Isahn est un artiste complet, et il aime le montrer. Avec la carrière d'EMPEROR déjà bien derrière lui, le bonhomme aura sû se montrer plus ou moins imaginatif chez PECCATUM, THOU SHALT SUFFER, et dernièrement sur un album solo pas des plus lumineux mais au moins assez varié pour une nouvelle fois redécouvrir le bonhomme sous un autre jour blindé d'influences diverses.

Après cette petite incartade, en voilà une nouvelle qui énervera peut-être certains, qui réjouira d'autres et qui plongera la grosse majorité (non Norvégienne) dans l'indifférence la plus totale.

HARDINGROCK, c'est avant tout une rencontre. Celle des ex-PECCATUM avec le musicien traditionnel Knut Buen, réputé comme l'un des meilleurs musiciens folk de son pays, et qui plus est l'un des meilleurs joueurs de Hardingfele, violon typiquement norvégien, plus que ça même, l'instrument officiel de la Norvège.
Grimen est au moins une très bonne nouvelle: les barricades entre le monde du folk traditionnel et celui du Metal (extrême) se délient peu à peu, et c'est tant mieux.

Côtoyant autant GÅTE que LUMSK ou encore TENHI, forcément très proche des airs traditionnels Norvégiens et de leur atmosphère maritime et médiévale, Grimen regorge d'influences diverses, passant du morceau atmosphérique du premier effet (le très bon « Daudingen », « Den Bergtneke »), les pistes traditionnelles plus basiques (« Huldreslåtten (Bygdatråen) ») au folk metal festif et atmosphérique où les hurlements poussifs et énervés de Ihsahn ponctuent des mélodies prenantes (« Faens Marj », « Fossegrimen »), en passant par des morceaux entièrement narratifs (« Margit Hjuske », « Grimen »...) qui ne s'avèrent jamais vraiment pertinents pour nous autres, non-scandinaves (et rendre des narrations intéressantes, c'est possible, mais il faut plus étoffer que ça quoi!). Quelques rythmes électroniques par-ci par là, foisonnés par des ambiances légères sur un « Faen På Bordstabelen » rappelent de loin le Vedergallingen de GARMARNA, ou le très beau (et supérieur) « Nykken », un peu VANGELISien dans l'âme.

Alors bon, Grimen n'est pas mauvais, il propose une vision du folk assez diversifiée, assez proche de la démarche de LUMSK (sans pour autant en avoir la même qualité). L'ambiance forestière retranscrite par la pochette est belle et bien présente, le chant de Madame Ihsahn est toujours agréable à entendre, les quelques gueulantes black de Ihsahn sont cependant plutôt décalées avec l'ensemble. En revanche les quelques chants clairs de Mister Emperor sur l'instrumental fluctuant « Fanitullen » s'avèrent sympathiques.
Quant aux blablas de Knut...bon vous savez ce que j'en pense, je ne doute pas que ce soit très riche niveau texte et concept, mais évidemment pas abordable pour la majorité de l'auditoire.

Tout ce beau petit mélange manque tout de même d'une trame générale puis de ce petit quelque chose qui l'éleverait un peu. Le Hardingfele est certes central, mais loin de se retrouver sur un piédestal. Je ne doute pas du talent de Sir Buen, mais je doute cependant qu'il s'y soit mis à fond dans cet album. Tout comme les deux autres d'ailleurs, qui se font bien plaisir, touchent un peu à tout en surface sans vraiment toucher au coeur. J'ai surtout l'impression de voir dans tous ses morceaux une suite d'introductions qui n'en viennent jamais aux faits, des débuts d'idées qui ne se concrétisent pas.

Un album gorgé des talents de trois fortes personnalités, mais dénué d'un vrai génie commun.

Frustrant, mais correct. Vivement la suite...quand même...