Je ne suis pas du genre à rechigner des heures sur l'influence négative de la production d'un album, sauf si, comme dans ce cas, le groupe revient des années en arrière et salit intentionnellement une formule parfaite.

Ce libellé s'intitule "Revelations Of Reckoning Day" et est sorti à la surprise générale en 2008 en offrant un Death/Black mélodique de haute facture, rappelant les pionniers du « Metal à flanc de montagne nordique ». Trois ans plus tard, voilà que le Norvégien ISKALD revient avec "The Sun I Carried Alone", troisième bête de son enclos toujours aussi mélodique et frisquet. Sauf qu'au lieu de capituler sur ce son violent et cristallin avec lequel il avait fracassé les bacs en 2008, il s'est adjoint les mêmes techniciens pour le fusionner avec le son du premier album, "Shades Of Misery" (2006), un brin imbuvable et tellement quelconque ! Résultat : cette nouvelle cuvée, aussi accrocheuse qu'elle puisse être, nous ramène en arrière de manière un peu décevante. Pas que 2006 soit loin, mais cette galette n'était pas transcendante.

ISKALD a peut-être choisi selon moi un sentier plus escarpé pour arriver au sommet, il n'en demeure pas moins que le montagnard en herbe n'a pas perdu de son sens de l'orientation. Il sait presque exactement où il va, ayant amené dans sa besace sa boussole dotée d'une double pédale, de trémolos mélancoliques, d'une voix de corbeau et d'une atmosphère suffocante trahissant instantanément ses origines. Et c'est là que je me fais chier avec cette offrande : j'ai déjà entendu ça des milliers de fois. Même le chant ressemble à celui de Shagrath, alors que si la musique n'est pas entièrement calquée sur du vieux DIMMU ou IMMORTAL, elle sait piger chez les combos marquants du genre Black mélo de l'entière Scandinavie.

Pour vraiment prendre notre pied avec ISKALD, qui se la joue moins pompeuse je le répète, il faudra s'imaginer les paysages noircis par le vent glacial. Il faudra marcher des heures à s'en geler les rotules, encapuchonné dans une grosse laine. Il faudra surtout écouter le style versatile de Simon Larsen, dont la guitare me rappelle vaguement NAGLFAR, ELITE et KEEP OF KALESSIN, ce qui épaissit le mystère autour des influences du combo. Qu'importe, les riffs harponnent quand il faut et sauvent ISKALD de la congélation sans possibilité de réanimation. Organiques, dépressives, véloces, ces grattes foutent les jetons en lorgnant à quelques occasions dans le psychédélisme naissant du climat suggéré sur "The Sun I Carried Alone". Or, elles agissent surtout en bouée, les fûts et la basse, quasi inexistante, faisant plutôt acte de présence. Ils sont essentiels, mais ça ne veut pas dire qu'ils interpellent. Pour résumer ma pensée obscurcie par la furie de Larsen, concentrez-vous sur lui et vous risquez de faire un voyage digne de mention.

Le trip arctique sera encore plus puissant si vous vous habituez à ce changement de cadre, vous qui aviez adoré "Revelations Of Reckoning Day" et sa bouille étincelante. Là, il faudra faire votre deuil, car de son propre aveu, le groupe n'a pas l'intention de revenir à ce type de production hollywoodienne, il préfère patauger dans la mélasse qu'il engloutit présentement sans ménagement. Et c'est tant mieux, mais en attendant, le choc est fort. Le prochain skeud devrait rameuter toutes les brebis égarées autour de la chapelle ISKALD.

Pour ma part, j'ai accepté, j'ai entendu et j'ai été à demi-vaincu.
Note : 3,5/5 (compte tenu qu'ISKALD est dans le haut du panier de son genre).

Top : "Natt Utover Havet", "Forged By Wolves", "The Sun I Carried Alone", "Burning Bridges".