EVIL MASQUERADE agace et rassure à la fois.
Il agace car il ne change pas. "Third Act" et "Fade To Black" concourraient pour le jeu des sept différences qu’ils seraient recalés illico. Même Einstein en perdrait son algèbre. Quand j’enclenche "Fade To Black", j’ai l’impression plus résistante qu’un scratch flambant neuf d’avoir acquis une compil de faces B. Mais attention, pas des faces B inavouables ou ratées. Que du bon. Du bon comme sur "Third Act". Du bon comme sur "Theatrical Madness".
C’est en cela qu’EVIL MASQUERADE rassure. Car il est doué.

Au fait, depuis quand ça me fait peur, à moi, les groupes qui font et refont sans cesse les mêmes trucs ? Eh bien, c’est que les attentes ne sont pas les mêmes quand il s’agit d’EVIL MASQUERADE, formation dont le premier album a constitué un bouleversement de hiérarchie dans le genre (confidentiel) du Heavy néoclassique. J’attends de lui des émotions sans cesse renouvelées. Le talent génère les attentes les plus vives. Appelons ça la rançon de la gloire, si vous voulez.
Seulement, EVIL MASQUEARDE évolue en roue libre. Et sa routine à lui c’est de produire de bons albums de Heavy néoclassique, du genre qui restent en tête, qui se reprennent à tue-tête, qui font du bien par où ils passent.

"Diamond Dust" par exemple. Dans le style dense et riche en rythmes, il détient toutes les qualités pour postuler parmi les meilleurs titres du groupe. Une intro qui monte en puissance, un riff honnête, une ambiance épique appuyée, un refrain catchy juste comme il faut, un solo aussi fugace qu’intelligent, voila la recette dont les Suédois ont le secret depuis un lustre et qu’ils servent une fois de plus avec toujours autant de classe. Autre illustration, "Lights Out" et son introduction trompeusement mollassonne qui prend d’un coup dix grammes d’adrénaline. Avec son refrain pêchu, il gagne de la hauteur, flotte un long moment et retombe sous le poids d’un riff bien tranchant. "The Darkness Within" joue des mêmes armes, même s’il se décline plus simplement. L’essentiel s’exhibe rapidement, sans détours avec pour lier le tout, cette solennité théâtrale jamais très sérieuse, marque de fabrique des Suédois.
Et la ballade ? C’est vrai qu’EVIL MASQUERADE aime les ballades. Et elles le lui rendent bien tant la plupart se montrent de très bonne facture. "I Believe In Sin" n’échappe pas à la règle. Les Suédois refusent la facilité, comme d’habitude, et font porter la mélancolie sur des mélodies plus pesantes que larmoyantes. Apollo Papathanasio, chanteur d’exception (si vous ne le saviez pas encore), fait des prouesses. Sa voix chaude et puissante garantit quelques frissons à ceux que cet organe à tendance à émouvoir.

Alors oui, plus que jamais, EVIL MASQUERADE agace à user sans vergogne ses ficelles, et rassure à proposer un album de très bonne tenue, propre à étancher les soifs d’un genre dont les sorties intéressantes se comptent chaque année sur les doigts d’une main. Au mieux de Mickey, au pire de César accordant sa grâce au légionnaire. Quoi qu’il en soit, il y a d’autres manières plus brutales d’agacer. Celle choisie malgré lui par EVIL MASQUERADE, on la lui pardonnera. Pour le moment.