus qu’à rattraper ce temps loin d’être perdu, car il m’a sans doute permis de vivre plus de choses entre-temps, qui résonnent mieux encore au travers des méandres rêveurs concoctés par le duo Neige / Winterhalter.