STREAM OF PASSION, ce groupe monté de toutes pièces par Arjen Lucassen avec la complicité du couple Bovio/Millán, a déjà sorti un premier album entièrement composé par le géant Hollandais et un DVD live (où ce dernier profitait de l’occasion pour jouer certains morceaux de STAR ONE et d’AYREON). Pas mal pour ses deux premières années de carrière ! Mais comme il l’avait plus ou moins planifié, le moment venu Arjen déciderait de quitter le navire pour laisser le groupe voler de ses propres ailes. Exit donc Arjen et sa future compagne Lori Linstruth. La situation personnelle difficile dans laquelle il se trouvait ayant certainement accéléré le processus. Autre surprise, Alejandro Millán se fait la malle lui-aussi. Marcela Bovio doit dire bye-bye à son boyfriend. 2007 est donc une année difficile pour STREAM OF PASSION qui doit renouveler la moitié de son line-up alors même que l’attente autour du groupe est grande, suite à un premier album auréolé de succès et profitant de l’effet AYREON (1). Loin de se décourager, Marcela Bovio recrute deux nouveaux guitaristes ne manquant pas d’idées ainsi qu’un nouveau claviériste.

Le processus de composition du groupe sera cette fois-ci effectué en direct et non par mails interposés comme cela avait été le cas pour "Embrace The Storm". Marcela quitte son Mexique natal pour s’installer en Allemagne et le reste de son groupe est 100% Hollandais. On sait les Bataves particulièrement doués pour nous sortir des formations de metal à chanteuse, WITHIN TEMPTATION et EPICA en tête. Mais on est ici assez loin du style de ces deux groupes. Si on devait chercher à identifier la musique de STREAM OF PASSION, c’est à la limite du côté de THE GATHERING qu’il faudrait chercher et encore, de façon assez approximative. Car Marcela Bovio a un univers bien à elle qu’elle va nous décrire le long des quatorze morceaux qui constituent "The Flame Within" qui voit enfin le jour le 29 mai 2009.

"The Art Of Loss" plante le décor. Les guitares, bien charnues viennent épaissir un ensemble musical où le violon, les claviers et le chant ont tous une importance primordiale. Si les touches électro, beaucoup utilisées sur "Embrace The Storm" sont moins employées, le piano a toujours un rôle primordial dans l’élaboration du son STREAM OF PASSION. Il est surtout extrêmement agréable de pouvoir apprécier la diversité des parties de guitare, Stephan Schultz s’avérant être un soliste d’une fluidité et d’une pureté pas si éloignées d’Arjen Lucassen (le solo de "When You Hurt Me The Most" est un petit bijou). Eric Hazebroek assure quant à lui des rythmiques plombées et des petits leads atmosphériques apportant des respirations bienvenues. Le chant de Marcela, toujours enjôleur, parfois puissant, mais le plus souvent délicat, tranche nettement avec celui des chanteuses plus lyriques à la Tarja Turunen. La sensibilité qui transpire de ses lignes de chant est empreinte de l’univers d’Anneke Van Giersbergen. La musique n’en est pas molle pour autant, et "The Art Of Loss" est un parfait titre d’introduction où chœurs, double pédale et arrangements de claviers ont la parole. "In The End" est bien représentatif de l’inclination pour le mid-tempo du groupe, où les couplets calmes, soutenus par de beaux arrangements de basse, servent d’écrin à la voix de Marcela. Le beau solo qui nous est servi par Stephan Schultz est une valeur ajoutée non négligeable. Ses soli sont toujours placés à propos, courts et concis. Le refrain est lui d’une efficacité sans faille.

Ce qui est agréable avec STREAM OF PASSION, c’est qu’on n’est jamais dans le trop-plein. Le juste équilibre est parfaitement dosé entre les instruments et chacun a suffisamment de place pour s’exprimer. Le piano et la basse en profitent particulièrement, renforçant l’identité singulière du groupe. Pas franchement symphonique, un peu atmosphérique, voire gothique par moments. Et les guitares, si elles portent "Now Or Never" ou "Games We Play" (à la rythmique saccadée très groovy) avec toute leur énergie, elles se font subtiles sur "When You Hurt Me The Most" ou "Run Away" sur laquelle le piano domine et où un coryphée vient faire écho au chant de Marcela, plus dramatique que d’ordinaire quand elle va chercher dans ses graves. "Run Away" est selon moi un des sommets de la première partie de l’album. STREAM OF PASSION se révèle particulièrement doué pour les ballades à l’image encore de "All I Know" qui trouve un écho immédiat. Les morceaux plus pêchus sont bizarrement plus difficiles à appréhender et l’album demande de nombreuses écoutes attentives pour trouver ses marques dans un environnement sonore pas si habituel. Cependant, les mélodies de "This Endless Night" et "Burn My Pain" vous resteront en tête instantanément.

Le groupe sait jouer sur son particularisme qu’il met à profit sur scène où sa musique, vivante et sensible, et où l’efficacité et la variété des guitares et le jeu de batterie (excellent et varié) de Davy Mickers sont mis plus en avant. Et quelle frontwoman ! À l’image de sa frêle silhouette, elle fait preuve de délicatesse, se déplaçant relativement peu mais focalisant l’attention du public. Sans se mettre en avant (son camarade bassiste Johan Van Stratum est particulièrement charismatique), elle arrive à gérer avec brio son rôle de chanteuse et de violoniste.

Le seul reproche que je ferai à ce disque est qu’il est peut-être un peu long. Ces quatorze titres (bonus track et cover de RADIOHEAD comprise) empêchent souvent de profiter de l’album en entier mais on y reviendra tout de même assez régulièrement, les morceaux ne dépassant que rarement les 4 minutes 30. À signaler tout de même que "Far And Apart" est du même acabit que le reste de l’album, loin d’être un rebut donc. STREAM OF PASSION réussit avec "The Flame Within" à conserver sa crédibilité en affirmant nettement sa personnalité et en maintenant une qualité d’écriture comparable à celle de son premier album. Rien que pour ça chapeau !

(1) Marcela Bovio avait participé un an plus tôt (2004) à l'album "The Human Equation".

Note réelle 3,5/5