Amateurs de KRALLICE, de Black fusionné avec du Hardcore et de l'Extrême et, dans une moindre mesure, de WITTR, sautez sur ce groupe avant qu'il ne vous file entre les doigts comme le rat drogué qu'il est. Allez, pressez-vous, il joue à une vitesse si effarante et débile qu'il vous sera ardu de le rattraper lorsqu'il aura tourné le coin…

LITURGY est originaire de Brooklyn, alors que KRALLICE, son plus proche poursuivant, demeure de l'autre côté de la rivière Hudson. Ils sont voisins, jouent le même genre de bouillie difforme, énergique et révolutionnaire (pas dans le genre "wow, voici le messie", dans le genre "fuck the rules"), et nous clouent au piloris. Décontenançants, brillants pourrait-on dire, pas nécessairement virtuoses, gueulards (en vérité, le chanteur émet des cris mélangeant l'âpreté de la colère et l'acidité du vomi, un superbe cocktail à servir naze à vos amis quand vous avez perdu la notion de bon goût en fin de soirée), les quatre mabouls ne sont pas à prendre avec délicatesse.

Le genre de mecs qui ouvrent les vannes, défoncent le mur du son pendant 3 à 5 minutes grâce à une guitare aiguë et un rythme de fou, déposent leurs instruments, se tapent un petit interlude bizarre – avalanche de samples ou chœurs fantomatiques – qui ne veut rien dire (ils les intitulent d'ailleurs tous "Untitled", tiens donc, KRALLICE a usé du même subterfuge avec une de ses longues pièces sur son dernier super-skeud, "Dimensional Bleedthrough") et repartent avec le prochain « truc ».

Et ne vous fiez pas aux titres pseudo poétiques "Pagan Dawn", "Arctica" ou "Beyond The Magic Forest", il n'y a pas grande différence entre le début et la fin de ce "Renihilation". On ne peut prétendre avec certitude qu'à travers cette impénétrable muraille à la production ultra dégueulasse, une quelconque couleur se détache de la palette. Regardez cette pochette, c'est à cette éclipse que vous aurez droit, à rien d'autre, que du noir derrière du blanc ou du bleu, bref une quelconque porte de sortie pour échapper à cette mort de la forme. La mort, vous dis-je.

KRALLICE est taxé d'avant-gardisme. LITURGY y aurait-il droit aussi ou le priverons-nous de ce tag ? Je sais pas trop. Je crois que Black est la bonne famille, mais de là à dire que « ça » est de l'avant-gardisme… Disons que c'est de la modernité en blocs de schiste, de l'expérimentation de jeunes musiciens à la recherche d'une sonorité hasardeuse. N'oublions pas que c'est un premier pas sur le marché pour ces gamins… Alors normal que ça décoiffe encore plus.

Y'en a des tonnes comme eux. Surtout dans l'est américain depuis quelques années. New-York regorge de ces groupes Doom, Stoner, Black moderne (« fusion »), Sludge... Faut que ça sonne sale et puant, que ça ne réponde à aucun stéréotype, faut que ça hurle, que ça débouche les oreilles et les toilettes publiques à coups de tempêtes électriques et de cymbales agressantes, ou de beats pesants au niveau de distorsion presque insoutenable. Des cyclones branchés sur le 1000 volts produisant assez de mégawatts pour approvisionner toute l'île de Manhattan. Oh oui, ça prend ça, et pas besoin d'avoir une formation musicale ultra poussée, non, qu'une habileté à gratter comme un déchaîné pour assouvir la rage de thrasher de fans sur les amphets' ou le Red Bull-vodka. Symptôme de notre époque qui en accroche plusieurs et qui en découragent autant.

Clone de KRALLICE ? Je dirais sous-clone, car LITURGY n'a pas le talent de compositeur de ses voisins, qui penchent quand même vers un certain Prog', même si les deux sont tout aussi rapides et intenables dans leur exécution.