2012 : DEMONCY revient. Et moi bien sûr comme un con, j’y crois. Parce que DEMONCY a toujours représenté à mes yeux une certaine vision du Black Metal. Sa musique, monolithique et immuable, touchait à l’obscurité dans sa forme la plus simple et la plus profonde : un raw Black Metal interprété avec une frénésie à toutes épreuves. "Joined In Darkness" et "Faustian Dawn", les deux chefs d’œuvre du groupe, rendaient un sombre hommage au deuxième album de BATHORY, un album noir et brut, qui derrière sa naïveté apparente était en fait 10 années en avance sur son temps. On aimait donc DEMONCY car il semblait être l’éminence grise du Black Metal, le dernier descendant d’une lignée perdue, détenteur de quelques secrets que bien d’autres apôtres tentèrent de percer à jour sans jamais vraiment y parvenir.

Quand il sortait ses premières démos et albums, Ixithra, seul matelot à bord de ce vaisseau fantôme, rappelait à sa génération (souvent sur le déclin) que le Black Metal impie pouvait encore exister, qu’au final c’était même assez simple à exécuter et que la mort de BEHERIT et PROFANATICA ne devait rien y faire. Toujours quand les blackeux s’égaraient, DEMONCY était là pour remettre le temple du mal au milieu du village et nous rappeler à tous leurs origines (les premiers BATHORY, en gros). Mais aujourd’hui, en 2012, le Black Metal se porte bien, les secrets de DEMONCY on les connait par cœur et BEHERIT et PROFANATICA sont tous deux revenus à la vie, plus fort que jamais. "Enthroned Is The Night" est donc un album sans surprise et sans raison d’être.

On retrouve donc l’entité noire exactement là où on l’avait laissé 9 ans auparavant, à broyer du noir de façon linéaire et obstinée. Et le temps n’a pas gâté DEMONCY ; celui que l’on a longtemps cru indestructible manifestait déjà sur "Empire Of The Fallen Angel", l’album précédent, une sévère perte de vitesse. Et ça ne s'arrange pas sur ce "Enthroned Is The Night", lequel s’enfonce toujours plus dans le gouffre de la facilité. On retrouve les mêmes intros maléfiques (seuls points forts indiscutables de l’album), ces mêmes riffs bulldozers, ces mêmes breaks obscurs et cette même voix sèche et murmurée ; le tout ayant subi un étrange lifting « moderne » qui fait que l’ensemble sonne faux et anachronique (comme ces hideuses versions remastérisées qu’on nous vend honteusement par milliers ces derniers temps).

Mauvais calcul que cette chirurgie esthétique qui va très mal à DEMONCY : on savait que la musique de ce dernier album serait chiante, connue, répétitive, mais on espérait quand même une petite leçon de production dégueulasse, mais même ça le groupe n’est plus capable de nous l’offrir. DEMONCY est devenu un groupe de Black Metal générique, plus irritant encore que le mauvais Black Metal. Car l'album n'est pas mauvais à proprement parler, mais l'on s’ennuie cruellement pendant ces quarante minutes; très rarement on se laisse surprendre par un break bien placé, et seules les intros très "roots" parviennent à réveiller un enthousiasme aussitôt perdu dès les premiers riffs de chaque morceau.. Il ne faudra pas accorder beaucoup d’écoutes à ce "Enthroned Is The Night" pour se convaincre que tout cela est du déjà vu et que DEMONCY ne parvient plus à émouvoir ni à effrayer comme il le faisait si bien par le passé.

Saluons l’obstination de Ixithra à refuser toutes les remises en question, c’est une forme de noblesse. Et je garde la foi, un jour le Black Metal ira mal et DEMONCY reviendra avec un album plus noir que le noir, nous foutra une grosse claque avant de retourner mourir pour encore une décennie. En ce qui nous concerne, "Enthroned Is The Night" est un album inutile (de plus), et les nostalgiques comme moi de "The Return" ou de "Joined In Darkness" auront mieux fait de se tourner vers le jeune one-man band VOID MEDITATION CULT dont la première démo est forgée dans le même fer que les vieux DEMONCY, celui du vrai Black Metal.