AMESOEURS n'a pas créé le buzz qu'on aurait pu lui prédire.
Pourquoi ?

AMESOEURS, c'est une pré-adolescente sans voix et sous-mixée qui chante de façon très approximative et dont on entend à peine les murmures.
AMESOEURS, c'est une étiquette black qui colle mal à la peau d'un groupe de timides ayant un jour commis l'erreur de découvrir DARKTHRONE et EMPEROR, ayant un jour commis l'erreur de rencontrer un certain Valfunde, au lycée ou ailleurs, un odieux personnage au tempérament envahissant.
AMESOEURS, on n'a jamais bien compris s'il s'agissait d'un nouvel ALCEST à peine déguisé ou d'un personnage totalement indépendant au sein de la scène…
AMESOEURS, on ne sait trop au sein de quelle scène le classer. Bien éloigné du shoegaze des origines que, de toute manière, seuls les metalleux les plus ouverts d'esprit connaissent et dont il s'inspire pourtant terriblement. Paumé quelque part entre rock gothique et post punk aléatoire. Encore bileux black à de courts instants éructés.
AMESOEURS, c'est une musique qui traîne sans qu'on ne retienne rien de précis, surtout pas un riff puisqu'il n'en joue pas.
AMESOEURS, de toute manière, ils ont splitté parce qu'ils ne s'entendaient pas sur leur avenir musical commun. Incompréhension palpable tout au long de ce premier, dernier, seul et unique album qui transpire les contradictions, qui accumule les essais jamais totalement transformés et à la cohérence très relative.

Et pourtant, AMESOEURS, c'est ou c'était vachement bien.
Et c'est dans ses cent mille défauts qu'il touche le plus.

Audrey Sylvain possède un timbre d'une formidable banalité pas banale, sa tessiture frise le ridicule, sa somnolence nous attaque. A girl next door… une fille chouette… une toute petite ambition très humaine, des envies d'écolière. A défaut d'un grand talent, du charme, beaucoup de charme. Une sensualité embarrassée, une maladresse émouvante, un bourgeonnement touchant.

Autour d'elle, tant d'influences et de volutes qui s'entremêlent en se cherchant longtemps.
Une basse clinquante, un pont tendu vers le revival new wave actuel.
Un triple caractère à la guitare :
Des nappes éthérées qui jaillissent de moult écoutes de MY BLOODY VALENTINE, SLOWDIVE, RIDE et CHAPTERHOUSE.
Les accents industrieux grapillés chez JESU…
Le rock tête baissée et bras ballants, SISTERS OF MERCY… CHRISTIAN DEATH ?

Sous elle, un démon. "I XIII V XIX XV V XXI XVIII XIX – IX XIX – IV V I IV" et l'immonde PESTE NOIRE joue les trublions écoeurants en détruisant le frêle édifice de sentiments pour plonger l'écoute dans un chaos morbide. En 4 petites minutes. Déstabilisant.

Les images se multiplient, parfois belles, parfois moins ragoûtantes. Les poèmes de Tim Burton et ses personnages aux genoux rentrés, Mylène Farmer version rock et collège US.

Et ces attitudes qui se désavouent à tour de rôle.
"Les Ruches Malades" se dandine doucement sans faire mal à personne. "Heurt" frôle le headbang. "Recueillement" se mate les pompes en avalant un cachet de Lexomil. "Trouble (Eveils Infâmes)" est grave, une intro à la CRADLE OF FILTH qui sent fort la poussière ou un simili Satie…
Et ces prises de position insuffisamment tranchées.
Comment "Faux Semblants" ose-t-il nous ramener à une pop rock française années 80 mollassonne lorsque "Amesoeurs" nous plonge la tête la première dans le véritable esprit british synthétique de la même époque ?
Manque de courage, paresse congénitale et Audrey, toujours lancinante de bout en bout.

On s'emmerde ferme ? On se laisse bercer par une douce facilité.
Bancal ? Indécis.
Insipide ? Délicat.
Ramollo ? Attendrissant.